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21 août 2013 3 21 /08 /août /2013 14:03

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/8/85/Nirvana-Incesticide.jpg

 

Tracks : Dive ; Sliver ; Stain ; Been A Son ; Turnaround ; Molly’s Lips ; Son Of A Gun ; (New Wave) Polly ; Beeswax ; Downer ; Mexican Seafood ; Hairspray Queen ; Aero Zeppelin ; Big Long Now ; Aneurysm

 

Qui aurait pu parier sereinement sur l‘avenir de Nirvana en 1990 ? Peu de gens, je suppose. Car si Nirvana - Bleach (1989) n’est pas un mauvais album (loin de là), il est loin d’être annonciateur de la légende que deviendra le trio de Seattle quelques années plus tard. Et pourtant, il faut saluer le flair des gens de chez Geffen, suffisamment habiles pour débaucher Nirvana du petit label indépendant Subpop, qui détenait les droits des premiers enregistrements de Nirvana. La major fut en outre suffisamment intelligente pour allouer au groupe les services du producteur Butch Vig. Ce qui malgré les protestations des fans et de Cobain, n’est ni plus ni moins qu’un éclair de génie.

 

1991 : la tournade Nevermind est passée. Emmené par quatre singles majestueux (Smells Like Teen Spirit ; Come As You Are ; Lithium ; In Bloom), le disque cartonne et remet le rock à guitares à la mode pour de longues années. Pourtant l’histoire de Nirvana, et à fortiori du grunge, n’a pas commencé avec Nevermind, ou même Ten de Pearl Jam. Bien vite, les fans du trio formé par Kurt Cobain, Krist Nosovelic et Dave Grohl s’intéressent aux premiers enregistrements du groupe, gravés chez Subpop. Bleach bien entendu, mais pas uniquement. Des pirates sur les premiers enregistrements du groupe se mettent à circuler sur le marché noir. Au grand désarroi de Cobain qui juge ces bootlegs de mauvaise qualité, et prend la décision de publier officiellement une compilation qui regrouperait divers enregistrements de l’époque Subpop, ainsi que certains de chez Geffen. Le label indépendant ne se fait pas prier et très vite un accord est trouvé. La compilation, nommée Incesticide est publiée le 14 décembre 1992 sous une pochette dessinée par Cobain, et un an après Nevermind, vise à poursuivre la folie Nirvana. Avec succès ?

 

De manière très normande, je dirais oui et non. Car Incesticide est clairement un disque de transition pour Nirvana, qui ne l’a d’ailleurs pas pensé en tant qu’album. Il y a de tout ici, des morceaux relativement expérimentaux aux bombes pop-grunge que le groupe enfilait comme des perles entre 1991 et 1994. Le début du disque fait d’ailleurs la part belle à des morceaux qui auraient pu faire des singles tout à fait satisfaisants. Derrière la production lourde de Butch Vig et ses grosses guitares, Dive est par exemple un morceau plutôt bien écrit, assez lancinant et plaisant. Il aurait pu se trouver sur Bleach, mais il annonce quelque part déjà la suite de ce que sera Nirvana : un groupe de pop qui se cache derrière de grosses guitares.

 

Une impression renforcée par les morceaux suivants, le tubesque Sliver en tête. Là clairement, ce titre aurait pu se trouver sur Nevermind ou In Utero. C’est une véritable bombe pop, bien composée (ce refrain !), porté par une très bonne ligne de basse et où la rage du groupe, conjuguée au texte très personnel de Cobain (qui évoque ici le divorce de ses parents) fait littéralement des merveilles. Un clip fut même tourné pour ce morceau, mais ne fut jamais utilisé, et c’est bien dommage tant il mérite de figurer parmi les meilleurs titres du combo. On le retrouve d’ailleurs sur le best-of, ce qui est on ne peut plus logique. Une des pépites cachées du groupe.

