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25 juin 2019 2 25 /06 /juin /2019 20:03

 

Tracks : Everlasting Light ; Next Girl ; Tighten Up ; Howlin’ For You ; She’s Long Gone ; Black Mud ; The Only One ; Too Afraid To Love You ; Ten Cent Pistol ; Sinister Kid ; The Go Getter ; I’m Not The One ; Unknown Brother ; Never Give You Up ; These Days

 

Avec la fin de l’année 2019 qui approche, les classements de fin d’année vont bien évidemment fleurir. Ainsi que les classements des meilleurs albums de la décennie 2010-2019. Si ce genre d’exercice reste toujours aussi subjectif et particulièrement arbitraire (donc amusant), on peut largement parier sur le fait que les Black Keys seront -entre autres- salués comme faisant partie des artistes importants de ces dix dernières années.

 

Pourtant le duo originaire d’Akron dans l’Ohio a débuté sa carrière lors de la décennie précédente avec son premier album, The Big Come Up en 2002. Mais c’est réellement en 2010 et après que Dan Auerbach (chant, guitare, basse) et Patrick Carney (batterie et percussions) ont atteint le -très- grand public. C’est même en 2010 que leur renommée a littéralement explosé avec leur sixième album, Brothers. El Camino, disque suivant publié un an plus tard, porté par le giga hit Lonely Boy, ne fera qu’enfoncer le clou.

 

A l’heure du bilan décennal, se re-pencher sur Brothers (et El Camino une prochaine fois ?) parait donc une étape obligée. Ou a minima, une étape intéressante. Qu’est-ce qui fait de ce diptyque un quasi incontournable de ces dix dernières années ? Et qu’est-ce qui a changé entre les cinq premiers albums des Black Keys et ces deux-là ?

Beaucoup de choses, clairement, au (possible) désespoir des fans des Black Keys de la première heure. On retrouve sur cet album une approche, une patine, un son et des mélodies qu’on peut qualifier de beaucoup plus « pops ». Comprenez par là que les morceaux sont un peu éloignés du blues rock garage sale et référencé des débuts. Il reste bien entendu certaines références évidentes. En premier lieu, la pochette qui fait un gros clin d’oeil à The Howlin’ Wolf Album de 1969, album controversé du géant du blues du même nom. En deuxième lieu, la reprise de Never Give You Up, morceau de soul paru pour la première fois en 1968, vient rappeler dans quel terreau le duo plonge ses racines. C’est d’ailleurs un des meilleurs moments du disque. Et clairement depuis leurs débuts, les Black Keys sont des habitués des reprises soul/blues/rock, qui émaillent leurs précédents efforts avec plus ou moins de brio. Ils avaient même réalisé en 2006 un EP entier de reprises, Chulahoma: The Songs of Junior Kimbrough, bel hommage au bluesman du même nom.

 

Malgré ça, Brothers tranche assez nettement avec le blues rock crasseux de ses prédécesseurs. Notamment à cause de trois choses : la production de Danger Mouse, les mélodies beaucoup plus accrocheuses des morceaux et enfin les clips.

 

La production est clairement l’argument numéro 1 en faveur de cet album. Bien que Danger Mouse officiait déjà sur l’album précédent des Black Keys, Attack & Release paru en 2008, c’est bien sur Brothers qu’il trouve une formule miracle pour le duo. Loin du son sale de leurs débuts. On peut le déplorer. On peut aussi saluer l’approche, qui fait ressortir au mieux les influences plus soul du groupe. Pour l’anecdote, c’est d’ailleurs aux Muscle Shoals Sound Studios, situés en Alabama (et qui virent notamment passer  Wilson Pickett, Otis Redding, Etta James, Percy Sledge, Aretha Franklin ou les Rolling Stones…), que l’album a été enregistré. Quelques sifflements sur Tighten Up, quelques vocalises basiques sur Howlin’ For You, tout en mettant moins en avant la guitare incandescente de Dan Auerbach donnent tout de suite une patine différente à cette galette. Les morceaux sont moins abrupts que leurs prédécesseurs, faisant aussi une plus grande place à la basse et aux claviers, renforçant le groove qu’ils dégagent. Et ils restent immédiatement en tête pour la plupart. Le duo ne s’y trompera d’ailleurs pas en reconduisant systématiquement Danger Mouse à la production de ses disques suivants, alors même que ce dernier enchaine les collaborations de haut rang depuis le début de sa carrière.

 

Petite parenthèse, je ne peux que vous conseiller par ailleurs l’écoute de Rome, son projet avec Daniele Luppi, Norah Jones et Jack White.

 

Bien sûr, une belle production ne suffit pas à faire un bon album. Et ce qui marque à l’écoute de Brothers, c’est à quel point les premiers morceaux sont accrocheurs et bons. Jusqu’à l’instrumental Black Mug, sixième piste du disque, c’est pour moi un sans-faute. Les tubes s’enchainent avec une aisance incroyable. C’est intelligent, très bien écrit, drôle et la plupart de ces morceaux restent quasi immédiatement en tête. De même, la fin du disque, plus orientée vers les morceaux calmes, est réussie. Le triptyque de morceaux qui concluent le disque (Unknown Brother ; Never Give You Up ; These Days) est particulièrement émouvant et beau.

Dernier élément qui a aidé à porter le disque, les clips. Les trois singles issus de cet album (Tighten Up ; Next Girl ; Howlin’ For You), en plus d’être trois excellents morceaux, ont aussi bénéficié de clips qui sont parmi les plus vus des Black Keys. Ils sont encore à l’heure actuelle tous les trois dans le top 7 des morceaux du groupe les plus vus sur youtube. Notamment grâce à l’humour (une des marques de fabrique du duo) qui s’en dégage. La bagarre d’enfants pour une petite fille qui fait écho à la bagarre des deux hommes pour une jeune femme dans le clip de Tighten Up est très drôle et j’avoue une passion sans bornes pour le clip de Next Girl avec la déambulation de cette marionnette de dinosaure au milieu de jolies filles… Le clip d’Howlin’ For You aurait presque pu quant à lui se retrouver au milieu du Diptyque Grindhouse de Tarantino et Rodriguez.

 

Cependant, une fois tous ces bons points soulevés, peut-on réellement parler de chef d’oeuvre à propos de Brothers? Ma réponse est non. Je considère qu’en effet, Brothers est un disque marquant des années 2010, pour tous les points soulevés précédemment. Mais j’ai cependant un gros reproche à lui faire. Le milieu du disque ne m’inspire rien. A part Ten Cent Pistol et son clavier cool (et son bon refrain), je n’aime aucun des morceaux entre Black Mud et Unknwon Brother. Ou plutôt, ce n’est pas que je ne les aime pas, mais c’est qu’ils ne me font rien. Je ne les retiens pas, n’y trouve pas grand chose de marquant et du coup je ressens une impression de vide lorsque je suis dans cette moitié du disque. Sentiment qui n’est d’ailleurs pas étranger au fait que c’est le plus long album de la carrière du duo, plus habitué à faire des disques autour de 35-40 minutes. De là à dire qu’une partie trop importante du disque est du remplissage? Pour moi, je crois que oui. Si l’album avait été plus court de 15-20 minutes, soit entre 3 et 5 morceaux en moins, je crois qu’il n’y aurait vraiment pas perdu au change.

 

C’est ce qui fait que je lui préfère son successeur El Camino. C’est ce qui fait aussi que bien que je considère cet album comme important pour les années 2010 et que je pense que tout amateur de rock de rock se doit de l’écouter au moins une fois, ce n’est pas pour moi un chef d’oeuvre. Juste un bon album de rock blues & soul. Ce qui est déjà pas mal.

 

14/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)

 

Moi-même.

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12 juin 2019 3 12 /06 /juin /2019 15:35

 

Tracks : You’re Gonna Miss Me ; Roller Coaster ; Splash 1 (Now I’m Home) ; Reverberation ; Don’t Fall Down ; Fire Engine ; Thru the Rhythm ; You Don’t Know ; Kingdom Of Heaven ; Monkey Island ; Tried to Hide

 

31 mai 2019. Quelques articles passent sur les sites spécialisés de rock, annonçant la mort de Roky Erickson. Le nom ne fait pas partie des plus connus de l’histoire du rock. Mais pour les fans de rock psychédélique, c’est le clap de fin d’une histoire aussi étrange et fascinante qu’un peu triste. L’histoire d’un diamant fou, talentueux mais malade, qui ressemble à celles d’autres météores qui illuminèrent le rock, psychédélique ou non. Arthur Lee, Syd Barret, Sky Saxon… Autant de noms associés à des groupes plus ou moins immenses et qui furent frappés par le destin.

L’histoire de Roky Erickson est trop longue pour être racontée en entier ici. Mais revenons sur le premier chapitre de cette histoire, un album fondateur sorti il y a plus de cinquante ans.

