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27 août 2013 2 27 /08 /août /2013 14:46

Voilà, celà fait aujourd'hui quatre ans que le blog est ouvert.

 

L'année écoulée n'a pas été d'une activité folle, et je m'en excuse. L'année n'a pas été spécialement évidente pour moi, mais je prends toujours autant de plaisir à écrire, même si c'est peu fréquent. J'espère simplement que vous prenez du plaisir à lire les rares chroniques et que surtout vous êtes toujours aussi curieux en matière de rock... Merci en tout cas à vous de me lire.


En espérant que j'arrive à écrire ici encore pour un moment, je vous dis à bientôt! Et n'oubliez pas... Ce n'est que du rock n 'roll, mais c'est ce qu'on aime!

 

Moi-même.

 

 


 
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21 août 2013 3 21 /08 /août /2013 14:03

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/8/85/Nirvana-Incesticide.jpg

 

Tracks : Dive ; Sliver ; Stain ; Been A Son ; Turnaround ; Molly’s Lips ; Son Of A Gun ; (New Wave) Polly ; Beeswax ; Downer ; Mexican Seafood ; Hairspray Queen ; Aero Zeppelin ; Big Long Now ; Aneurysm

 

Qui aurait pu parier sereinement sur l‘avenir de Nirvana en 1990 ? Peu de gens, je suppose. Car si Nirvana - Bleach (1989) n’est pas un mauvais album (loin de là), il est loin d’être annonciateur de la légende que deviendra le trio de Seattle quelques années plus tard. Et pourtant, il faut saluer le flair des gens de chez Geffen, suffisamment habiles pour débaucher Nirvana du petit label indépendant Subpop, qui détenait les droits des premiers enregistrements de Nirvana. La major fut en outre suffisamment intelligente pour allouer au groupe les services du producteur Butch Vig. Ce qui malgré les protestations des fans et de Cobain, n’est ni plus ni moins qu’un éclair de génie.

 

1991 : la tournade Nevermind est passée. Emmené par quatre singles majestueux (Smells Like Teen Spirit ; Come As You Are ; Lithium ; In Bloom), le disque cartonne et remet le rock à guitares à la mode pour de longues années. Pourtant l’histoire de Nirvana, et à fortiori du grunge, n’a pas commencé avec Nevermind, ou même Ten de Pearl Jam. Bien vite, les fans du trio formé par Kurt Cobain, Krist Nosovelic et Dave Grohl s’intéressent aux premiers enregistrements du groupe, gravés chez Subpop. Bleach bien entendu, mais pas uniquement. Des pirates sur les premiers enregistrements du groupe se mettent à circuler sur le marché noir. Au grand désarroi de Cobain qui juge ces bootlegs de mauvaise qualité, et prend la décision de publier officiellement une compilation qui regrouperait divers enregistrements de l’époque Subpop, ainsi que certains de chez Geffen. Le label indépendant ne se fait pas prier et très vite un accord est trouvé. La compilation, nommée Incesticide est publiée le 14 décembre 1992 sous une pochette dessinée par Cobain, et un an après Nevermind, vise à poursuivre la folie Nirvana. Avec succès ?

 

De manière très normande, je dirais oui et non. Car Incesticide est clairement un disque de transition pour Nirvana, qui ne l’a d’ailleurs pas pensé en tant qu’album. Il y a de tout ici, des morceaux relativement expérimentaux aux bombes pop-grunge que le groupe enfilait comme des perles entre 1991 et 1994. Le début du disque fait d’ailleurs la part belle à des morceaux qui auraient pu faire des singles tout à fait satisfaisants. Derrière la production lourde de Butch Vig et ses grosses guitares, Dive est par exemple un morceau plutôt bien écrit, assez lancinant et plaisant. Il aurait pu se trouver sur Bleach, mais il annonce quelque part déjà la suite de ce que sera Nirvana : un groupe de pop qui se cache derrière de grosses guitares.

 

Une impression renforcée par les morceaux suivants, le tubesque Sliver en tête. Là clairement, ce titre aurait pu se trouver sur Nevermind ou In Utero. C’est une véritable bombe pop, bien composée (ce refrain !), porté par une très bonne ligne de basse et où la rage du groupe, conjuguée au texte très personnel de Cobain (qui évoque ici le divorce de ses parents) fait littéralement des merveilles. Un clip fut même tourné pour ce morceau, mais ne fut jamais utilisé, et c’est bien dommage tant il mérite de figurer parmi les meilleurs titres du combo. On le retrouve d’ailleurs sur le best-of, ce qui est on ne peut plus logique. Une des pépites cachées du groupe.

 

Il en va de même pour Been A Son, morceau assez bref et peu connu du trio, mais qui est clairement excellent. Tout comme Sliver, ce morceau est clairement pop : le refrain est dévastateur, se retient vite et bien, et les instruments sont bien équilibrés entre guitares lourdes et rythmique carrée (notamment la batterie assurée ici par Dave Grohl). Le chant de Cobain achève de nous conquérir sur ce titre enregistré le 9 novembre 1991 à une BBC Session pour Mark Goodier. Aneurysm, qui conclut le disque et qui a été enregistré lors de la même session démontre bien qu’au-delà de ceux de Nevermind, Nirvana avait composé un bon nombre de très grands morceaux en 1991.

 

La compilation est aussi complétée avec trois reprises, jouées lors d’une autre BBC session du 21 octobre 1990 pour le légendaire DJ anglais John Peel. Il s’agit de Turnaround (du groupe Devo), de Molly’s Lips et de Son Of A Gun des Vaselines. On le sait, Nirvana a été doué tout au long de sa carrière pour faire des reprises. C’est le cas sur Nirvana - Unplugged In New York (1994), mais c’est aussi déjà le cas ici. Ces reprises sont extrêmement plaisantes, notamment la très belle et très connotée Molly’s Lips qui semble parler de drogue. Son of A Gun est aussi un très bon morceau, et au final le moins qu’on puisse dire, c’est que Nirvana était très à l’aise pour jouer les morceaux des Vaselines (Jesus Doesn’t Want Me For A Sunbeam sur l’Unplugged est aussi d’eux) !

 

La suite se fait avec une version alternative de Polly assez intéressante, plus rapide et électrique que celle de Nevermind mais qui est à mon sens inférieure à l’originale ou à celle de l’Unplugged.

 

Le dernier tiers du disque (Aneurysm excepté) est composé de six morceaux assez punks dans l’âme, enregistrés entre janvier 1988 (Beeswax ; Downer ; Mexican Seafood ; Hairspray Queen et Aero Zeppelin) et les sessions de Bleach en décembre 1988 et janvier 89 (Big Long Now). Je dois bien avouer que c’est à ce moment là que je décroche d’Incesticide. Cette facette punk et juvénile de Nirvana ne me passionne pas outre mesure, à l’exception du lancinant et intéressant Big Long Now, qui aurait vraiment pu se trouver sur Bleach. Un album que je n’apprécie pas outre mesure, même s’il reste tout à fait correct. Et ces morceaux du début de Nirvana sont à mon gout assez laborieux et au final assez dispensables, à moins d’être un fan absolu du combo…

 

Voilà qui gâche donc un peu mon appréciation globale d’Incesticide. Ce qui est dommage. Car clairement, on a affaire ici à une bonne compilation, complète et instructive, mais qui bat un peu le chaud et le froid. D’un coté, il y a de vrais bons morceaux, notamment ceux enregistrés après 1990, et quelques pépites méconnues du groupe (Sliver ; Dive ; Been A Son ; Aneurysm). Les reprises sont aussi extrêmement agréables. D’un autre coté, la compilation couvre les premiers enregistrements du trio, et là clairement j’en suis moins friand. Néanmoins, si Nevermind et In Utero restent largement meilleurs, un amateur du groupe gagne clairement à poser une oreille sur Incesticide, tant il contient de bonnes choses. Pour fans.