 

Il en va de même pour Been A Son, morceau assez bref et peu connu du trio, mais qui est clairement excellent. Tout comme Sliver, ce morceau est clairement pop : le refrain est dévastateur, se retient vite et bien, et les instruments sont bien équilibrés entre guitares lourdes et rythmique carrée (notamment la batterie assurée ici par Dave Grohl). Le chant de Cobain achève de nous conquérir sur ce titre enregistré le 9 novembre 1991 à une BBC Session pour Mark Goodier. Aneurysm, qui conclut le disque et qui a été enregistré lors de la même session démontre bien qu’au-delà de ceux de Nevermind, Nirvana avait composé un bon nombre de très grands morceaux en 1991.

 

La compilation est aussi complétée avec trois reprises, jouées lors d’une autre BBC session du 21 octobre 1990 pour le légendaire DJ anglais John Peel. Il s’agit de Turnaround (du groupe Devo), de Molly’s Lips et de Son Of A Gun des Vaselines. On le sait, Nirvana a été doué tout au long de sa carrière pour faire des reprises. C’est le cas sur Nirvana - Unplugged In New York (1994), mais c’est aussi déjà le cas ici. Ces reprises sont extrêmement plaisantes, notamment la très belle et très connotée Molly’s Lips qui semble parler de drogue. Son of A Gun est aussi un très bon morceau, et au final le moins qu’on puisse dire, c’est que Nirvana était très à l’aise pour jouer les morceaux des Vaselines (Jesus Doesn’t Want Me For A Sunbeam sur l’Unplugged est aussi d’eux) !

 

La suite se fait avec une version alternative de Polly assez intéressante, plus rapide et électrique que celle de Nevermind mais qui est à mon sens inférieure à l’originale ou à celle de l’Unplugged.

 

Le dernier tiers du disque (Aneurysm excepté) est composé de six morceaux assez punks dans l’âme, enregistrés entre janvier 1988 (Beeswax ; Downer ; Mexican Seafood ; Hairspray Queen et Aero Zeppelin) et les sessions de Bleach en décembre 1988 et janvier 89 (Big Long Now). Je dois bien avouer que c’est à ce moment là que je décroche d’Incesticide. Cette facette punk et juvénile de Nirvana ne me passionne pas outre mesure, à l’exception du lancinant et intéressant Big Long Now, qui aurait vraiment pu se trouver sur Bleach. Un album que je n’apprécie pas outre mesure, même s’il reste tout à fait correct. Et ces morceaux du début de Nirvana sont à mon gout assez laborieux et au final assez dispensables, à moins d’être un fan absolu du combo…

 

Voilà qui gâche donc un peu mon appréciation globale d’Incesticide. Ce qui est dommage. Car clairement, on a affaire ici à une bonne compilation, complète et instructive, mais qui bat un peu le chaud et le froid. D’un coté, il y a de vrais bons morceaux, notamment ceux enregistrés après 1990, et quelques pépites méconnues du groupe (Sliver ; Dive ; Been A Son ; Aneurysm). Les reprises sont aussi extrêmement agréables. D’un autre coté, la compilation couvre les premiers enregistrements du trio, et là clairement j’en suis moins friand. Néanmoins, si Nevermind et In Utero restent largement meilleurs, un amateur du groupe gagne clairement à poser une oreille sur Incesticide, tant il contient de bonnes choses. Pour fans.

 

13/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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7 juillet 2013 7 07 /07 /juillet /2013 04:13

 

Tracks : I Wear Black ; Drop Dead Baby ; High School ; Ramona ; Doctor Doctor ; Bikini Babes ; Take Up Thy Stethoscope And Walk ; Reverse Shark Attack

 

L'histoire de ce disque commence vers 2004, sur les bancs d'un lycée de Laguna Beach en Californie. C'est dans ce lycée que deux adolescents se rencontrent et décident de former un groupe, qu'ils appellent Epsilons. La bande de lycéens enregistrât trois albums, trois décharges soniques de punk juvénile qui allaient marquer les esprits, jusqu'à ce que les deux adolescents repartent chacun de leur coté, vers 2007. Dans des groupes différents. Pourtant Ty Segall et Mikal Cronin ne devaient pas en rester là. Quelques mois plus tard, tandis que Ty commence à percer en solo avec son premier album éponyme et Lemons, il retrouve Mikal et décide d'enregistrer un disque en collaboration avec celui qu'il appelle son « frère musical ». En ressort en cette année 2009 Reverse Shark Attack dont la loufoque (et laide) pochette reflète la folie créatrice et la complicité qui règnent entre ces deux jeunes hommes durant l'enregistrement.