 

17 octobre 1966. Dans les bacs des disquaires apparait une pochette aussi belle qu’intrigante. Celle de The Psychedelic Sounds of The 13th Floor Elevators. Un disque qui sera pour l’anecdote le premier à mettre ainsi en avant le psychédélisme. Dans son titre même, ainsi que dans sa pochette et ses notes qui prônent plus ou moins clairement l’usage massif des drogues hallucinogènes pour ouvrir sa conscience.

 

Quelques années plus tôt, le LSD était en effet encore légal en Californie. Cette drogue -ainsi que le cannabis- était largement répandue dans certains quartiers de San-Francisco, entrainant quasiment la naissance d’une nouvelle contre culture, le mouvement hippie. Réduire ce mouvement uniquement à la drogue serait trompeur. Les implications littéraires (la Beat Génération précédente, Bukowski…), politiques (opposition à la guerre du Vietnam, naissance de l’écologie, prémices du féminisme…) et artistiques vont bien au-delà d’un simple trip de défoncés. Et en premier lieu, la musique en fut à jamais transformée.

The Psychedelic Sounds of the 13th Floor Elevators est donc le premier album à porter aussi fièrement l’étendard du rock psychédélique, un an avant la déferlante du Summer of love californien. Et en n’oubliant pas que le groupe vient du Texas et non de Californie. Mais au delà de ce rôle de précurseur, la musique composée par Roky Erickson (chant, guitare rythmique, harmonica), Stacy Sutherland (guitare soliste), John Ike Walton (batterie), Benny Thurman, Ronnie Leatherman (basse) et Tommy Hall (cruche électrique) est avant tout d’une originalité folle. Notamment grâce à la présence de ce dernier instrument, la cruche électrique. La dimension psychédélique de cet album doit beaucoup à ces sons étranges de doigts frottés sur cette cruche.

 

Dès le tonitruant morceau d’ouverture You’re Gonna Miss Me, trois choses frappent en effet l’auditeur. Le son des guitares est en premier lieu totalement étrange, très aigu, totalement fou. Même par rapport aux standards du garage rock de l’époque (les Seeds ou Love par exemple), ce son de guitare dénote et donne tout de suite au morceau une dimension plus… Psychédélique. En outre, la voix de Roky, faite de hurlements, d’onomatopées, assez haute perchée, est assez unique. D’emblée on y sent aussi une fêlure -une folie ?- qui donne à nouveau une dimension « psychédélique » à cette musique. Cette voix est-elle belle ? Au final, la réponse appartient à l’auditeur. Elle est en tout cas très expressive. En troisième lieu, cette fameuse cruche, étrange et hystérique, colore le morceau avec une teinte désordonnée mais remarquable. Comme pour mieux brouiller les pistes d’un album à venir qui sera définitivement unique.

 

Malheureusement la suite du disque n’est pas tout à fait à la hauteur de cet uppercut d’ouverture de 2min24. Elle demeure cependant extrêmement intéressante, mais un cran en dessous. Dès Roller Coaster, la furie garage se calme en effet pour un morceau nettement plus menaçant, marqué avant tout par les riffs de guitare. Le chant, de plus en plus dérangé, frappe néanmoins toujours l’auditeur, accentuant la perte de repères entamée avec You’re Gonna Miss Me. Splash 1 (Now I’m Home) est plus une ballade, plutôt belle au demeurant, même si ça ressemble plus à une balade aux cotés du lapin blanc de Lewis Caroll qu’à la promenade dominicale chez vos grands parents…

 

La suite du disque sera du même acabit, ressemblant à un trip halluciné entre moments calmes et menaçants (Kingdom Of Heaven), courts morceaux à l’énergie garage (Fire Engine qui ouvrait la face B du vinyle original) et quasi chansons d’amour (Don’t Fall Down avec sa remarquable ligne de basse introductive). La voix, le son des guitares et la vibration quasi tribale et mystique de la cruche liant allègrement le tout, malgré quelques faiblesses évidentes dans la composition des morceaux.

De quoi faire de The Psychedelic Sounds of the 13th Floor Elevators un indispensable ? Oui et non. Soyons clair : l’album est une pièce unique dans son genre. La première page de l’aventure du rock psychédélique en quelque sorte. Sa pochette, son titre et son morceau d’ouverture en font une référence absolue. De quoi justifier l’adoration dont font preuve certains groupes psychés actuels comme les Black Angels. Mais… Mais la suite du disque est un ton en dessous, tout en restant de (très) bonne facture. La composition de certains morceaux est assez sommaire et l’album en entier vaut surtout par le son assez unique qui s’en dégage. Mais il y a techniquement mieux ailleurs, même à l’époque. Le premier Jefferson Airplane, les deux albums des Seeds (le premier éponyme et A Web Of Sound), le premier Love, voire Easter Everywhere (le deuxième album de The 13th Floor Elevators) sont meilleurs à mon goût que ce disque.

 

Les amateurs de rock des années 60 et/ou de rock psychédélique doivent cependant poser une oreille sur cet album, pour la page d’histoire que Rocky Erickson et ses comparses ont ouvert. Ils y trouveront un disque et un groupe particulièrement attachant et totalement unique, même si l’écoute d’Easter Everywhere sera peut-être encore plus satisfaisante. Pour les autres, il faut au moins écouter le single You’re Gonna Miss Me, qui se trouve aussi sur l’indispensable compilation Nuggets: Original Artyfacts from the First Psychedelic Era 1965-1968 (publiée en 1972). Car rien que pour ce titre (mais pour bien plus encore), le nom de Rocky Erickson allait être gravé à jamais dans l’histoire du rock, psychédélique ou non.

13,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)

 

Moi-même.

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30 mai 2019 4 30 /05 /mai /2019 19:53
(Review Concert) Alice In Chains Olympia de Paris 28/05/19

Setlist : Bleed The Freak ; Check My Brain ; Again ; Never Fade ; Them Bones ; Dam That River ; Hollow ; Your Decision ; Rainier Fog ; Down In A Hole ; No Excuses ; Stone : Red Giant ; We Die Young ; Nutshell ; Angry Chair ; Man In The Box ; The One You Know ; Got Me Wrong ; Would ? ; Rooster

 

Peut-on parler de mythe lorsqu’on aborde Alice In Chains ? Peut-être. L’histoire débuta en tout cas en 1987 à Seattle, capitale de l’Etat de Washington, aux USA. Une capitale qui aura vu l’émergence et l’explosion du grunge, un des courants les plus importants de l’histoire du rock. Souvent, pour résumer le grunge, on évoque quatre grands groupes, par soucis de simplicité, ou par raccourci plus ou moins brutal. Nirvana. Pearl Jam. Soundgarden. Alice In Chains.

 

Quatre groupes qui ont chacun connu leurs heures de gloire. Et leurs heures sombres. Alice In Chains n’a pas dérogé à cette sinistre histoire. Et a plus que payé son tribut à la noirceur du grunge, faisant résonner lugubrement certains de ses titres ou de ses paroles (We Die Young ; Man In The Box ; Down In A Hole ; Rain When I Die..) qui furent a posteriori prémonitoires. L’histoire semblait finie après les décès du bassiste Mike Starr et du chanteur Layne Stanley, tous deux emportés par des overdoses.

 

Il y a un peu plus de dix ans, voir Alice In Chains en concert dans une salle comme l’Olympia -qui compte un peu plus de 2800 places- paraissait donc totalement illusoire.

 

Et pourtant… Pourtant le mythe est revenu à la vie, dans une deuxième formation, emmenant avec lui pour ce nouveau chapitre un deuxième chanteur, William DuVall. Et enchainant trois nouveaux albums après la série glorieuse des années 90. Trois nouveaux albums, pour une deuxième ère qui, si elle n’a pas le cachet mythique du grunge 90’s, est à la hauteur du mythe.

Le dernier album, Rainier Fog, du nom d’une montagne souvent embrumée et visible depuis Seattle, vaut notamment largement l’écoute. Et sert de prétexte à la venue du quatuor mythique à Paris .

 

Album/prétexte qui a émaillé une prestation absolument magique, aperçue depuis le balcon de cette superbe salle qu’est l’Olympia. On ne le dira jamais assez mais l’essence du rock est là : une salle à taille humaine qui résonne très fort sous les assauts soniques des guitares et les coups de butoir d’une section rythmique irréprochable. Qu’attendre de ce concert pour le fan d’Alice In Chains que je suis ? Ce que j’ai eu. Un show surpuissant, assuré par des musiciens charismatiques et une setlist mêlant les morceaux des premiers albums avec ceux des derniers.

 

La salle de l’Olympia, tout d’abord, vaut la peine d’être évoquée. Le placement en balcon était une nouveauté pour moi (j’étais déjà venu dans cette salle voir Nine Inch Nails, mais en fosse). Et clairement, le confort, la visibilité sur la scène, l’impression d’être à quelques mètres du groupe… Voilà de quoi vivre un moment inoubliable. Lire les expressions sur les visages du public et des musiciens, surprendre les regards complices, voir le batteur s’amuser (et parfois se rater) avec ses baguettes… Vivre un moment de rock à échelle humaine reste un plaisir quand on voit un groupe aussi mythique.