 

13/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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1 août 2013 4 01 /08 /août /2013 16:54

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/f/fc/Acdc_high_voltage_international_album.jpg

 

Tracks : It’s A Long Way To The Top (If You Wanna Rock ‘n’ Roll) ; Rock ‘n’ Roll Singer ; The Jack ; Live Wire ; T.N.T. ; Can I Sit Next To You Girl ; Little Lover ; She’s Got Balls ; High Voltage

 

En 1975, le hard-rock est indéniablement en plein essor. Derrière les pionniers du genre qui ont explosés tous les records de puissance et de décibels au début de la décennie (Led Zeppelin, Black Sabbath, Deep Purple), des dizaines de groupes s’engouffrent, élargissant le sillon d’un blues-rock très lourd et puissant. 1975 est une grande année pour le hard. Led Zeppelin livre avec Led Zeppelin - Physical Graffiti (1975)  son album le plus fourni et ambitieux, Black Sabbath fonde quasiment le futur thrash metal avec Sabotage, tandis qu’Aerosmith devient un grand groupe avec son troisième disque Aerosmith - Toys In The Attic (1975), qu’Alice Cooper choque à nouveau l’Amérique avec Welcome To My Nightmare et que Kiss assoie sa réputation scénique avec le double live Alive !, grand classique du hard rock en concert. Et pourtant, le phénomène hard-rock ne concerne pas uniquement les anglais et les américains. 1975 voit l’émergence d’un futur géant du hard rock germanique avec In Trance, le troisième album de Scorpions, et voit surtout un nouveau groupe débouler tout droit d’Australie, toutes guitares électriques en avant : AC/DC. A l’époque, le groupe n’en est qu’à ses débuts, mené par un juvénile Angus Young déjà épaulé par son frère Malcolm à la guitare rythmique, Mark Evans à la basse, Phil Rudd derrière les futs et bien accompagné par un chanteur dont la voix sera (et est toujours) une des plus impressionnantes du hard : celle de Bon Scott.

 

C’est en 1975 que les deux premiers disques du groupe (T.N.T. et High Voltage) sortiront en Australie. Mais c’est grâce à une version internationale de High Voltage, retravaillée (elle comprend des morceaux des deux disques australiens) et publiée en 1976, que le groupe va faire son entrée fracassante dans le panthéon du hard-rock. C’est sur cette version d’High Voltage que je me penche aujourd’hui.

 

Clairement, si certains groupes ne prennent leur essor qu’après plusieurs albums (c’est le cas d’Aerosmith par exemple, qui ne deviendra énorme qu’à partir de Toys In the Attic et Rocks), les joyeux lurons d’AC/DC frappent fort d’entrée de jeu. Le premier morceau, qui servira de single au disque est une vraie profession de foi du rock binaire : It’s A Long Way To The Top (If You Wanna Rock ‘n’ Roll). Les paroles sont ultra basiques (évoquant le long chemin à parcourir pour devenir une rock star), mais permettent de faire connaissance avec la voix de Bon Scott. Ce n’est pas sa meilleure prestation vocale (il y a mieux, même sur le disque), mais clairement, ce chant blues éraillé, avec une gouaille et une puissance inimitables est délicieux. Si AC/DC est un groupe qui me fatigue pas mal ces dernières années (j’ai du mal avec Black Ice ou même The Razor’s Edge par exemple), la voix de Bon Scott (sans critiquer aucunement Brian Johnson), fait tout le charme de leurs premiers enregistrements. La rigueur et la précision rythmique du groupe (ce qui est d’ailleurs toujours sa marque de fabrique), la production rugueuse, la mélodie très entrainante du refrain et le surprenant mais finalement génial break de cornemuse finissent de faire d’It’s A Long Way To The Top (If You Wanna Rock ‘n’ Roll) le premier classique instantané du groupe. Le premier d’une longue série.

Mais des classiques, ce premier disque en compte (déjà !) plusieurs. A commencer par The Jack, morceau proprement ahurissant qui est toujours joué en live par AC/DC. Une des chansons  les plus ouvertement blues de leur répertoire d’ailleurs. Un titre qui pue allègrement le sexe et le whisky. Et qui parle surtout du premier. Sur un rythme très lent et lascif, Bon Scott se laisse aller à un chant extrêmement sexuel, véritable hymne misogyne à la baise. Et que dire de la guitare d’Angus, qui se révèle ici l’élève studieux (comme le montre sa tenue) de Muddy Waters ou de Jimmy Page ? Béatiquement sexuel, simplement jouissif. Du riff de guitare, de la rythmique excellente et prenante au chant éraillé et plein de gouaille, tout est parfait.

 

La face A du disque est d’ailleurs particulièrement jouissive car elle contient aussi un autre petit classique du groupe, Live Wire, qui sera publié en single à l’époque. On n’est pas au niveau de The Jack ou d’It’s A long Way To The Top (if You Wanna Rock ‘n’ Roll), mais la rythmique très lourde, notamment la batterie de Phill Rudd et les prouesses à la guitare d’Angus qui livre ici un joli solo, couplé avec l’énergie farouche du groupe font de ce titre un morceau très solide du répertoire du groupe à ses débuts. Ce qui associé avec l’efficace et sympathique Rock ‘n’ Roll Singer fait de la face A de ce disque une entrée en matière discographique qui pourrait être enviée par bien des groupes.

 

Mais c’est encore un énorme classique d’AC/DC qui nous accueille sur la face B, avec le dantesque et joyeusement régressif T.N.T. Clairement, on a affaire ici à un morceau taillé pour les stades. Clairement, on a affaire à un hymne du rock n roll binaire, tant son riff est addictif et tant les chœurs scandant le « oi,  oi, oi ! » en intro et après le solo de guitare sont grégaires et jouissifs. Le rythme du morceau, bien servi par Phil Rudd et l’usage des contretemps et des silences (qui permettent de caser d’autres « oi, oi, oi » en concert) en font un gros pilier du répertoire live du groupe. Monstrueux, et magnifié en concert (comme sur le live At Donington de 1992).

 

Après ça, un morceau plus boogie rock (qui m’évoque un peu Status Quo d’ailleurs) comme Can I Sit Next To You Girl parait nettement plus anodin. Il l’est, mais n’est pas forcément mauvais pour autant. Révélant les racines blues et boogie du groupe,  il est surtout sublimé par le timbre bluezy et la gouaille sexuelle de la voix éraillée de Bon Scott. On n’imagine moins le plus puissant Brian Johnson sur ce titre. De même, le langoureux et torride blues Little Lover est caractéristique des débuts d’AC/DC. Le riff est un peu sale, la rythmique assez lente et lourde et le chant de Bon Scott est éraillé et un peu vicieux. Même le solo de guitare d’Angus, loin de son style futur, vaut le coup qu’on s’y arrête, même si sur cet album, The Jack est nettement plus fédérateur et puissant. L’amusant She’s Got Balls (quelle poésie !) vaut lui aussi pour son rythme fait pour taper une chope de bière sur un comptoir de pub et pour le chant primal et primaire de Scott, qui répond à merveille aux soli d’Angus dans un joli dialogue musical. Enfin le morceau titre qui clôt l’album, s’il est paradoxalement celui que j’aime le moins ici, dégage un capital sympathie susceptible de satisfaire n’importe quel amateur de rock, sans pour autant le transcender.

 

De toute façon, n’importe quel amateur de rock plus ou moins musclé devrait trouver son compte à l’écoute de ce premier essai international d’AC/DC. Car High Voltage est à mon sens un des opus les plus attachants du combo australien. Révélant à merveille les influences blues du groupe, ce disque à la production rugueuse propose déjà la formule qui fera de ce groupe un monstre du hard-rock : rythmique millimétrée, guitare hard-blues survoltée et chant surpuissant et extrêmement sexuel. Il contient en outre trois grands classiques du groupe, It’s A Long Way To The Top (If You Wanna Rock ‘n’ Roll), The Jack et T.N.T. et ne contient aucun titre réellement mauvais. Tout au plus Rock ‘n’ Roll Singer, She’s Got Balls et High Voltage sont anodins. Un disque qu’au final, je trouve plus attachant que le mythique Highway To Hell, et que j’écoute plus souvent (et qui est un de mes préférés d’AC/DC avec Let There Be Rock et AC/DC - Back In Black (1980)). Des débuts en fanfare, assurément.