 

Lorsqu'I Wear Black se lance, on se dit que ce disque collaboratif est définitivement placé sous le signe de la folie. On est pourtant habitué au travail en solo ou en groupes des deux énergumènes, qui n'ont pas livré les disques les plus sains d'esprit de ces dernières années. Mais là dès l'entame, on sent que ce disque sera aussi barré que sa pochette. C'est bien simple : le son est dégueulasse et incroyablement tordu, psychédélique à souhait. A vous faire passer un morceau des Seeds pour une ballade des Beatles.

 

Et ça ne va pas en s'arrangeant tout au long de la face A du disque (qui va jusqu'à Take Up Thy Stethoscope And Walk). Drop Dead Baby, au titre si charmant, donne en effet l'impression d'avoir été enregistré au fin fond d'un caverne, tant la rythmique s'assimile à grondement ténébreux. Le terme garage-rock prend ici tout son sens, bien plus que chez certains poseurs. Le chant, assuré par Segall et Cronin semble faire revenir d'outre tombe le spectre de Lux Interior, le chanteur des Cramps décédé la même année. Il est littéralement possédé, caverneux et sombre, et surtout incroyablement distordu et empli d'écho. Ce chant, ajouté à la section rythmique brutale et étouffée et aux guitares noyées sous la fuzz et la distorsion crée une ambiance de folie sur l'ensemble de ces morceaux garage-punk de la face A.

 

Tous ces morceaux sont d'ailleurs très courts et extrêmement brutaux. Le plus long, en dehors de Take Up Thy Stethoscope And Walk, fait 2min20 environ, et certains tournent autour d'1min30 (Ramona ; Doctor Doctor ; Bikini Babes). Pas de chichis ici, pas de préliminaires. La plus pure tradition punk. Tout est joué pied au plancher, potards à fond, six décharges de garage psychédélique d'une sauvagerie assez difficile à comprendre, surtout en 2009.

 

La seule petite accalmie de la face A est finalement située à la fin avec la reprise de Take Up Thy Stethoscope And Walk, morceau issu de Pink Floyd - The Piper At The Gates Of Down (1967). Si convoquer ici l'esprit de Roger Waters est plutôt surprenant, on constate le bon goût de ces deux jeunes gens qui livrent une reprise légèrement plus longue et plus garage que l'originale, mais qui reste très fidèle à l'esprit psychédélique du Floyd originel. C'est d'ailleurs de loin le meilleur morceau de la face A, même si I Wear Black ou Bikini Babes sont tout à fait sympathiques dans leur genre.

La face B du disque est quant à elle occupée dans son intégralité par un seul morceau, qui donne son nom au disque, Reverse Shark Attack. Si la face A qui fait approximativement une bonne quinzaine de minutes était constituée de six décharges de garage hyper violentes et d'une reprise, Reverse Shark Attack prend lui le contrepied en proposant une sorte de mini symphonie garage-surf de plus de 10 minutes.

 

Le morceau est en effet divisé en plusieurs segments qui alternent les différentes ambiances. Si le début commence de manière extrêmement psychédélique et lourde, le morceau se calme assez vite vers 1min30 pour tourner à la ballade surf psychédélique au son de guitare très proche de celui des années 60. Le chant très clair et la mélodie très pop de ce segment font d'ailleurs penser à une collaboration ultérieure de Ty Segall avec White Fence : Ty Segall & White Fence - Hair (2012). C'est vers 3min50 que le titre redevient plus étrange, sans pour autant redevenir sauvage et il semble se conclure dans un fracas de guitare vers 5min30. Fausse alerte, car c'est à ce moment qu'un riff très surf-rock et une batterie très énergique entrent en scène. Ce segment, qui est probablement le meilleur du morceau évoque très clairement le générique de Pulp Fiction (on peut aisément crier au plagiat à partir de 7min20) et conclut très efficacement et énergiquement ce morceau et le disque qui porte son nom.