 

D’autant plus que j’ai aimé voir ces musiciens en live. Loin du glauque qu’affiche parfois le groupe, les musiciens semblaient heureux d’être là. Heureux, concentrés et joueurs avec le public, n’hésitant pas à le taquiner ou le faire crier. J’ai aimé entendre en direct William DuVall chanter. Son charisme visuel et vocal s’impose comme une évidence. Il ne remplace pas Layne Stanley. Il crée son propre truc, dégage sa propre énergie et sa propre identité vocale. Très énergique sur scène, il bouge beaucoup, n’hésite pas à haranguer le public en montant sur les retours et même à glisser quelques mots en français. Une prestation énergique et techniquement irréprochable. Sa voix est claire, puissante, équilibrée. Et son association avec le chanteur-guitariste Jerry Cantrell fait des merveilles. Ces deux voix sont faites pour se mêler dans cet étrange ballet planant au milieu de la puissance des guitares saturées et de la section rythmique de plomb. Section rythmique qui mérite d’ailleurs d’être évoquée, tant elle est simple, carrée et d’une redoutable efficacité.

 

A noter néanmoins quelques petits problèmes (je chipote peut-être ?) sur le son, très fort, qui pouvait parfois devenir désagréable sur certains morceaux. Une chose est sûre, c’est que le lendemain, lorsque j’ai mixé aux 3 Orfèvres, ma propre sono me paraissait extrêmement basse et faible !

 

Un dernier mot enfin sur la setlist. Elle mêlait habilement 13 anciens morceaux (de 1987 à 1995) avec 8 nouveaux (à partir de 2009). Un équilibre penchant légèrement en faveur du passé, mais qui comblait à peu près toutes mes attentes. Le groupe reste fidèle à lui-même, à son propre mythe, en jouant ses classiques (Angry Chair ; Rooster ; We Die Young, etc…), mais ne reste pas bêtement prisonnier de son passé. Et clairement, lorsqu’on entend des morceaux de la tempe de The One You Know, Check My Brain, Stone ou Giant, on se dit que ces quatre là ont bien fait de continuer, envers et contre tout.

 

Petit bémol, j’aurais aimé que le groupe joue un peu plus que les deux petites heures de ce concert et j’aurais aimé entendre un peu plus de morceaux de l’album éponyme Alice In Chains de 1995 (il n’y a eu qu’Again qui venait de cet album). De même, je n’aurais pas dit non à entendre des morceaux comme Sickman, Rain When I Die ou So far Under et Voices.

Dernier bémol, et pas des moindres, concernant la première partie, Black Rebel Motorcycle Club. Je suis arrivé en retard au concert (problème de logistique avec l’hôtel sur Paris) d’environ 25 minutes…. Et le concert de BRMC touchait déjà à sa fin. Il a donc duré moins d’une demi-heure…  Gros regret, car j’aime beaucoup certains des morceaux de ce groupe que je passe parfois aux 3 Orfèvres.

 

Mais après tout… Alice In Chains est un mythe. Et ce fut une chance incroyable pour moi de le voir dans une salle mythique comme l’Olympia. Et ce mythe fut à la hauteur de ce que j’attendais de lui. La quintessence même du rock était là.

Moi-même.

PS : Une partie du concert est visible en bonne qualité sur youtube ici :
https://www.youtube.com/watch?v=w4g3Itrb6V0

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15 mai 2019 3 15 /05 /mai /2019 20:49
[Review Concert] Metallica Stade de France 12/05/2019

Setlist : The Ecstasy Of Gold (Ennio Morricone) ; Hardwired To Self Destruct ; The Memory Remains ; Ride The Lightning ; The God That Failed ; The Unforgiven ; Here Comes Revenge ; Moth Into Flame ; Sad But True ; Ma Gueule (Johnny Hallyday) ; Soli de basse : ManUNkind & Orion ; Frantic ; One ; Master Of Puppets ; For Whom The Bell Tolls ; Creeping Death ; Seek And Destroy ; Rappel : Spit Out The Bone ; Nothing Else matters ; Enter Sandman (avec The Frayed Ends of Sanity outro)

 

J'imagine qu'on a tous un groupe qui nous est (très) cher, découvert durant l'enfance et l'adolescence et qui ne nous lâche plus vraiment depuis. Un groupe qui, une fois découvert, nous a permis d'affirmer notre identité sonore -voire vestimentaire. D'affirmer quelque part notre identité ou tout simplement notre goût.


Dans mon cas, ce fut Metallica, il y a maintenant une grosse quinzaine d'années. Je savais déjà que j'aimais le rock à l'époque. Et Metallica m'a permis d'aller plus loin. Comme pour beaucoup de fans, la porte d'entrée fut pour moi le Black Album, l'album Metallica de 1991, appelé ainsi à cause de sa pochette. En commençant d'abord à écouter ce slow -cliché mais toujours émouvant- qu'est Nothing Else Matters. Toujours un choc à 14-15 ans, lorsqu'on vit ses premiers émois amoureux. Puis peu à peu, ce fut le reste de l'album, les tubes d'abord (Enter Sandman, The Unforgiven, Sad But True...), les titres moins connus ensuite. Puis le reste de la discographie (Master Of Puppets, Ride The Lightning...) du groupe. Puis le passage vers d'autres groupes de métal de l'époque, Rammstein, Marilyn Manson, Slipknot, etc...


Aujourd'hui, le métal fait partie de mes goûts, même si je me définis plus comme amateur de rock que comme métalleux. Voir Metallica pour la première fois en concert était donc extrêmement émouvant pour moi. Même si j'avais quelques réserves concernant le lieu même de ce concert, le Stade de France, belle arène de Football, mais lieu moyen pour un concert. J'y avais vu Roger Waters jouant The Wall il y a quelques années, et pour avoir vu trois fois cet artiste en live, cette fois au stade de France fut la moins bonne des trois pour moi. A cause du lieu.

 

Les quatre musiciens de Metallica sont-ils parvenus à m'émouvoir et à réaliser un bon concert pour vaincre mon appréhension ?

 

La réponse est clairement OUI. Je ne m'étendrais pas ici ni sur Bokassa (pas vu), ni sur Ghost (prestation que j'ai trouvé réglo sans plus et je ne suis pas du tout un amateur de ce groupe).

 

Mais Metallica... Malgré quelques problèmes de son dans le lancement du concert -Hardwired To Self Destruct paraissant encore plus brouillonne que sur l'album- ce fut impeccable. Et grandiose.

 

Une fois le concert vraiment lancé, le groupe a déroulé une setlist impeccable, piochant allégrement dans tous ses albums à l'exception notable de Death Magnetic, étrangement délaissé, et de Load, logiquement délaissé. Et quand un groupe est capable de mélanger des morceaux récents d'excellente tenue (Moth Into Flame) et des classiques absolus comme One, Master of Puppets, Enter Sandman, Seek and Destroy, autant dire qu'il est loin au-dessus de beaucoup de ses contemporains. Nous avons même eu la chance d'avoir quelques raretés comme le classique Welcome Home (Sanitarium), The Unforgiven (morceau culte du groupe mais relativement peu joué en live ces dernières années) et même Frantic, morceau qui ouvrait à l'époque le mal-aimé St. Anger. Il est d'ailleurs intéressant de noter le travail fait sur les visuels apparaissant sur les écrans géants. Si parfois on se contentait de voir des vidéos du groupe en train de jouer, certains titres comme Sad But True ou One étaient accompagnés de mini films animés qui étaient parfois magnifiques. Mention spéciale à For Whom The Bell Tolls avec son animation renvoyant au superbe roman d'Hemingway du même nom (Pour qui sonne le glas en français).

 

Autre clin d’œil et/ou hommage amusant, Robert Trujillo (bassiste) et Kirk Hammet (guitariste soliste) ont gratifié le public d'une reprise en français avec... Ma gueule de Johnny Hallyday ! Le groupe est habitué à reprendre régulièrement une chanson du pays dans lequel il joue. En Norvège, ils avaient déjà repris Take On Me de A-AH, en Belgique Ça Plane Pour moi de Plastic Bertrand, et en 2017 à Bercy, Antisocial de Trust. Une vieille et rigolote habitude pour ce groupe, au final plus joyeux et ouvert qu'on pourrait le croire vu leur imagerie et leur succès.

 

Car il ne faut pas s'y tromper, Metallica est peut-être le plus grand groupe de métal au monde. Un des plus connus en tout cas. Et malgré tout, ce concert fut à la hauteur de ce que j'attendais d'eux et de ce que l'adolescent écoutant Nothing Else Matters seul dans sa chambre pouvait imaginer 15 ans plus tard. Un grand concert mémorable pour un grand groupe, qui a réussi à vaincre mes appréhensions concernant le stade de France. Un souvenir unique dans ma vie. Un de plus avec ce groupe.

Moi-même.