15/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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7 juillet 2013 7 07 /07 /juillet /2013 04:13

 

Tracks : I Wear Black ; Drop Dead Baby ; High School ; Ramona ; Doctor Doctor ; Bikini Babes ; Take Up Thy Stethoscope And Walk ; Reverse Shark Attack

 

L'histoire de ce disque commence vers 2004, sur les bancs d'un lycée de Laguna Beach en Californie. C'est dans ce lycée que deux adolescents se rencontrent et décident de former un groupe, qu'ils appellent Epsilons. La bande de lycéens enregistrât trois albums, trois décharges soniques de punk juvénile qui allaient marquer les esprits, jusqu'à ce que les deux adolescents repartent chacun de leur coté, vers 2007. Dans des groupes différents. Pourtant Ty Segall et Mikal Cronin ne devaient pas en rester là. Quelques mois plus tard, tandis que Ty commence à percer en solo avec son premier album éponyme et Lemons, il retrouve Mikal et décide d'enregistrer un disque en collaboration avec celui qu'il appelle son « frère musical ». En ressort en cette année 2009 Reverse Shark Attack dont la loufoque (et laide) pochette reflète la folie créatrice et la complicité qui règnent entre ces deux jeunes hommes durant l'enregistrement.

 

Lorsqu'I Wear Black se lance, on se dit que ce disque collaboratif est définitivement placé sous le signe de la folie. On est pourtant habitué au travail en solo ou en groupes des deux énergumènes, qui n'ont pas livré les disques les plus sains d'esprit de ces dernières années. Mais là dès l'entame, on sent que ce disque sera aussi barré que sa pochette. C'est bien simple : le son est dégueulasse et incroyablement tordu, psychédélique à souhait. A vous faire passer un morceau des Seeds pour une ballade des Beatles.

 

Et ça ne va pas en s'arrangeant tout au long de la face A du disque (qui va jusqu'à Take Up Thy Stethoscope And Walk). Drop Dead Baby, au titre si charmant, donne en effet l'impression d'avoir été enregistré au fin fond d'un caverne, tant la rythmique s'assimile à grondement ténébreux. Le terme garage-rock prend ici tout son sens, bien plus que chez certains poseurs. Le chant, assuré par Segall et Cronin semble faire revenir d'outre tombe le spectre de Lux Interior, le chanteur des Cramps décédé la même année. Il est littéralement possédé, caverneux et sombre, et surtout incroyablement distordu et empli d'écho. Ce chant, ajouté à la section rythmique brutale et étouffée et aux guitares noyées sous la fuzz et la distorsion crée une ambiance de folie sur l'ensemble de ces morceaux garage-punk de la face A.

 

Tous ces morceaux sont d'ailleurs très courts et extrêmement brutaux. Le plus long, en dehors de Take Up Thy Stethoscope And Walk, fait 2min20 environ, et certains tournent autour d'1min30 (Ramona ; Doctor Doctor ; Bikini Babes). Pas de chichis ici, pas de préliminaires. La plus pure tradition punk. Tout est joué pied au plancher, potards à fond, six décharges de garage psychédélique d'une sauvagerie assez difficile à comprendre, surtout en 2009.

 

La seule petite accalmie de la face A est finalement située à la fin avec la reprise de Take Up Thy Stethoscope And Walk, morceau issu de Pink Floyd - The Piper At The Gates Of Down (1967). Si convoquer ici l'esprit de Roger Waters est plutôt surprenant, on constate le bon goût de ces deux jeunes gens qui livrent une reprise légèrement plus longue et plus garage que l'originale, mais qui reste très fidèle à l'esprit psychédélique du Floyd originel. C'est d'ailleurs de loin le meilleur morceau de la face A, même si I Wear Black ou Bikini Babes sont tout à fait sympathiques dans leur genre.

La face B du disque est quant à elle occupée dans son intégralité par un seul morceau, qui donne son nom au disque, Reverse Shark Attack. Si la face A qui fait approximativement une bonne quinzaine de minutes était constituée de six décharges de garage hyper violentes et d'une reprise, Reverse Shark Attack prend lui le contrepied en proposant une sorte de mini symphonie garage-surf de plus de 10 minutes.

 

Le morceau est en effet divisé en plusieurs segments qui alternent les différentes ambiances. Si le début commence de manière extrêmement psychédélique et lourde, le morceau se calme assez vite vers 1min30 pour tourner à la ballade surf psychédélique au son de guitare très proche de celui des années 60. Le chant très clair et la mélodie très pop de ce segment font d'ailleurs penser à une collaboration ultérieure de Ty Segall avec White Fence : Ty Segall & White Fence - Hair (2012). C'est vers 3min50 que le titre redevient plus étrange, sans pour autant redevenir sauvage et il semble se conclure dans un fracas de guitare vers 5min30. Fausse alerte, car c'est à ce moment qu'un riff très surf-rock et une batterie très énergique entrent en scène. Ce segment, qui est probablement le meilleur du morceau évoque très clairement le générique de Pulp Fiction (on peut aisément crier au plagiat à partir de 7min20) et conclut très efficacement et énergiquement ce morceau et le disque qui porte son nom.

 

Reverse Shark Attack vaut donc principalement pour son morceau titre, soyons clair. Cet album n'est en effet pas un des meilleurs disques produits par Ty Segall ou même par Mikal Cronin (qui a à son actif des disques solo très sympas). Les deux amis ont même produit bien mieux ensemble (Slaughterhouse avec le Ty Segall Band). Car ce disque, s'il propose un très bon et long morceau en face B et une reprise de Pink Floyd très efficace n'est qu'un concentré de courts morceaux garage-punk vite lassants. Sa brièveté, ainsi que son excellent morceau titre lui donne tout son attrait. A ne réserver qu'à un public très amateur de garage donc, ou aux fans de Ty Segall et de Mikal Cronin qui n'y bouderont pas leur plaisir.

 

12,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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22 mai 2013 3 22 /05 /mai /2013 00:13

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/thumb/7/71/Psychedelicpillcover.jpg/220px-Psychedelicpillcover.jpg

 

Tracks : Driftin’Back ; Psychedelic Pill ; Ramada Inn ; Born In Ontario ; Twisted Road ; She’s Always Dancing ; For The Love Of Man ; Walk Like A Giant ; Psychedelic Pill (Alternate Mix)

 

Parfois l’écriture est une maitresse bien capricieuse… Pour tout le monde. Même quand on est un des plus grands génies de l’histoire du rock. Suite à un AVC, les médecins ont demandé à Neil Young de complètement arrêter de fumer de la marijuana. Pour l’éternel hippie qu’est le Loner, fumeur d’herbe depuis presque un demi-siècle, le coup est rude. La muse de l’écriture s’est-elle enfuie avec cette obligation d‘arrêter de fumer ? C’est ce que Neil Young semble se demander à demi mots dans son autobiographie parue l’an dernier. Pourtant son talent littéraire est toujours là, c’est indéniable à la lecture de ce très bon livre. Alors quel est le problème ? « S’enfermer dans la grange avec le Crazy Horse, jouer des heures durant jusqu’à ce que la muse revienne ». Voilà qui résume l’état d’esprit de Neil Young en 2012. Il faut dire que tout au long de ses plus de quarante ans de carrière, Neil Young n’a jamais été aussi bien soutenu que par le Crazy Horse, ce groupe composé de Frank Sampedro à la guitare, Billy Talbot à la basse et Ralph Molina à la batterie. Beaucoup des chefs d’œuvre du Loner ont été publiés avec ce groupe (Rust Never Sleeps, Zuma, Everybody Knows This Is Nowhere). Mais depuis le moyen Greendale en 2003, Neil Young n’a plus enregistré un seul album avec son cheval fou fétiche. Bien décidé à rectifier le tir et à apprendre à écrire sans l’herbe, Neil Young s’enferme donc dans sa grange. Avec Crazy Horse, fidèle à sa parole. En ressort début  2012 Americana, un premier galop d’essai  agréable de reprises de standards américains. Cependant, malgré la sympathie qu’inspire la galette, un vulgaire disque de reprises exécutées timidement ne saurait être à la hauteur des attentes suscitées par le retour de Neil Young et du Crazy Horse. C’est alors que fin 2012, Neil Young publie à nouveau un album, double cd (triple vinyle !), son plus long effort à ce jour : Psychedelic Pill. Tout un programme. 