Concert complet sur youtube : https://www.youtube.com/watch?v=POd_O9l2aGU

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13 janvier 2014 1 13 /01 /janvier /2014 01:27

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/f/f4/Lou_Reed-New_York_%28album_cover%29.jpg

 

Tracks : Romeo Had Juliette ; Halloween Parade ; Dirty Blvd ; Endless Cycle ; There Is No Time ; Last Great American Whale ; Beginning Of A Great Adventure ; Busload of Faith ; Sick Of You ; Hold On ; Good Evening Mr. Waldheim ; Christmas In February ; Strawman ; Dime Store Mystery

 

Le 27 octobre dernier s'éteignait Lewis Allan Reed à l'age de 71 ans. Stupeur dans le monde du rock. Cette musique a connu bien des idoles, souvent parties trop tôt. Mais Lou Reed, en presque 50 ans de carrière avait gagné une place bien particulière dans le cœur de l'amateur de rock moyen. Les hommages pleuvaient sur les réseaux sociaux. Le plus souvent accompagnés de morceaux, notamment du Velvet Underground. I'm Waiting For The Man, Venus In Furs, Heroin, Walk On A Wild Side ou Perfect Day revenaient le plus souvent. Autant de morceaux qui donnent un vague aperçu de ce qu'était Lou Reed : un des plus fins paroliers du rock et un de ses expérimentateurs les plus acharnés. Cette voix toujours tranchante, partagée entre rage et mépris, débitait des textes à nuls autres pareils. Bien peu ont su dans le rock chanter les villes et leur vicissitude avec une telle finesse. Les bas fonds urbains, peuplés de prostitué(e)s, de camés, de gens dans la misère, déconnectés les uns des autres, autant de sujet qu'on retrouve tout au long de la carrière de Lou Reed, du premier album du Velvet Underground à Lulu. A-t-on écrit blues plus urbain qu'Im Waiting For The Man? A-t-on écrit album plus cru et sinistre que Berlin? Pourtant, une ville a surtout marqué Lou. La sienne, celle où il est né, où il vécut et où il est mort. New York.

 

Ce n'est donc pas un hasard si c'est vers cette ville qu'il est revenu puiser son inspiration à la fin des années 80. Cette décennie est en effet un peu particulière pour Lou Reed. Après les 70's de tous les excès (Metal Machine Music, les albums live d'une violence inouïe) et de toutes les gloires (Transformer ; Berlin), Lou est en effet un peu « rentré dans le rang ». Il est marié, joue moins de sa bisexualité, apparaît moins drogué en public et s'est débarrassé de son look de néo nazi qu'il arborait vers 1974. Et depuis The Blue Mask en 1982 (qui n'était déjà pas un album magistral non plus), sa discographie ronfle un peu. C'est avec l'aide de son nouveau guitariste Mike Rathke qu'il décide donc de replonger à hauteur du bitume New-Yorkais de cette fin de décennie pour se relancer.

Le sublime Romeo Had Juliette pose d'emblée le décor : goudron, gaz d'échappement, sirènes de police. Les guitares électriques sont tranchantes et nerveuses, laissant tourner en boucle quelques riffs simples, très inspirés par le blues, parfois par la folk. C'est ce son très dépouillé, électrique et nerveux (« You can't beat two guitars, bass, drum » dit Lou Reed sur la pochette) qui va donner le lustre à l'ensemble de cette ballade dans les rues de New-York. Et qui sert d'écrin à chacune des quatorze scénettes que Lou nous narre.

 

New York marque en effet un certain tournant dans sa carrière. Son fameux « parlé-chanté » qui est devenu au fil des ans sa signature vocale est ici à son paroxysme. Lou semble plus débiter son texte que réellement le chanter. Et il chante très peu ici au final. Il narre, il nous raconte sa ville, ses visages plus ou moins cachés au fond des ruelles. Le poète et le conteur ont pris le pas sur le chanteur. Ce qui lui laisse toute latitude pour nous faire pénétrer dans les appartements crasseux et les hôtels miteux comme le Wilshire Hotel (Dirty Blvd) ou nous emmener près de ce corps encore chaud qui git au milieu de Central Park (Hold On).

 

Lou Reed restant lui-même, les sujets sont effet des plus sombres et des plus crus. Le sida (Halloween Parade et son défilé de dragqueens), le génocide des indiens et le racisme américain (Last Great American Whale), les règlements de compte dans les rues (Hold On), la détresse des rescapés du Vietnam (Christmas In February), la maltraitance familiale et la drogue (Endless Cycle), tout y passe... Grand saut dans le noir. Tous ces textes sont superbes, oscillant entre réalisme noir, tristesse et rage. Lou Reed se fait ici le plus urbain et réaliste des bluesman. Et il n'hésite pas à régler ses comptes violemment sur ce disque avec les incisifs et sans concession There Is No Time (un des moments de bravoure de l'album, de la pure rage), Good Evening Mr. Waldheim (le président autrichien de l'époque et ancien SS) et Busload of Faith, tandis que la contemplation et la tristesse s'invitent sur Christmas In February ou sur le faussement joyeux Sick Of You, porté par des guitares boogie/blues magnifiques.

 

Ces quatorze blues urbains sont autant de superbes clichés de la grande pomme de la fin des années 80. Tous sont justes. Certains sont un poil plus brillants (Romeo Had Juliette ; There Is No Time ; Last Great American Whale ; Chrismas In February), mais aucun n'est mauvais. L'album qui est quasiment conceptuel s'écoute d'ailleurs en entier, dans l'ordre. « Comme un livre ou un film » prévient Lou dans les notes de pochette. On connaissait ses dons de conteur depuis I'm Waiting For The Man sur le premier disque du Velvet. Ce n'est peut-être pas un hasard si on retrouve Maureen « Moe » Tucker (batteuse du Velvet) qui s'invite ici sur Last Great American Whale et Dime Store Mystery. New York est tout simplement un album majeur et un des tous meilleurs disques de Lou en solo. C'est même mon préféré après Transformer et Berlin. Le poète peut partir en paix. Car avec ce disque, il a tout simplement été un des plus grands hérauts de sa ville.

 

17/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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2 décembre 2013 1 02 /12 /décembre /2013 23:34

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/7/7c/Jake-Bugg-album.jpg

 

Tracks : Lightning Bolt ; Two Fingers ; Taste It ; Seen It All ; Simple As This ; Country Song ; Broken ; Trouble Town ; Ballad Of Mr Jones ; Slide ; Someone Told Me ; Note To Self ; Someplace ; Fire

 

“La valeur n'atteint pas le nombre des années”. On oublie en effet bien trop souvent à quel point certaines œuvres ont été créées par de jeunes gens. Ainsi Le Bateau ivre fut écrit par Arthur Rimbaud alors qu'il n'avait que 17 ans. Verlaine écrivit Les Poèmes Saturniens alors qu'il n'avait que 22 ans. A cet age là, Jim Morrison avait déjà écrit et chanté sur le premier album des Doors tandis qu'Alex Chilton avait déjà gravé à 16 ans un succès immortel avec The Letter des Box Tops. Le rock et l'art sont aussi (et surtout?) des questions de jeunes, c'est entendu.

 

Pourtant lorsque débarque fin 2012 un jeune homme de Nottingham du nom de Jake Bugg, tout le monde est surpris par ce phénomène. Il faut dire que le jeune garçon, visage poupin du lad en devenir et guitare folk en bandoulière détonne carrément dans la représentation qu'on se fait d'un chanteur de 18 ans en 2012. Son histoire est suffisamment belle pour séduire. Et a tout d'une légende en devenir. C'est à l'age de 13 ans en regardant un épisode des Simpsons qu'il est frappé par la chanson Vincent de Don McLean. Au même moment, son oncle lui offre une guitare folk et lui apprend quelques accords. La vocation nait. Dans le quotidien morne des HLM de Clifton, l'adolescent commence à écrire ses premières chansons et fait ses premières armes à la basse au sein d'un groupe. Mais ce sont finalement ses compositions qui attirent l'attention de la BBC en 2010, puis qui l'envoient à Glastonbury en 2011. Un album ne pouvait que voir le jour, et ce fut le cas en Angleterre le 15 octobre 2012, lorsque paraît Jake Bugg, son premier opus.

 

Ce qui frappe d'emblée, c'est la sobriété absolue de ce titre et de cette photo en noir et blanc du jeune homme. Sobre et épurée, cette pochette est finalement à l'image du contenu. Dès Lightning Bolt, on est marqué par la brutale simplicité du morceau. Une batterie, une guitare acoustique, une guitare électrique pour le refrain : nous voici en train d'écouter un titre country-folk en 2013. Et de plutôt bonne qualité en plus. Johnny Cash, Bob Dylan et Donovan sont de la partie tout au long de l'album et on ne s'en plaint pas.

 

Mais Jake passe à la vitesse supérieure dès le titre suivant, Two Fingers. C'est ici que la formule archi basique de sa musique prend toute son ampleur. Sur cette base folk, Jake nous offre une mélodie pop de toute beauté. Ce refrain est excellent et son chant plein d'une maturité surprenante. Comment paraître si serein et mélancolique à 18 ans? Comment porter un regard aussi acéré sur sa vie d'adolescent? On retrouve ici la plume des meilleurs paroliers anglais, quelque part entre un Ray Davies et un Alex Turner. L'influence des Arctic Monkeys dans la description de la jeunesse sans but des anglais est indéniable. Et la formule marche ici magnifiquement bien, pour un titre qui est un des meilleurs de la galette. L'influence des Monkeys se fait aussi sentir sur le morceau le plus pêchu du disque, l'électrique Taste It. Ce son de guitare rêche et cette prononciation saccadée font mouche, comme du temps de Arctic Monkeys - Whatever People Say I Am, That's What I'm Not (2006). On souhaite à Jake la même carrière qu'aux singes de l'arctique.

 

Mais là où il tutoie vraiment le génie en ce début d'album, c'est sur Seen It All. C'est le titre qui m'a fait accrocher à ce disque. Autobiographique, ce morceau doté d'un excellent clip raconte une bagarre de rue dans laquelle Jake a poignardé son adversaire... Qui en a réchappé, contrairement à ce qui est raconté ici. On sent ici l'Angleterre prolétaire dans tout ce qu'elle a de meilleur. Véritable chanson de lad, Seen It All est aussi et surtout un bijou pop-folk. Le chant est plein de morgue, mature et puissant, tandis que la guitare acoustique rythmique est entrainante et juste. Lorsque le refrain se lance, appuyé par un peu de guitare électrique, c'est l'ombre des meilleurs songwriters anglais qui plane. Jamais avare d'un bon coup, Noel Gallagher a d'ailleurs recruté le jeune Jake pour la première partie de sa tournée américaine.

 

Après ce bijou, beaucoup de ballades parsèment l'album : Simple As This ; Country Song ; Broken ; Ballad Of Mr Jones ; Slide ; Someone Told me ; Note To Self ; Someplace. Toutes ne sont pas inoubliables loin de là. Et cette abondance de ballades country et folk fait un peu retomber le soufflé, soyons honnête. La deuxième moitié de l'album s'en trouve un peu affaiblie. Mais comment ne pas être ému aux larmes par un titre comme Broken (au superbe clip là aussi)? Ces accords simples et limpides, cette batterie robuste et discrète et ces quelques notes de violons portent une mélodie poignante, où Jake nous narre de son plus beau chant ses peines d'amour avec l'appui de quelques chœurs féminins... Un joyau d'émotion, ni plus ni moins.

 

Ballad Of Mr Jones ne saurait non plus être occulté. Ce titre, qui fait clairement référence à Bob Dylan (Ballad Of A Thin Man met en scène un personnage s'appelant Mr Jones) dégage une ambiance psychédélique et oppressante de toute beauté. Ce morceau à l'univers country semble narrer l'histoire d'un homme exécuté alors qu'il n'avait rien fait... Belle, triste et glauque, cette ode à Mr Jones est à nouveau émouvante à souhait.

 

Enfin, comment ne pas parler de Someone Told Me, superbe ballade désabusée sur l'amour et portée par une guitare cristalline? Là encore, rien de nouveau. Là encore, la formule folk est simple et rêche. Mais là encore, le chant, le texte et les accords limpides de guitare acoustique font mouche.

 

Alors bien sur, le reste du disque est moins marquant que la poignée de titres dont j'ai parlé dans le détail. Mais rien que pour ces quelques titres (Two Fingers ; Taste It ; Seen It all ; Broken ; Ballad Of Mr Jones et Someone Told Me), la galette vaut le détour. De toute façon, sur les quatorze titres qu'elle compte, très peu dépassent les 3 minutes. Et tous sont empreints de cette robuste simplicité inspirée par les plus grands de la country et de la folk. La formule marche à chaque fois. Les talents de conteur de Johnny Cash ne sont pas loin. Le phrasé de Dylan non plus. Et clairement, aucun de ces quatorze titres n'est mauvais et tous sont au moins agréables. Ce qui fait de ce premier disque éponyme de Jake Bugg un album très appréciable. Ce n'est pas l'album de la décennie, ni même de l'année. Mais par sa brutale et efficace simplicité, par les quelques perles qu'il contient, et par le fait qu'il réinvente sans les changer la country et la folk en 2013, il est déjà un coup de force majeur. Et il marque à n'en point douter l'éclosion d'un très grand talent.

 

14/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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15 octobre 2013 2 15 /10 /octobre /2013 22:18

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/2/2e/Kveikur_%282013%29_album_cover.jpg

 

Tracks : Brennisteinn ; Hrafntinna ; Ísjaki ; Yfirborð ; Stormur ; Kveikur ; Rafstraumur ; Bláþráður ; Var

 

Les pas du voyageur s'arrêtent. Le parfum du soufre emplit l'air. Odeur caractéristique, à la fois repoussante et attrayante... En Islande, cette senteur d'œuf pourri est présente en bien des lieux. Mais elle n'a rarement été aussi forte qu'ici à Námafjall. Cette soufrière à ciel ouvert située à quelques kilomètres du lac Mývatn dans le nord est de l'Islande dégage une atmosphère difficilement descriptible. Les lieux sont calmes. Incroyablement sereins. Et désolés. Il n'y a que de la roche ici. Au loin se découpent les cratères menaçants du Hverfjall et du Viti, pendant qu'à quelques encablures de là, la ville du diable, Dimmuborgir, attend le pèlerin égaré. Si une paix asphyxiante règne en surface, la menace plane néanmoins autour du voyageur. Sous ses pieds, le sol est littéralement ravagé. Des fumées se dégagent en grande quantité, en amenant cette odeur inimitable du soufre. Le voyageur doit faire attention là où il met les pieds, car des marmites de boues bouillonnantes et d'acide sulfurique se révèlent au fur et à mesure de ses pas, entre deux coulées jaunes. Comme quoi, même le calme le plus serein en surface peut cohabiter avec le chaos le plus total en sous-sol.

 

Est-ce un hasard si Kveikur (qui se traduit par « mèche » en français), s'ouvre par un titre signifiant « soufre » (Brennisteinn) ? Probablement pas. Si on savait les islandais de Sigur Rós capables de délivrer des atmosphères d'une sérénité et d'une contemplation rarement égalées dans le rock, leur septième opus studio se révèle tout autre. Car sous le calme apparent du groupe, le chaos rode, prêt à surgir à la moindre occasion. Et suite au départ du pianiste Kjartan Sveinsson début 2013, le groupe décide (enfin) de laisser ressurgir son coté le plus sombre. Voire le plus sauvage. Le désormais trio a décidé de répondre au très méditatif et austère Sigur Rós - Valtari (2012) sorti l'an dernier en laissant complètement aller sa créativité.

 

Lorsque débute Brennisteinn, l'auditeur n'en croit pas ses oreilles. La rythmique lourde, syncopée et tribale de la chanson est limite proche du rock industriel, évoquant bien plus Nine Inch Nails que Sigur Rós. Jamais la section rythmique n'avait été ainsi mise en avant dans ce groupe. Et rarement elle n'avait été aussi sauvage. Le son de la basse est lourd et gras, et la guitare n'est pas en reste, se joignant à la rythmique pour nous écraser de tout son poids. Seule la voix angélique de Jónsi nous guide à travers ce déchainement d'explosions successives de distorsion. Le soufre a fait la richesse de l'Islande pour ses vertus explosives, lorsqu'il servait à faire de la poudre à canon. Il fait ici toute la richesse du groupe qui se renouvelle comme jamais, évoquant les landes désolées de Námafjal. La rythmique sur laquelle s'appuie le groupe est aussi explosive que le sol de cette région, tandis que la voix de Jónsi évoque la calme beauté qu'il y règne... Dichotomie merveilleuse pour une bombe musicale, qui fut utilisée pour l'anecdote sur le trailer d'Assassin's Creed 4 Black Flag.

 

Comme une lente procession descendant les flancs du Viti, la majestueuse Hrafntinna s'avance, sombre et majestueuse comme l'obsidienne dont elle porte le nom. Si le titre est nettement moins lourd et violent que l'explosif Brennisteinn, il n'en demeure pas moins extrêmement sombre et inquiétant. L'usage des cuivres, majestueux et célestes, s'appuie ici sur une rythmique très marquée grâce à l'emploi des cloches et des cymbales. Comme les pas d'une lugubre procession qui s'avance... L'univers de cette chanson est sombre, et après l'explosion, seule une paix macabre règne. Ne reste que la voix claire et céleste de Jónsi pour nous rassurer.

 

Après deux morceaux aussi sombres et étouffants, la suite devient forcément plus radieuse. A commencer par la sublime Ísjaki, céleste et glaciale complainte qui nous ramène près des icebergs flottants à la surface du Jökullsarlon, ce lagon glaciaire situé à des centaines de kilomètres de Námafjal. Le morceau, qui reprend la formule classique du groupe laisse ici une belle part à la fameuse guitare jouée à l'archet et à la voix de fausset de Jónsi, magistrale ici. La mélodie est sublime, la rythmique discrète mais efficace et au final la formule, bien qu'éculée, marche toujours aussi bien depuis Takk..., leur quatrième album.