 

Etonnamment, c’est le Loner seul qui nous accueille sur Drifin’ Back, uniquement armé d’une guitare acoustique.  Pourtant tel un cheval qui se lance au galop, le Crazy Horse entre vite en scène. D’abord par les guitares électriques, puis lorsque la section rythmique qui sonne comme nulle autre pareille lance la chevauchée. Nous voilà partis pour un voyage de 27 minutes, très électrique et aérien, où les guitares électriques très saturées grondent et se répondent sans discontinuer sur une rythmique planante et lourde à la fois. Le retour aux jams du Crazy Horse dignes de Ragged Glory ou d’Everybody Knows This Is Nowhere. Les solos s’enchainent, se répondent et se contredisent tandis que la section rythmique poursuit son trot, tranquille et implacable, guidée par les martèlements lourds et secs de Ralph Molina à la batterie et la basse chaude de Billy Talbot. De temps en temps, la voix de  Neil survole l’ensemble, aérienne, émouvante, gravant dans nos mémoires le refrain « I’m driftin Back » comme un mantra. Un galop tranquille, d’une puissance sereine qui n’a finalement pour seul « défaut » que sa longueur, qui le rend parfois un peu redondant. Ce qui permet aussi de prendre le temps de voyager au gré des paysages imaginaires du grand ouest américain qui défilent dans nos têtes à l’écoute de ce titre…

 

Un des « avantages » d’avoir ce disque en vinyle est d’ailleurs que Drifin’ Back est coupé en deux (trop long pour tenir sur une seule face), ce qui mine de rien donne un peu d’air à l’auditeur au milieu du voyage. Comme quoi un défaut technique peut parfois  être une qualité …

 

La suite est encore plus expérimentale avec le court titre Psychedelic PIll qui donne son nom à l’album et qui est complètement noyé sous le flanger, un effet de production qui rend cette pilule complètement… Psychédélique. Tous les instruments et la voix sont noyés dans un son brumeux, amplifié et distordu. L’abus du flanger rend ce titre comme l’acide : C’est cool, mais mieux vaut ne pas en abuser. Il y a d’ailleurs une version du titre avec un mixage plus classique à la fin du disque (ou au début de la face 3 en vinyle), qui fait mieux ressortir le coté très rageur du riff et la solide colère que peut dégager le Crazy Horse. Certes, Neil et les siens ne partent plus dans des galops frénétiquement colériques comme sur Ragged Glory ou Rust Never Sleeps, mais ils restent capables avec des morceaux comme celui-ci de tenir la dragée haute à bien des jeunes groupes. On n’apprend pas au vieil hippie à faire la révolution.

 

Le meilleur est cependant encore à venir avec Ramada Inn. Là encore, le Crazy Horse prend son temps. Le morceau s’étend sur 16 minutes 30. Pour mon plus grand bonheur, car on touche ici au génie absolu. Ramada Inn est un des trois plus grands morceaux du disque avec She’s Always Dancing et Walk Like A Giant. Ce titre démarrant sur un solo de guitare évoquant les plus grandes heures de Neil Young (Cortez The Killer de l’album Zuma, n’est pas loin) est très nostalgique et doux. La rage de Driftin’ Back et de Psychedelic Pill s’efface ici pour que Neil évoque avec mélancolie une douce romance qui s‘étire au fil des âges. Le temps passe, mais l’amour et les vieux amours restent… Et que le temps passe vite sur Ramada Inn avec ce rythme doux du Crazy Horse qui nous berce, les grondements électriques apaisants des guitares et les soli plus émouvants et doux les uns que les autres de Neil Young… Et que dire de ce chant, toujours à la limite du juste, mais toujours bouleversant ?

 

Après un tel sommet, le rock assez basique et classique de Born In Ontario, où Neil Young évoque sa jeunesse canadienne parait forcément un peu fade. Le morceau n’est cependant pas désagréable, notamment grâce au chant de Neil Young et à la mélodie du refrain plutôt agréable et qui se retient bien. La nostalgie est d’ailleurs aussi au programme avec l’anecdotique Twisted Road où Neil évoque la première fois qu’il a entendu Like A Rolling Stone de Dylan et le Grateful Dead à la radio. C’est d’ailleurs le titre le plus dispensable du disque, avec un Neil relativement radoteur pour le coup et un morceau très peu inspiré…

 

Heureusement  She’s Always Dancing qui commence avec les chœurs du Crazy Horse tutoie à nouveau les sommets. Neil et son cheval fou se lancent à nouveau dans une cavalcade plus courte et sobre que Driftin’ Back ou Ramada Inn (ce morceau ne dure « que » 8min33), mais tout aussi efficace. Si ce n’est plus. Les coups secs de batterie fournissent à nouveau un socle parfait pour les soli de guitare, toujours aériens, mélancoliques et absolument fantastiques… La rage tranquille du Crazy Horse, associée au charisme surnaturel de la voix de Young donne ici un nouveau chef d’œuvre, qui aurait presque pu être enregistré en 1975. Tout comme la douceur veloutée de For The Love Of Man, ballade aux accents acoustiques qui prouve qu’en termes de ballade crève cœur, le Loner est définitivement un maitre en la matière. Une petite chanson douce, simple et humble, mais qui frappe juste.

 

Et c’est un immense titre, Walk Like A Giant, qui vient conclure Psychedelic Pill (le mix alternatif du morceau titre est situé après ce morceau sur le cd). Attention, joyau. Pour la troisième fois (Driftin’ Back étant trop long pour pleinement mériter le titre de chef d’œuvre), Neil Young et le Crazy Horse frappent très très très fort. Le Loner, éternel hippie devant l’éternel nous parle ici d’écologie, un sujet qui lui tient particulièrement à cœur (il évoque très régulièrement son obsession pour les voitures à l’éthanol dans son autobiographie), et nous emmène avec son Crazy Horse dans un périple absolument prodigieux, où l’on tutoie les cimes de tous les paysages montagneux du monde. Rugueux le titre l’est. Rageur aussi quelque part. Chaque coup de batterie sonne ici comme un mini séisme. Mais il y a aussi une tension très aérienne dans les grondements orageux des guitares, et les sifflements de Neil Young nous servent de guide, tel un rapace nous faisant contempler depuis les hauteurs les traces laissées par les géants sur notre bonne vieille Terre… Autant dire qu’en 16 minutes 27, on a le temps de voir de magnifiques paysages défiler… Même si malheureusement, les deux dernières minutes du morceau sont absolument chiantes et inutiles.

 

C’est peut-être d’ailleurs un des seuls reproches qu’on peut vraiment adresser à ce disque : il est trop long. Walk Like A Giant pourrait être coupée d’au strict minimum 3 ou 4 minutes, il y a une version en trop du morceau titre, Twisted Road et Born In Ontario ne sont pas spécialement indispensables (sans être de mauvaises chansons) et Driftin’ Back mériterait facilement 10 minutes de moins. Mais il faut bien reconnaître que malgré ses longueurs, ce disque est une vraie mine d’or… On n’avait pas entendu Neil Young & Crazy Horse aussi inspirés et bons depuis… Ragged Glory en 1990 ? Le groupe retrouve tout son savoir faire : émotion et nostalgie adossées à une rage électrique et à un son saturé et sale qui a lancé les bases du grunge il ya 30 ans. Et si le cheval ne galope plus avec la vigueur de ses jeunes années, il est encore capable de mener une course de fond qui distance tout le monde et impose comme indispensable en 2012 un disque de Neil Young.

 

16/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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15 mai 2013 3 15 /05 /mai /2013 15:31

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Dans la grande famille des groupes garage de San Francisco, deux noms ressortent le plus souvent : Ty Segall, la star montante de 25 ans, et les gourous de cette scène, Thee Oh Sees, menés par le charismatique guitariste John Dwyer, qui est aussi le fondateur du label Castle Face Records, qui héberge l'immense majorité des groupes de garage de la ville. Inutile de dire que voir Thee Oh Sees ou Ty Segall à un prix modéré à quelques minutes de chez moi était de l'ordre de l'impensable. Et pourtant...

 

Pourtant Thee Oh Sees est venu avant-hier poser ses valises au Temps Machine à Joué-Les-Tours dans la banlieue de Tours pour un concert qui devait rester dans les annales. Accompagnés d'Enablers et d'un autre groupe du label In The Red Records, The Intelligence, les Thee Oh Sees avaient pour mission de littéralement dynamiter la salle, sous peine de faillir à leur excellente réputation scénique. Et à l'engouement que leur musique suscite chez votre humble serviteur.