 

Le groupe plonge ensuite dans les eaux du lac glaciaire, passant sous la surface (Yfirborð). Des voix déformées se font entendre, comme émises sous l'eau tandis qu'une rythmique très électronique, limite dansante se fait entendre... Le titre (qui regorge de petites subtilités lorsqu'il est écouté au casque) peine néanmoins à me convaincre, tant de par cette rythmique étrange que par le manque d'âme qu'il dégage au final. Et pourtant l'idée de base est plutôt intéressante et originale.

 

De même Stormur, dont le titre plutôt trompeur signifie tempête, me séduit très moyennement. Le morceau manque un peu de patate, ou alors n'est carrément pas assez contemplatif. La rythmique y est assez marquée (ce qui caractérise cet opus par rapport aux autres productions du groupe), mais pas assez, et la mélodie se révèle assez fade. Au final, à naviguer entre deux eaux, cette tempête se révèle n'être rien de plus qu'une brise certes agréable mais peu propice au voyage.

 

Mais la mèche de la bougie (Kveikur) se rallume vite. Très vite. Dans la succession de la trainée de soufre de Brennisteinn, le morceau titre s'enflamme, bien aidé par une nouvelle rythmique martiale un peu électronique. Les incursions les plus industrielles de ce disque sont clairement les plus réussies au final. Et Kveikur, par son rythme lourd et tribal, ses guitares saturées et lourdes, ses cloches lugubres, ses bruitages électroniques et son chant inhumain est oppressant à souhait. Une aura maléfique et mystique de mort se dégage de ce morceau et nous ramène directement dans la gueule du diable, au milieu de ces soufrières si fascinantes... L'odeur du soufre, les bruits de l'acide qui bouillonne, la vue du désert... Kveikur contient tout ça et bien plus encore.

 

Malheureusement, Rafstraumur qui suit est nettement moins prenant. Repartant vers les hauteurs habituelles de la musique de Sigur Rós, le titre marche au final assez peu. Il n'est pas mauvais, mais sa mélodie n'est pas transcendante et l'ambiance qu'il dégage se mêle assez mal avec le morceau précédent. Disons que je trouve dommage de sortir autant par moments des sentiers battus pour ensuite revenir avec ce genre de chansons assez communes pour le groupe. Pas de quoi crier au scandale, surtout que l'alternance titres violents/titres calmes peut très bien marcher (King Crimson - In The Court Of The Crimson King (1969) en est la preuve depuis 44 ans), mais le groupe manque un peu son coup à mon goût.

 

Et il en est un peu de même avec Bláþráður, même si le morceau est un poil meilleur. Posée là encore sur un rythme de batterie assez énergique et une basse très saturée, la chanson laisse libre cours à la voix de Jónsi, qui fait encore des merveilles. Entendu de loin le titre est d'ailleurs particulièrement relaxant. Par contre, écouté au casque, il inclut pas mal de petits bruitages et de petites voix électroniques cachés dans le mix qui peuvent au final se révéler assez angoissants. L'ayant écouté hier soir dans un demi sommeil après avoir regardé le film Silent Hill, je peux vous dire que mon imagination m'emmenait dans les lieux particulièrement lugubres!

 

Mais l'angoissant voyage de Kveikur se finit plutôt bien. A l'abri (Var) de toute cette fureur. Comme beaucoup de morceaux finaux chez Sigur Rós, il s'agit d'un instrumental méditatif et apaisé au piano. Et dans la plus pure tradition d'Avalon, Fjögur Píanó ou des titres chantés comme All Alright et Heysátan, Var est tout bonnement une superbe ballade, apaisante et méditative. A son écoute, on a l'impression d'avoir trouvé refuge dans une des nombreuses grottes cachées qui affleurent sous la surface aux alentours de Námafjall, à écouter chaque note de piano tomber comme une goutte dans un lac d'eau perpétuellement chaude. On a l'impression d'avoir enfin trouvé la paix... Jusqu'à ce qu'un mouvement au fond de la grotte attire notre regard et nous emmène vers un autre voyage... (Sigur Rós - Ágætis byrjun (1999))

 

Enregistré dans l'urgence par un groupe qui a fait un sans-faute dans sa carrière (en omettant son controversé premier disque Von), Kveikur est à nouveau un voyage surprenant. Car rarement Sigur Rós s'était ainsi laissé aller à ses penchants les plus sombres et violents. Il y a une aura de colère et de mort qui plane sur tout ce disque. C'est probablement la galette du groupe qui capte le mieux la nature dichotomique de l'Islande où sous des apparences calmes et sereines se cache une activité tellurique extrême. C'est ainsi l'album de Sigur Rós où la rythmique est la plus marquée et survoltée. Kveikur contient certains des joyaux les plus noirs et les plus bruts du groupe, les superbes Brennisteinn ; Hrafntinna et Kveikur en tête. Rajoutez les deux superbes titres doux et contemplatifs que sont Ísjaki et Var et voilà de quoi proposer un beau voyage à l'auditeur... Malheureusement le reste des titres n'est pas aussi exaltant, ce qui rend Kveikur moins excitant que les autres disques du groupe. L'idée de proposer un opus plus sombre et violent est particulièrement plaisante, mais l'ensemble des titres peine à convaincre. Peut-être le groupe aurait-il gagné à carrément ne proposer que des morceaux dans la veine de Brennisteinn et Kveikur. Mais en attendant, ce sombre Kveikur vaut quand même le voyage, même s'il y a (beaucoup) mieux chez ce groupe.

 

14,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
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7 octobre 2013 1 07 /10 /octobre /2013 16:48

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/b/b4/Live_at_the_Star_Club%2C_Hamburg.jpeg

 

Tracks : Mean Woman Blues ; High School Confidential ; Money (That's What I Want) ; Matchbox ; What'd I Say (Part I) ; What'd I Say (Part II) ; Great Balls Of Fire ; Good Golly, Miss Molly ; Lewis' Boogie ; Your Cheatin' Heart ; Hound Dog ; Long Tall Sally ; Whole Lotta Shakin' Goin' On

 

En 1964, le rock 'n' roll originel est déjà en train de passer de mode. Les pionniers qui ont connu la gloire entre 1954 et 1959 sont tous sur le déclin. Johnny Cash se noie dans son addiction aux amphétamines. Elvis, métamorphosé par son service militaire, se perd dans des BO de films plus ridicules les unes que les autres. Emprisonné de 1961 à 1963 pour une sombre histoire impliquant une mineure, Chuck Berry a vu sa carrière stoppée en plein vol. Little Richard, ce gay noir qui a tant défrayé la chronique, est devenu pasteur évangéliste. Quant à Jerry Lee Lewis, son mariage en 1958 avec Myra Gale Brown a quasiment mis fin à sa carrière. Parce qu'elle avait 13 ans et était la fille de son cousin.

 

Pourtant lorsque le Killer débarque à Hambourg, le rock se porte bien. Il est même en plein essor sous l'impulsion de grands fans des pionniers du rock 'n' roll. Sans Chuck Berry, sans Elvis, sans Little Richard, pas de Beatles, pas de Rolling Stones, pas de Kinks. Tous ces groupes leur sont redevables de quelque chose. Siegfried Loch le dit avec une certaine amertume, il n'y aurait pas de Beatles sans ces artistes. C'est pourquoi il a l'idée de produire un disque live d'une légende du rock 'n' roll dans le Star Club d'Hambourg, cette boite mythique où les Fab Four ont fait leurs premières armes. Jerry Lee Lewis accepte de se prêter à l'exercice. En résulte ce Live At Star Club, Hamburg, enregistré lors des deux prestations incendiaires que le Killer livre le 5 avril 1694 en Allemagne.

 

Quand ce dernier monte sur scène, il est bien décidé à monter à ces jeunes blanc-becs anglais qui est le patron. Le Killer est remonté. Et prêt à en découdre. Après les présentations d'usage, les hostilités démarrent fort avec le boogie Mean Woman Blues au groove imparable. Ce titre qu'Elvis chantait lui aussi en 1957 ouvre à merveille le concert. Plus frénétique que la version d'Elvis, moins sexy, elle permet de voir à quel point le Killer porte bien son surnom une fois installé derrière un piano qu'il martèle avec une frénésie rarement égalée dans le rock. Ce qu'il démontre avec encore plus d'aplomb sur High School Confidential, son hit de 1958 qui suit. Son chant est indéniablement moins grave et sensuel que celui de Johnny Cash ou de Roy Orbinson et moins frénétique et fou que celui de Little Richard. Il regorge pourtant d'une rage et d'une arrogance qui en inspireront plus d'un dans le rock. Cet homme est sur de lui, et ses cris, ses onomatopées et son timbre font ici des merveilles. Pas besoin d'être le meilleur techniquement quand on a cette hargne. Et lr cynique Money (That's What I Want) finira de mettre d'accord toute personne qui écoute ce live. On a affaire ici à un show d'une urgence incroyable. Le piano est sublime, rageur et furieux. Ce concert est tout simplement l'acte de naissance du MC5, des Stooges ou de Jim Jones Revue. Et ce n'est pas la fantastique reprise pleine de groove et d'énergie du What'd I Say de Ray Charles qui conclut la face A qui me fera démentir mes propos. Ce live s'impose d'emblée comme un des plus incendiaires de toute l'histoire du rock.

 

Mais ce n'était pratiquement qu'un échauffement. La face B qui commence avec le public scandant « Jerry ! Jerry ! », va voir se transformer ce concert incendiaire en un véritable brasier. Les hits s'enchainent ici, à commencer par le phénoménal et déchainé Great Balls Of Fire, que le Killer a publié en 1957. 1 min 48 de pur bonheur, pied au plancher, tous les compteurs dans le rouge. La voix de Jerry, son piano littéralement martyrisé, tout est parfait. Et sans laisser le temps de respirer l'auditoire, c'est le frénétique et jouissif Good Golly Miss Molly de Little Richard qui déboule. Le batteur se lâche complètement ici, et tel un bolide lancé en pleine vitesse sur l'autoroute, le titre nous percute de plein fouet. Jerry semble très content de lui à la fin du morceau. Il y a de quoi, on en redemande.

 

Même le Lewis' Boogie, seul morceau de cette face qui ne soit pas un tube est particulièrement intéressant. La guitare électrique se taille ici la part du lion, contre toute attente. Your Cheatin' Heart, reprise du chanteur country Hank Williams représente quant à elle la seule réelle pause de tout le disque. Jerry a parfois dit de manière provocante que le Rock 'n' roll lui a juste permis de payer ses disques de country, la musique qu'il affectionne vraiment. Ce morceau prouve en tout cas qu'il excellait dans les deux.

 

Et cette pause était nécessaire avant que ne déboule le trio final du disque, le frénétique Hound Dog d'Elvis en tête. Le meilleur morceau du disque avec Great Balls Of Fire? On ne retrouve en tout cas cette rage que rarement dans le rock. L'interprétation est frénétique, puissante, hargneuse. On comprend avec ce concert pourquoi même les punks se revendiquaient du rock n roll des années 50. Et la tension ne redescend pas avec le Long Tall Sally de Little Richard, qui est à nouveau tout bonnement parfait. Et que dire du terminal Whole Lotta Shakin' Goin' On? Ce tube publié par Jerry en 1957 est jouée ici de manière lourde, puissante, fiévreuse. Le piano a-t-il survécu à ce show? La question mérite clairement d'être posée...

 

Je dois bien vous avouer que je ne connaissais pas ce disque autrement que de réputation avant de le dégotter à 5 euros sur une brocante. Et j'ai été littéralement soufflé une fois la platine allumée. Il y a en effet très peu de performances aussi incendiaires qui ont été gravées sur un vinyle. Jerry Lee Lewis était peut-être moins sous le feu des projecteurs en 1964, mais ce concert au Star Club immortalisé pour la postérité démontre qu'il était encore et plus que jamais le « Killer ». Et il venait tout simplement de graver dans la cire un des meilleurs concerts de rock et de rock 'n' roll de tous les temps.

 

17/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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9 septembre 2013 1 09 /09 /septembre /2013 01:12

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/0/09/Don%27t_Forget_Who_You_Are_Album_Cover.jpg

 

Tracks : Taking Over ; Don't Forget Who You Are ; Better Than That ; Out Of Control ; Bombshells ; Tonight ; What Condition Am I In? ; Fire In My Heart ; You're Gonna Get It ; Give Up ; Darkness in Our Hearts

 

Cher Miles,

 

De tous les artistes anglais actuels, tu es un de ceux qui attirent le plus ma sympathie. Pour pleins de raisons. Pour ton coté outsider permanent notamment. Et évidemment pour ton talent. Car depuis tes premiers pas forts intéressants avec The Little Flames, tu donnes à la musique ce que le nord de l'Angleterre a de mieux à offrir : de la bonne pop. Ton écriture n'y était pas encore à son zénith pour sur. Ni même au sein des Rascals, ce bon groupe qui t'a apporté en premier une certaine notoriété. Mais déjà, tu nous livrais de la (très) bonne musique. Des pop-songs comme seuls les natifs de la perfide Albion semblent capables d'en faire. 2008 a été une grande année pour toi. Car outre Rascalize, le premier album des Rascals qui eut un certain succès critique (et qui est très bon), tu as accouché avec le singe de l'arctique en chef d'un coup de maitre : The Last Shadow Puppets - The Age Of The Understatement (2008). Ton amitié avec Alex Turner, qui remonte aux tournées communes des Arctic Monkeys avec The Little Flame puis The Rascals, est devenue une collaboration de premier ordre. Peu sont les disques pop sortis ces dernières années à dégager une telle aura. The Age Of Understatement, en plus de révéler les dons polymorphes de Turner, te donnait enfin la place que tu mérites. Votre duo est un des meilleurs de la décennie anglaise, loin des idioties d'un couple Doherty/Barat. De là, tu t'es très habilement lancé en solo. A fort juste titre. Ton premier album Miles Kane - Colour Of The Trap (2011), s'il n'est pas parfait, est très plaisant. Les singles qui en ont été tirés, les très rock Come Closer, Inhaler ou le sublime Rearrange démontraient que même seul, tu es un des meilleurs song-writers anglais modernes.

 

Depuis, tu as continué ton chemin en publiant deux EPs sous ton nom : First Of My Kind et Give Up, sorti au début de cette année. Ce dernier laissait cependant planer quelques doutes. Le morceau titre était loin d'être fameux. Lorsque tu as annoncé que cette chanson se situerait sur ton deuxième album solo qui paraitrait le 3 juin, je dois bien t'avouer une certaine perplexité chez moi. Cette tambouille à grosses guitares électriques et au refrain pompier ne ressemblait pas vraiment à la pop racée et élégante à laquelle tu m'avais habitué.

 

« N'oublies pas qui tu es ». Joli titre, Miles. Vraiment. Jolie pochette aussi où tu poses fièrement devant la boucherie familiale. Mais malheureusement, j'aurai préféré que tu t'appliques à toi-même ce titre. Car j'ai bien l'impression que tu oublies un peu ici qui tu es. Pourtant, tu es à nouveau bien entouré. On retrouve à l'écriture à tes cotés Ian Broudie, producteur de The Fall et d'Echo And The Bunnymen et qui produit ce disque, Andy Partridge de XTC, Kid Harpoon qui travaille avec Florence And The Machine et le vétéran pop-punk Paul Weller. Du bien beau monde, mais qui n'a pas su tirer le meilleur de toi si tu veux mon avis. Là où Alex Turner sait si bien te faire transcender ton écriture, tes nouveaux copains de jeux t'ont fait écrire des morceaux très bruts de décoffrage. Presque basiques. Tu maitrises très bien le rock normalement, Come Closer en est la preuve. Mais là ça ne marche pas.

 

Les titres de cet opus sonnent en effet un peu patauds. Ni nerveux, ni puissants. Juste un peu pompiers et au final peu convaincants. Pourtant Taking Over et Don't Forget Who You Are qui ouvrent le disque ne sont pas en soit des mauvais titres. Oui, mais ils ne sont pas bon non plus. Je les oublie très vite et je ne tape pas non plus du pied en les écoutant.

 

La formule consistant à te réapproprier T-Rex, les Jam et les Who ne marche pas ici. Les chansons sont vaines. Ça me fait d'autant plus mal quand je pense aux morceaux qui ouvrent Colour Of The Trap. Et toutes les chansons de la galette sont à l'avenant. Des grosses guitares qui sonnent assez platement au final, des refrains téléphonés et pompiers qui sont fatiguant, des mélodies qu'on oublie vite... Mince, moi qui avait tant adoré le coté novateur que tu apportais à la pop au sein des Last Shadows Puppets ou sur certains titres de Colour Of The Trap... Me voilà fort désappointé.

 

D'autant plus que quand tu poses tes grosses guitares, tu révèles qui tu es vraiment Miles. Un bon songwriter. J'en veux pour preuve les deux perles acoustiques qui surnagent complètement au milieu de ce disque fort médiocre : Out Of Control et Fire In My Heart. A eux deux, ces morceaux rendent les autres vulgaires. Le premier avec son orchestre et sa très belle guitare acoustique évoque les grandes heures de la pop de Liverpool. L'alliance entre les cordes et ta guitare qu'elle soit acoustique ou électrique donne un écrin à ta voix bien supérieur à tout ce que tu as fais d'autre sur l'album. Miles, ce morceau est sublime. De même Fire In My Heart est une très belle ballade acoustique où là encore le soutien du discret piano est absolument délicieux. Tu y chantes divinement bien. Comment veux-tu qu'avec deux telles pépites sur ton disque, le reste n'en paraisse pas ennuyeux?