 

C'est Enablers qui démarre le bal dans le club du Temps Machine. Le duo américain, formé d'un chanteur/hurleur/poète et d'un guitariste électrique, dégage une aura particulièrement étrange... D'ailleurs, je dois bien avouer que je n'ai absolument rien compris à ce concert. Les hurlements du chanteur, complètement en transe (et probablement très chargé) semblaient n'avoir aucun rapport avec l'ambiance de la guitare et l'ensemble sonnait particulièrement minimal et assez cacophonique finalement... Il a fallu attendre les quatre derniers morceaux où un batteur présent dans le public est monté sur scène pour qu'enfin l'ambiance décolle un peu... Sans pour autant me convaincre. Même l'ajout de deux guitaristes supplémentaires sur les deux derniers morceaux (le groupe comptant trois guitares, une batterie et un chanteur au final), s'il apportait indéniablement une ambiance psyché plus plaisante, n'a pas suffi à me convaincre. Non vraiment, ce concert devait être trop extrême et cérébral pour votre humble serviteur...

 

La suite de la soirée se passait dans la grande salle du Temps Machine, d'une taille bien plus adaptée pour recevoir les deux groupes de San Francisco. C'est le quatuor The Intelligence qui a ouvert le feu en premier. Signé sur In The Red Records, le groupe mené par Lars Finberg, chanteur/guitariste tiré à quatre épingles ressemblant à Tintin (et portant une sangle de guitare au motif du drapeau français) et qui s'avère être aussi le deuxième batteur de Thee Oh Sees est bien conforme à ce qu'on peut attendre d'un groupe de ce label. Le son est du pur garage rock, mâtiné d'un peu de pop et de surf rock (l'influence d'un groupe comme les Thrashmen me semble indéniable). Les morceaux ne dépassent pas souvent trois minutes au compteur et sont joués pied au plancher dans une urgence qui se communique vite à l'ensemble de la salle. L'ambiance monte vite au gré de la succession de morceaux parfois très lo-fi, malgré un coté nettement plus pop que certains de leurs comparses de label (Thee Oh Sees en tête). C'est efficace, carré, certains titres trouvant parfois une touche un peu plus psychédélique et durant un peu plus longtemps en bouche, et clairement, ce groupe sait y faire. Entre garage, pop, surf-rock, ce groupe au son légèrement sale livre une prestation impeccable. Une première partie de choix pour la bande de John Dwyer. L'album Fake Surfers, très psychédélique et lo-fi, est tout à fait recommandable même s'il ne correspond qu'assez peu à la prestation que j'ai vu.

 

C'est finalement Thee Oh Sees qui prend le relai après la bière réglementaire dans une salle déjà bien chauffée par The Intelligence. Les quatre musiciens se placent très près du bord de la scène (avec la batterie placée au milieu du groupe, au premier rang, ce qui est assez rare comme configuration), et se lance d'entrée de jeu dans un set furieux avec The Dream, un des meilleurs morceaux de leur album référence, Carrion Crawler/The Dream. Si la salle avait déjà été bien amadouée par The Intelligence, ce premier morceau des Oh Sees va littéralement la chauffer à blanc. C'est bien simple, dès les premiers accords du morceau, tous les premiers rangs se sont lancés dans une danse frénétique, pogotant et slamant à qui mieux, comme si une immense transe frénétique commençait. C'était le cas quelque part.

 

Le charisme de John Dwyer, grand californien blond habillé comme un sac et tatoué de partout est évident. Son chant strident avec beaucoup d'onomatopées, bien aidé par le contrepoids du chant de la claviériste Brigid Dawson rend le concert d'emblée complètement taré. Ce chant dingue, entre glapissements, chœurs enfantins et cris instaure une ambiance de folie complètement communicative, qui rappelle d'ailleurs un peu les Cramps. Le jeu frénétique du batteur et les riffs épileptiques des guitares (dont une sonne très bas, remplaçant ainsi la basse), tranchants comme des rasoirs font le reste. On a affaire à un gang de grands malades. Et ce soir, personne ne devait ressortir sain d'esprit de ce concert. On remerciera d'ailleurs le Temps Machine d'avoir laissé le groupe jouer à un volume sonore très appréciable (c'est à dire fort pour ce genre de musique).

 

Passer le préliminaire épileptique et métallique du premier morceau (une putain de claque dans la gueule de 8 minutes environ), les Oh Sees ne vont pas lâcher le morceau. Chaque (long) morceau est plus déjanté, psychédélique et tranchant que le précédent. Le public ne s'y trompe d'ailleurs pas, et chaque moreau est accueilli par des cris, de gentils pogos et des danses plus frénétiques les unes que les autres. Il est strictement impossible biologiquement de ne pas sentir son corps réagir à cette musique. Le public va d'ailleurs improviser pendant un morceau une chenille (ça doit être la french touch) et même une pyramide humaine qui fera bien marrer le batteur... Beaucoup de morceaux de Floating Coffin, leur dernier très bon disque en date (sachant que ce groupe sort au strict minimum un disque par an, parfois deux), sont incorporés dans la setlist, notamment I Come From The Mountain, Minotaur, Toe Cutter et dans mon souvenir Strawberries 1+2 (je ne mettrai pas ma main à couper sur ce dernier ceci dit). Et tous ces titres sont brillants et se mélangent très bien avec quelques titres plus anciens (enfin qui ont deux ans) comme ceux issus du génial Carrion Crawler/The Dream, tels que Contraption/Soul Desert.

 

La frénésie du concert est encore renforcée lorsque le chanteur de The Intelligence, Lars Finberg vient installer une deuxième batterie pour accompagner le groupe pour environ la moitié du show. Deux batteries, deux guitares affutées comme des rasoirs, une percussionniste/claviériste/chanteuse et la fièvre n'en finissait plus de monter.

 

Non vraiment, même si je n'ai malheureusement pas trouvé de setlist sur le net, ce show avait vraiment tout d'un immense concert (peut-être le concert de l'année pour moi? Pour le moment, c'est sur). Aucun temps mort là dedans, une musique complètement folle et idiote et donc complètement jouissive, des musiciens qui sont visiblement contents d'être là (Dwyer semblait bien tripper à dire « merci beaucoup » en français), que demander de plus? Rien. En 2013 le garage rock se porte définitivement bien. Et que ce soit sur scène ou sur disque (l'achat de Floatting Coffin en vinyle à la fin du concert me le confirme), les groupes de San Francisco sont définitivement les plus excitants du moment avec Tame Impala, Jim Jones Revue, Jacco Gardner ou Pond. J'attends le nouveau Ty Segall avec d'autant plus d'impatience, sachant que le bonhomme sera avec White Fence et Thee Oh Sees à Paris en juillet. Ce sera peut-être définitivement le concert de l'année, mais pour le moment, je me contenterai de remercier le Temps machine d'avoir programmé Thee Oh Sees à coté de chez moi. Merci pour la claque, je reviendrai.

 

Moi-même.

 

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22 février 2013 5 22 /02 /février /2013 00:28

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Traditionnellement, la France et le rock ne font pas bon ménage. A quelques rares et magnifiques exceptions près, notre pays n'a jamais été un grand exportateur de rock. Cependant, en ces temps où le redressement productif est à la mode, le port de la marinière et l'écoute d'un rock made in France qui aurait sur s'exporter redeviennent compatibles. Notamment car il existe un domaine dans lequel les français excellent et qui fait régulièrement chavirer les cœurs anglo-saxons : l'électro-pop. De  Air - Moon Safari (1998) à Phoenix, certains groupes ou artistes français ont su imposer outre-atlantique une vision de la musique pop-rock, légèrement électronique, moderne, racée et élégante. Historiquement, on peut même remonter plus loin pour trouver un ancêtre à cette démarche. Avec  Serge Gainsbourg - Histoire de Melody Nelson (1971) comme référence consciente ou non à cette façon de voir la musique. Il suffit de prononcer le nom de Gainsbourg devant un anglais pour voir une lueur émerveillée apparaître dans son regard. Ah Melody... Coïncidence troublante. La nouvelle étoile montante de l'électro-pop à la française s'appelle justement Melody. Melody's Echo Chamber. Son premier album éponyme, co-écrit et produit avec le génie australien Kevin Parker (qui est le cerveau de Tame Impala et joue aussi dans l'excellent Pond), a été une des sensations de la fin de l'année dernière. Si bien que lorsque j'ai vu qu'elle posait ses valises le temps d'un concert au Temps Machine à Tours, j'ai sauté sur l'aubaine. A 10€ le concert, j'aurai eu tort de m'en priver. Et je voulais voir si cette chambre d'écho de Melody parvenait à être aussi charmante sur scène que sur disque, malgré l'absence de Kevin Parker à la production et aux instruments.

 

Saluons tout d'abord le choix de programmation du Temps Machine, qui en faisant venir Aline (ex Young-Michelin) et Melody's Echo Chamber mercredi soir a rencontré un joli succès. Prévu initialement dans le club d'environ 200 places, le concert a finalement eu lieu dans la grande salle de 600 places au deux tiers pleine. Après tout, même votre humble serviteur, râleur impénitent sur la programmation « pointue » du Temps Machine était très content d'être là mercredi soir. De quoi saluer ces efforts sur la programmation, puisque ces derniers temps, de Lou Douillon à Melody's Echo Chamber en passant par la soirée THACKT dans laquelle ont été programmés trois groupes tourangeaux et où le club était plein, je suis de plus en plus content d'aller au Temps Machine.

 

Pourtant, je dois bien avouer que je n'ai pas spécialement adoré Aline, quintet de pop en français qui rencontre un certain succès en ce moment. Composé d'un guitariste soliste, d'un guitariste et chanteur, d'un bassiste, d'un joueur de synthé (et de tambourin!), et d'un batteur, Aline joue des chansons de pop-rock très influencées par les années 80, The Smiths ou The Cure en tête. Sauf qu'ils chantent en français (ce qui du coup renvoie peut-être à d'autres groupes ou artistes que je ne connais pas, comme le Etienne Daho des débuts). Résolument enjouées et dansantes, leurs mélodies chantées en français et jouées pied au plancher sont efficaces et semblent marcher sur le public du Temps Machine. Malheureusement, si je reconnais bien volontiers que leurs morceaux sont bien ficelés, bien composés et interprétés, la musique des cinq garçons d'Aline me laisse assez froid. Le son des années 80, très largement copié ici notamment avec le synthé et le son de batterie bourré de réverbération, est en effet un sacré allergène sur moi. De même, je ne suis globalement pas un grand fan de musique « naïve » comme celle de ce quintet (bon je n'écoute pas que Joy Division ou les Doors non plus hein!), et j'aurai probablement préféré qu'il chante en anglais. La comparaison avec les Smiths (auxquels le groupe ressemble vraiment parfois, ce qui est quand même super cool) marque d'autant plus ma préférence pour l'anglais. Le chanteur chante un peu de façon maniérée comme Morrissey, mais le français ne s'y prête pas très bien je trouve... Bon après, je suppose que ce choix du groupe est une composante essentielle de leur identité et fait en partie leur charme sur ceux qui l'ont apprécié. Il y a néanmoins quelques chansons que j'ai trouvé très agréables, et leur set d'une cinquantaine de minutes était suffisamment bien fait pour que je reste jusqu'au bout et que je passe un bon moment, malgré mon aversion pour ce type de musique. C'est dire l'efficacité de ce groupe.

 

Le temps d'une cigarette réglementaire (mais pas de bière, voiture oblige), et Melody investit les lieux, accompagnée de son groupe de scène. Deux guitaristes (un se chargeant aussi du synthé à certains moments du concert en plus de Melody elle-même), un bassiste et un batteur ne sont en effet pas de trop pour recréer sur scène l'ambiance éthérée et rêveuse de Melody's Echo Chamber. Le set démarre avec le premier (et excellent) morceau du disque, I Follow You et séduit d'emblée. L'atmosphère rêveuse et cotonneuse du disque, cette alliance étrange entre grosses guitares et synthés aériens et ces mélodies bourrées d'effets psychédéliques concoctés avec Kevin Parker ressortent très bien sur scène. La qualité du son de la grande salle du Temps Machine et le boulot de l'ingénieur du son sont à saluer. Et la qualité du chant de Melody aussi... Car j'avoue, c'est ce qui m'avait le plus gêné les premières fois que j'ai écouté le disque. Le chant est assez aigu, parfois un peu enfantin, et je déteste en général ce genre de voix. Mais finalement, à force d'écoutes, j'ai du finir par l'apprivoiser, et j'imagine assez mal maintenant un autre chant sur ce disque. Et voir Melody's Echo Chamber sur scène n'a fait que renforcer ce sentiment. Ce disque à l'atmosphère planant doit être bâti autour de cette voix fragile et un peu aiguë, seule guide au milieu de tous ces effets psychédéliques.

 

Le groupe enchaine ensuite les morceaux dans un ordre assez proche de celui de l'album (I Follow You s'enchainant si mes souvenirs sont bons avec You Won't Be Missing That Part of Me, Some Time Alone, Alone et Bisou Magique) et recrée à merveille cette ambiance rêveuse qui le caractérise. L'osmose entre les musiciens, notamment le batteur et le bassiste, transporte aisément le public dans un monde étrange où la guitare et le synthé s'entremêlent dans une valse fascinante. Un titre comme Bisou Magique, malgré ses paroles niaises, est une vraie friandise douce et savoureuse, presque aussi évocateur qu'un acide. Et l'interprétation sans faille du groupe en fait un vrai petit bijou.

 

La deuxième partie du disque étant un peu plus faible, on pouvait craindre un léger essoufflement du concert sur sa fin. En fait, il n'en a rien été. Notamment grâce au talent des musiciens qui se sont lancés à plusieurs reprises dans des gros jam psychédéliques (dont un a bien dû durer une dizaine de minutes) du plus bel effet. Même si c'est assez évident et facile de dire ça, le groupe évoquait beaucoup à cet instant les penchants les plus rock des disques de Tame Impala. Pour mon plus grand bonheur. Car cette montée en puissance du groupe qui est devenu de plus en plus rock et psychédélique au fil du concert fait qu'on ne s'ennuie donc à aucun moment. C'est un sans-faute. Le set durant lequel tout l'album ou presque est joué (je ne ne crois pas que Be Proud Of Your Kids ait été jouée) est bref (une cinquantaine de minutes), mais d'une efficacité redoutable. Melody s'excusera d'ailleurs la fin du set pour sa brièveté, mais comme elle l'a justement fait remarquer, elle n'a qu'un seul album à son actif. Vivement le prochain disque alors! Et vu la qualité du concert, elle est amplement excusée pour sa brièveté et elle est la bienvenue pour revenir quand elle veut à Tours.

Moi-même.

 

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15 février 2013 5 15 /02 /février /2013 15:16

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/thumb/d/d8/The_Rolling_Stones_-_Goats_Head_Soup.jpg/220px-The_Rolling_Stones_-_Goats_Head_Soup.jpg

 

Tracks : Dancing With Mr. D ; 100 Years Ago ; Coming Down Again ; Doo Doo Doo Doo Doo (Heartbreaker) ; Angie ; Silver Train ; Hide Your Love Winter ; Can You Hear The Music ; Star Star

 

En 1972, les Stones sont au fait de leur gloire. Seigneurs et saigneurs du rock, qui sur scène ont finalement assez peu de concurrents, notamment grâce à leur guitariste prodige Mick Taylor. Led Zeppelin et les Who semblent être les seuls capables de disputer aux Rolling Stones leur couronne de « groupe le plus dangereux de la planète » que leur a décernée Richard Nixon. Mais malheureusement, le rock n’roll circus des Stones a un prix. Drogues, groupies, destructions de chambres d’hôtels, exils fiscaux… Partout où ils passent, les Stones deviennent personna non grata. La France où ils étaient venus fuir le fisc anglais (et accessoirement enregistrer un de leurs chefs d’œuvres, Exile On Main Street) poussent Keith Richards et sa cour de junkies vers la sortie à la fin de l’année 1972. Il faut que les Stones s’exilent à nouveau, alors même que la liste d’éventuels pays hôtes pour le quintet se rétrécit. C’est finalement dans une ile des Caraïbes que le monde découvre en ce début d’années 70 que les Stones vont poser leurs valises : la Jamaïque. Bob Marley & The Wailers sont alors en pleine gloire et viennent de publier leurs premiers albums à succès mondial, Catch A Fire et Burnin’. Accompagnés pour la dernière fois de leur producteur Jimmy Miller qui a produit leurs quatre albums précédents, c’est donc entourés de la culture rastafari que les Stones décident de donner un successeur au mal-aimé (à l’époque) Exile On Main Street et enregistrent Goats Head Soup. Si on se doute que l’amour des rastas pour la drogue a su trouver un écho particulier chez les Stones, la Jamaïque les a-t-elle inspiré pour leur 11ème album studio anglais (13ème américain) ?