 

A dire vrai, je crois que tu as un peu oublié qui tu es Miles. Ce disque, je le trouve indigne de toi. Non pas qu'il soit horrible au fond. Mais il n'est pas à ta hauteur. Seuls les deux morceaux acoustiques expliquent toute l'affection que j'ai pour toi. Certes, Give Up se tient, Taking Over aussi... Mais ce n'est pas suffisant, surtout à l'heure où de jeunes loups comme Jake Bugg rodent. Disons que c'est une erreur de parcours, ça arrive. On te pardonne volontiers. Mais il ne faudra pas nous refaire le coup trop souvent, que ce soit avec The Last Shadow Puppets dont un disque est annoncé pour bientôt ou en solo. Pour ne pas qu'on oublie qui tu es, c'est à dire un type plein de talent.

 

08/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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29 août 2013 4 29 /08 /août /2013 13:46

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/9/90/Queens_of_the_Stone_Age_-_Rated_R.png

 

Tracks : Feel Good Hit Of The Summer ; The Lost Art Of Keeping A Secret ; Leg Of Lamb ; Auto Pilot ; Better Living Through Chemistry ; Monsters In the Parasol ; Quick And To The Pointless ; In The Fade ; Feel Good Hit Of The Summer (Reprise) ; Tension Head ; Lightning Song ; I Think I Lost My Headache

 

En 2000, le Stoner rock se porte bien. Dans la lignée poussiéreuse de Kyuss, des dizaines de groupes se sont engouffrés. Bières, soleil de plomb, rythmique enfumées, guitares lourdes. Tous ces groupes, parfois emmenés par des anciens de Kyuss (Unida ; Hermano ; Fu Manchu) en font leur credo. Mais dans le désert de Palm Beach, un Homme fourbit ses armes. Joshua Homme, apathique rouquin qui officiait déjà dans Kyuss. A grands coups de riffs lourds, de rythmique implacable et de marijuana, un groupe nouveau nait. Une tribu du stoner même, plus qu’un réel groupe : Queens of The Stone Age. Après un premier album éponyme tout à fait correct qui acquitte son tribut à son ancien groupe, Josh Homme est rejoint par de vieux compères de route. Nick Olivieri, ancien de Kyuss, intègre le groupe en tant que bassiste pour la tournée du premier album. Mark Lanegan, ancienne icône grunge à la voix rauque et déglinguée se joint aussi à cette étrange galerie de gueules cassées. Il y retrouve des gens comme Dave Catching ou Chris Goss, qui a lui aussi travaillé avec Kyuss, Screaming Trees (tiens tiens…) ou Stone Temple Pilots. Même les glorieux anciens passent le temps d’une chanson auprès de la tribu d’Homme, comme c’est le cas de Rob Halford, charismatique chanteur de Judas Priest. Les Queens Of The Stone Age ainsi parés n’ont plus qu’à poursuivre leur route, implacablement. Ce qu’ils font, à grands renforts de drogues en tout genre, en enregistrant leur second album, qui parait le 6 juin 2000. Rated R. Littéralement interdit aux mineurs. On ne peut pas dire que le groupe n’avait pas prévenu.

 

L’introduction, Feel Good Hit Of The Summer enfonce un clou chauffé à blanc dans le cercueil. Ce morceau n’est qu’une longue énumération de produits stupéfiants, qu’Homme déclame d’une voix apathique et narquoise. A Palm Beach comme bien des trous paumés du monde, on supporte la vie à grand coups de substances en tout genre. Nicotine, valium, vicodine, ecstasy et alcool. Un peu de cocaïne pour rompre la monotonie de la vie et vous obtenez le cocktail parfait de ce morceau d’ouverture, apathique sur les couplets et explosif sur les refrains (où la cocaïne est à l’honneur). Les guitares lourdes, la voix d’Homme, les chœurs (où on retrouve Rob Halford), le riff de basse enfumé et le solo frénétique font de ce court morceau d’intro (2min43), un hymne jouissif à la défonce. Telle une trainée de poudre, l’album est prêt à s’enflammer.

 

Pourtant The Lost Art Of Keeping A Secret pourrait s’apparenter à une ballade. Et est surtout un putain de bon morceau, doublé d’un tube. Ce fut d’ailleurs le premier single de l’album, et on comprend aisément pourquoi. C’est ici que Queens of the Stone Age marque sa différence avec le reste de la nébuleuse stoner dont Homme réfute même jusqu’à l’appellation. Son chant doux et plus fluet (comparez avec John Garcia ou même Lanegan) fait des merveilles sur cette ballade très classique, où les guitares sont reléguées en arrière plan. La structure pop du morceau, son refrain doux et accrocheur, le son des guitares… Tout est sublime ici.

 

Le disque repart ensuite vers des horizons plus enfumés et plus psychédéliques. Tel un mirage suscité par la chaleur, c’est un sacré morceau, Leg Of Lamb qui apparaît. Le riff se fait robotique et lourd, un peu répétitif et le chant d’Homme se fait un peu désincarné. Pas de quoi se relever la nuit, mais un bon morceau avec un final assez pop appréciable. Avec Monsters In The Parasol, on tient ici les morceaux (hors ceux d’Olivieri) que j’aime le moins du disque, mais ils dégagent une franche honnêteté appréciable.

 

Auto Pilot est justement un des trois morceaux chantés par Nick Olivieri sur la galette. Il est de loin le meilleur des trois à mon gout. Planant et faisant là encore clairement référence à la drogue (le pilote automatique évoque la perte de contrôle lorsque le produit agit), ce morceau lancinant aux guitares psychédéliques et au rythme lent est tout bonnement excellent. Ce n’est malheureusement pas le cas des deux autres morceaux chantés par Olivieri, Quick And To The Pointless et Tension Head. Deux courts morceaux (1min42 et 2min52) aux relents punks hardcore clairement assumés. Je les trouve criards et parfaitement insupportables. Les deux points noirs du disque.

 

Mais ce sont bien les seuls. Car tout le reste du disque est ahurissant. A commencer par Better Living Through Chemistry, véritable invitation au voyage dans les paradis artificiels. Ce long morceau (5min49) est planant à souhait, notamment grâce à l’écho dans la voix d’Homme qui semble complètement planer au dessus de l’auditeur et grâce au son des guitares, acide à souhait. Tel un buvard, ce morceau emmène l’auditeur loin, très loin… Et le solo de guitare qui fait le pont, aigu et agressif pourrait faire virer le voyage au bad trip, mais au final il n’en est rien… Il est définitivement meilleur de vivre grâce à la chimie.

 

In The Fade est un autre morceau de grande classe. Notamment parce qu’il accueille au chant Mark Lanegan, ancien chanteur de Screaming Trees. Sa voix rauque et éraillée, reconnaissable entre mille, apporte un cachet immédiat à ce morceau. Sans lui le morceau serait bon, mais sans plus. Grâce à sa présence, cette ballade devient crépusculaire et son atmosphère menaçante et belle. Son rythme lent, ses guitares lourdes sans être étouffantes, tout est réuni pour faire de cette chanson un des piliers du disque. A noter la reprise très courte de 34 secondes de Feel Good Hit of The Summer à la fin.

 

Le trip se conclue avec deux de ses meilleurs moments : l’instrumental Lightning Song et I Think I Lost My Headache. Le premier est un court (2min10) intermède à la guitare acoustique 12 cordes soutenu par de discrètes percussions. L’ensemble composé par Dave Catching sonne très hippie… Mais je ne m’en plains pas tant c’est plaisant et audacieux de placer ce genre de morceaux sur un tel album. Un peu comme les perles acoustiques de Led Zeppelin. La conclusion est assurée par I Think I Lost My Headache. Le meilleur morceau du disque. Le préféré d’Homme aussi. Et on le comprend aisément tant ce titre au riff lourd et poisseux dégage une ambiance angoissante et sombre. Les paroles, qui traitent de la paranoïa sont à l’avenant. Le trip est fini. La descente se fait angoissante. Et lorsqu’on bout de 4min30 le morceau se met à accélérer comme un manège qui s’emballe, le retour d’acide semble prendre forme. Jusqu’à ce qu’une fanfare vienne se joindre au groupe et se fasse de plus en plus stridente. Une fin en fanfare. La pilule nous emmène dans un cauchemar paranoïaque. Clap de fin. Rated R. Interdits aux biens pensants. Nous étions prévenus.

 

Ce sur quoi nous étions moins prévenus, c’est sur la qualité de ce disque. Qui est à mon gout le meilleur de Queens Of The Stone Age. Concis et percutant, ce disque contrairement aux autres du groupe n’a que très peu de temps morts. Tout au plus Leg Of Lamb et Monsters In The Parasol sont anodins, et Quick And To The Pointless et Tension Head vraiment désagréables. Mais pour le reste, ce voyage vers les paradis artificiels est parfait. Des deux bombes d’intros Feel Good Hit Of The Summer ; The Lost Art Of Keeping A Secret à Better Living Through Chemistry ; In The Fade et I Think I Lost My Headache, le groupe enchaine ici les bons morceaux comme s’enchainent les pilules de toute sorte. "RESTRICTED TO EVERYONE, EVERYWHERE, ALL THE TIME" dit la pochette. Comme toute censure, celle-ci est faite pour être violée allègrement, avec une jouissance décuplée.

 

16,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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