 

On dit souvent que Goats Head Soup (quelle pochette hideuse et quel nom pourri au passage) marque le début du déclin des Stones après leur période dorée de 1968 à 1972. C’est en grande partie vrai. Le train de vie des Stones et le fait qu’ils aient sortis au moins cinq chefs d’œuvres en six ans (Aftermath ;  The Rolling Stones - Beggars Banquet (1968) ; Let It Bleed ;  The Rolling Stones - Sticky Fingers (1971) ; Exile On Main Street) et incendiés les scènes du monde entier (Get Yer Ya Ya’s Out) finit par se payer. Et c’est sur cet album enregistré en Jamaïque que les Stones faiblissent pour la première fois, malgré la présence ici de bons titres, notamment un de leurs plus grands succès populaires, Angie.

 

Cependant même s’il est vrai que Goats Head Soup est écrasé par ses prédécesseurs (toutes les bonnes choses ont une fin), il n’en est pas pour autant un mauvais album. Pour plusieurs raisons. La première étant que les morceaux sont globalement bons. L’ouverture Dancing With Mr. D (où les Stones convoquent le fameux Mr. D qui fit signer un pacte à Robert Johnson ?) est par exemple un titre qui se tient très bien, efficace et juste à défaut d’être génial. Coming Down Again est un slow qui même s’il s’éternise (5min52) est suffisamment langoureux et doux pour marcher. Quant à Angie, qui conclut la première face, c’est un méga tube qui a du illuminer bien des soirées durant les années 70. Voir les Stones chanter une telle chanson d’amour à la guitare acoustique avec un piano et quelques cordes a d’ailleurs quelque chose de très ironique (ce n’est pas eux qui chantaient Under My Thumb quelques années auparavant ?), mais franchement Mick est une d’une émotion rare là-dessus et la paire de guitaristes Taylor/Richards joue avec un feeling et une justesse parfaites.

 

De même Silver Train qui ouvre la face B est un blues très sympathique, peut-être un des meilleurs morceaux du disque. On est loin de Midnight Rambler, mais ça fonctionne bien même si j’aurais aimé une production plus caverneuse comme sur  The Rolling Stones - Let It Bleed (1969) pour mieux faire ressortir ce morceau. De même Star Star, qui reprend le fameux riff de Chuck Berry, malgré ses paroles complètement débiles (I’m a Starfucker, starfucker…) est dansant, efficace et drôle.

 

Enfin malgré le caractère assez moyen du reste des morceaux, il y a une deuxième raison pour écouter Goats Head Soup : Mick Taylor. Car à nouveau, le guitariste prodige des Stones insuffle ici un feeling blues d’une classe incroyable dans ses soli. Chacunes de ses interventions, même s’il a fait mieux sur les albums précédents et qu’il fera mieux sur le suivant (The Rolling Stones - It's Only Rock 'n' Roll (1974)) permet à un morceau assez banal de devenir bon. 100 Years Ago ou Can You Hear The Music sont en effet grandement enrichis par le guitariste et c’est valable pour l’ensemble du disque. De quoi regretter d’autant plus amèrement son départ l’année suivante…

 

Indéniablement, Goats Head Soup n’est donc pas à la hauteur des albums qui le précédent dans la discographie des Stones. La Jamaïque a nettement moins inspirée les Stones que le sud de la France l’année précédente. Mais ce n’est pas pour autant un mauvais album. Tout juste un album de bonne tenue, avec de bons morceaux (Angie ; Dancing With Mr. D ; 100 Years Ago ; Star Star), beaucoup d’autres très corrects et un groupe sur de lui qui assure le minimum syndical (les deux Mick étant excellents dans leurs rôles respectifs). Il ya mieux avant, mieux après (It’s Only Rock n’roll ; Tattoo You ; A Bigger Band) dans la discographie des Rolling Stones, mais un amateur du groupe prendra du plaisir à écouter ce disque, surtout sa face A.

 

13/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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31 janvier 2013 4 31 /01 /janvier /2013 21:06

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/5/54/Kasabian-album.jpg

 

Tracks : Club Foot ; Processed Beats ; Reason Is Treason ; I.D. ; Orange ; L.S.F. (Lost Souls Forever) ; Running Battle ; Test Transmission ; Pinch Roller ; Cutt Off ; Butcher Blues ; Ovary Stripe ; U Boat

 

Tout comme sa voisine Liverpool, Manchester est une ville partageant deux passions, voire deux religions : le football et le rock. La domination sans partage de Manchester United sur le championnat anglais et européen depuis 20 ans et l’émergence de Manchester City n’ont d’égal que l’importance des groupes mancuniens dans l’histoire du rock anglais. The Hollies et les Herman’s Hermits dans les années 60, Joy Division ou les Buzzcocks à la fin des années 70, New Order, The Stone Roses ou The Smiths dans les années 80, Oasis dans les années 90, autant de groupes majeurs de l’histoire du rock qui sont nés dans les quartiers de cette grande ville (dés)industrialisée du nord de l’Angleterre. Pourtant en 2004, le rock mancunien n’est pas spécialement à son apogée. Oasis est au creux de la vague et l’électro-rock qui s’écoutait dix ans plus tôt les yeux gorgés d’ecstasy ne fait plus recette, ringardisé par le punk nerveux des londoniens des Libertines. La situation est néanmoins bien meilleure en football avec trois titres en quatre ans pour Manchester United en championnat. De quoi inspirer une nouvelle génération de musiciens qui dans les pubs de la ville attendent leur tour, prêts à succéder à Oasis. C’est ainsi que parait le 17 mai 2004 le single Club Foot, venant d’un nouveau groupe de rock de la ville nommé Kasabian. Si leur premier single Reason Is Treason n’avait pas marché, Club Foot va littéralement cartonner, plaçant la sortie du premier album du groupe en septembre (sobrement intitulé Kasabian) sous les meilleurs auspices. Avec une recette simple : foot+rock+électro, combinaison gagnante pour beaucoup de groupes de la ville depuis 20 ans.

 

Le disque démarre de la meilleure des manières avec ce véritable hymne de stade qu’est Club Foot. D’emblée, Kasabian impose sa formule, remettant au gout du jour les recettes du rock prolétaire mancunien : énorme ligne de basse, nappes de synthé et guitares surfs dignes de la scène Madchester (New Order ; Stone Roses), chant puissant légèrement déformé et chœurs planants et entêtants. C’est grandiloquent, mais d’une efficacité redoutable notamment grâce à cette ligne de basse monstrueuse et à cette ambiance enfumée. Consécration ultime pour Club Foot, le titre servira à Sky Sports pour ouvrir tous les matchs de Premier League. Un véritable hymne à la gloire du rock et du foot on vous dit.

 

Malheureusement, si Processed Beats est aussi un morceau très porté sur les nappes de synthé et les petits bidouillages électroniques, la formule prend moins bien. L’ambiance psychédélique et nonchalante est sympathique, mais il y a néanmoins assez peu à se mettre sous la dent ici.

 

Reason Is Treason, avec sa ligne de basse imposante pourrait faire croire que le titre prend la même direction que Club Foot, mais malheureusement, si cette ligne de basse est particulièrement plaisante, le titre est trop répétitif pour être convaincant de bout en bout. Le pont électronique au milieu du titre est assez téléphoné. Dommage…

 

Et malheureusement, ce n’est pas le très psychédélique I.D. avec son ambiance très planante et son beat très lourd qui me ramène vers le disque. Le titre n’est pas désagréable, soyons clair, mais cette ambiance un peu orientale qu’il cherche à distiller n’est pas super convaincante. Disons que c’est très en dessous de ce que faisait Radiohead à la même époque ou de ce que fera Kasabian sur les albums suivants. Le très court Orange, qui semble tout droit sorti de la BO d’Orange Mécanique est quant à lui complètement inutile.

 

Néanmoins le groupe se relance assez efficacement avec l’autre grand single de ce premier album : L.S.F. (Lost Souls Forever). Très électro, ce morceau est porté par des chœurs très entêtants (dont le groupe abuse sur ce disque, mais c’est ici à raison) et un chant puissant et crâneur de Tom Meighan qui en font un morceau électro-rock extrêmement efficace. Moins que Club Foot, mais supérieur au reste du disque.

 

Car le très calme Running Battle qui suit retourne à cette bouillie électro-rock qui caractérise les premiers morceaux et qui sans être désagréable peine à vraiment intéresser. En plus la fin donne l’impression que le morceau a été coupé brutalement et c’est vraiment quelque chose que je déteste au plus haut point.

 

Test Transmission mérite par contre d’être signalé, car d’une part c’est le premier titre chanté par le guitariste Sergio Pizzorno (qui est devenu depuis le leader du groupe) et d’autre part il montre des influences psychédéliques qui évoquent clairement plus les Beatles de l’époque Relvover que les Stones Roses. Bien sur, l’électro est encore présent dans cette chanson qui comporte beaucoup de synthés, mais les guitares électriques et les différents effets sur leur son rappellent clairement le psychédélisme des années 60, pour notre plus grand plaisir. L’influence des Beatles ira d’ailleurs crescendo sur Kasabian par la suite…

 

Passons rapidement sur la fin du disque qui n’est pas très brillante, que ce soit la courte et inutile Pinch Roller (qui avec Orange et Ovary Stripe avaient été virées sur la version américaine de l’album, je salue ce choix) ou la très rap/funk Cutt Off qui a le mérite d’essayer d’autres choses mais qui au final ne marche pas vraiment et qui a en plus un pont de synthés assez laid. De même Butcher Blues est bien trop répétitive pour être vraiment convaincante et le morceau instrumental Ovary Stripe peine à vraiment me toucher ou me faire planer. Trop électronique pour moi je suppose.

 

Enfin le final U-Boat (avec en morceau caché un remix de Reason Is Treason) me laisse lui aussi de marbre, concluant ce disque qui avait pourtant bien commencé sur une déception.

 

Pourtant j’adore Kasabian. Mais je dois bien admettre que la direction musicale choisie pour ce premier album ne m’emballe que modérément. Cet électro-rock de stade peine en effet à m’intéresser et à part les méga tubes Club Foot et L.S.F., je ne prends pas vraiment un plaisir fou à écouter ce disque. Le principal compositeur et guitariste Christopher Karloff quittera d’ailleurs le groupe après ce disque, laissant la place à Sergio Pizzorno qui orientera le groupe vers un style plus pop-rock qui lui permettra d’écrire les deux derniers et excellents albums du groupe :  Kasabian - West Ryder Pauper Lunatic Asylum (2009) et  Kasabian - Velociraptor! (2011). Et à l’ombre de ces deux disques, ce premier opus éponyme fait vraiment pale figure aujourd’hui, même s’il est l’acte de naissance d’un immense groupe.

 

11/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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20 janvier 2013 7 20 /01 /janvier /2013 14:39

 

Tracks : It's Gotta Be About Me ; Never Let You Go ; 7 Times Around The Sun ; Where Da Money Go ? ; Chain Gang ; In And Out Of Harm's Way ; Catastrophe ; Eagle Eye Ball ; Midnight Oceans & The Savage Heart

 

 

Depuis maintenant quatre ans, les fans de Rock & Roll le savent, le genre est définitivement d'actualité. Notamment grâce à un gang londonien, constitué de gentlemen aussi féroces sur scène qu'ils sont charmants en dehors, The Jim Jones Revue. En quatre ans, ce quintet de rock & roll a prêché la bonne parole sur toutes les scènes d’Europe, ravivant avec une foi inébranlable l’incendie allumé par Elvis, Little Richard, Jerry Lee Lewis et Chuck Berry il y a cinquante ans. Pourtant si leurs prestations scéniques enflammées et impeccables ont fait la renommée de ces quadragénaires londoniens, leurs premiers disques peinaient à convaincre complètement le public. Le coté très garage du groupe, sa production très sale héritée des Stooges et du MC5 et l’impossibilité de retranscrire dans la cire l’urgence de ses shows rendaient les disques de Jim Jones Revue légèrement frustrants. Cependant, ses singles (Princess & The Frog ; Rock & Roll Psychosis ; Burning Your House Down ; Elemental), intelligemment réunis dans la compilation The Jim Jones Revue - Here To Save Your Soul (2009), montraient que le gang peut aussi frapper très fort chez vous, sur une platine. Il manquait juste ce « petit truc » qui rend un disque attachant de bout en bout et que n’avaient pas leurs deux premiers albums, malgré leur qualité intrinsèque. Et si ce « petit plus » était finalement venu d’une séparation ? Car suite au départ du talentueux pianiste Elliot Mortimer, le groupe a recruté un nouveau membre, le pianiste franco-anglais Henri Herbert. De quoi mettre « un nouveau moteur dans la voiture » selon Jim Jones. De quoi prendre une nouvelle voie (pied au plancher) pour le groupe sur son troisième album, The Savage Heart, publié en 2012 ?

 

Placé en ouverture du disque, le premier single It's Gotta Be About Me tranche d'emblée avec ses prédécesseurs. Les guitares sont bien là, puissantes et lourdes. Mais justement il se dégage de ce morceau une impression de lourdeur plus proche de Led Zeppelin que des références punk habituelles du groupe. Le fait que le morceau ne déboule pas directement pied au plancher, tous les voyants dans le rouge n'y est pas étranger. Le fait que Jim Jones chante d'une voix rauque et éraillée mais sans hurler non plus. Et lorsqu'entre en scène le piano d'Herbert, on remarque qu'un groove puissant et tenace s'installe. Le morceau, très bien construit, dégage une ambiance lancinante et poisseuse qui devient vite addictive. Impression qui n'est pas près de lâcher l'auditeur.

 

Car ce disque dégage indéniablement un truc. La suite avec Never Let You Go nous emmène en effet dans une ambiance plus western avec un piano rappelant un saloon, en version plus électrique et violente. 7 Times Around The Sun enfonce le clou et nous emmène clairement vers le sud des États-Unis. Du coté des studios Sun de Memphis? Le titre groove incroyablement (notamment l'alliance piano et batterie), et les chœurs (assurés par le groupe) qui le mènent renvoient vers le gospel et le blues originels. Sombre, rythmé, poisseux, ces morceaux dégagent un charme sudiste du meilleur effet. Un charme vénéneux comme les bayous de Louisiane où est née toute cette musique...

 

Et si Where Da Money Go ? aux relents très prolétaires est un morceau plus classique, renouant un peu plus avec le caractère garage rock du groupe, on ne peut que saluer là aussi l'efficacité du single, la puissance du chant hurlé et rocailleux et des guitares électriques accrocheuses. Une petite parenthèse très électrique très appréciable.

 

Car Chain Gang, le long In And Out Of Harm's Way (quasiment 6 minutes, c'est très rare chez Jim Jones Revue), Catastrophe et Eagle Ball continuent de nous faire voyager dans une terre plus marquée par le blues et le boogie que par le rock n roll furieux de Jerry Lee Lewis et du MC5. L'atmosphère est lourde, poisseuse, les guitares menaçantes. L'alliance entre la basse de Gavin Jay et les claviers d'Henri Herbert donne ici des merveilles de groove. Et Jim Jones, plus calme que d'habitude au chant, n'en est que plus charismatique et menaçant qu'habituellement, planant au dessus de ce ténébreux orage avec une présence chamanique. Les influences du Gun Club n'ont peut-être jamais été si proches pour le groupe (The Gun Club - Miami (1982)).

 

Un groupe qui nous surprend définitivement de bout en bout, puisque le dernier morceau de la galette, Midnight Oceanx & The Savage Heart est une ballade! Oui, vous avez bien lu, ce groupe livre ici sa première ballade piano/voix. Et si le résultat surprend initialement (surtout vu la teinte sombre et blues du reste du disque), il faut bien l'avouer : Jim a une superbe voix avec laquelle il peut aussi crooner et Henri transforme définitivement en or tout piano qu'il touche.

 

Ainsi il y a bien un nouveau moteur dans la voiture. Même si la carrosserie reste indéniablement la même. Jim Jones Revue a réussi son pari avec son troisième disque. A la fois familier et novateur, rétro et moderne, ce disque est le plus profond de toutes leurs livraisons. Les morceaux sont bien écrits, rythmés, puissants et tenaces, et le disque s'écoute comme un tout très appréciable, là où les précédents privilégiaient plutôt les singles et pouvaient être irréguliers sur la longueur. Même si on sent que The Jim Jones Revue en a encore sous la pédale, The Savage Heart est un disque sauvage et beau comme le sud américain.

 

16/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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