 

Reverse Shark Attack vaut donc principalement pour son morceau titre, soyons clair. Cet album n'est en effet pas un des meilleurs disques produits par Ty Segall ou même par Mikal Cronin (qui a à son actif des disques solo très sympas). Les deux amis ont même produit bien mieux ensemble (Slaughterhouse avec le Ty Segall Band). Car ce disque, s'il propose un très bon et long morceau en face B et une reprise de Pink Floyd très efficace n'est qu'un concentré de courts morceaux garage-punk vite lassants. Sa brièveté, ainsi que son excellent morceau titre lui donne tout son attrait. A ne réserver qu'à un public très amateur de garage donc, ou aux fans de Ty Segall et de Mikal Cronin qui n'y bouderont pas leur plaisir.

 

12,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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15 mai 2013 3 15 /05 /mai /2013 15:31

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Dans la grande famille des groupes garage de San Francisco, deux noms ressortent le plus souvent : Ty Segall, la star montante de 25 ans, et les gourous de cette scène, Thee Oh Sees, menés par le charismatique guitariste John Dwyer, qui est aussi le fondateur du label Castle Face Records, qui héberge l'immense majorité des groupes de garage de la ville. Inutile de dire que voir Thee Oh Sees ou Ty Segall à un prix modéré à quelques minutes de chez moi était de l'ordre de l'impensable. Et pourtant...

 

Pourtant Thee Oh Sees est venu avant-hier poser ses valises au Temps Machine à Joué-Les-Tours dans la banlieue de Tours pour un concert qui devait rester dans les annales. Accompagnés d'Enablers et d'un autre groupe du label In The Red Records, The Intelligence, les Thee Oh Sees avaient pour mission de littéralement dynamiter la salle, sous peine de faillir à leur excellente réputation scénique. Et à l'engouement que leur musique suscite chez votre humble serviteur.

 

C'est Enablers qui démarre le bal dans le club du Temps Machine. Le duo américain, formé d'un chanteur/hurleur/poète et d'un guitariste électrique, dégage une aura particulièrement étrange... D'ailleurs, je dois bien avouer que je n'ai absolument rien compris à ce concert. Les hurlements du chanteur, complètement en transe (et probablement très chargé) semblaient n'avoir aucun rapport avec l'ambiance de la guitare et l'ensemble sonnait particulièrement minimal et assez cacophonique finalement... Il a fallu attendre les quatre derniers morceaux où un batteur présent dans le public est monté sur scène pour qu'enfin l'ambiance décolle un peu... Sans pour autant me convaincre. Même l'ajout de deux guitaristes supplémentaires sur les deux derniers morceaux (le groupe comptant trois guitares, une batterie et un chanteur au final), s'il apportait indéniablement une ambiance psyché plus plaisante, n'a pas suffi à me convaincre. Non vraiment, ce concert devait être trop extrême et cérébral pour votre humble serviteur...

 

La suite de la soirée se passait dans la grande salle du Temps Machine, d'une taille bien plus adaptée pour recevoir les deux groupes de San Francisco. C'est le quatuor The Intelligence qui a ouvert le feu en premier. Signé sur In The Red Records, le groupe mené par Lars Finberg, chanteur/guitariste tiré à quatre épingles ressemblant à Tintin (et portant une sangle de guitare au motif du drapeau français) et qui s'avère être aussi le deuxième batteur de Thee Oh Sees est bien conforme à ce qu'on peut attendre d'un groupe de ce label. Le son est du pur garage rock, mâtiné d'un peu de pop et de surf rock (l'influence d'un groupe comme les Thrashmen me semble indéniable). Les morceaux ne dépassent pas souvent trois minutes au compteur et sont joués pied au plancher dans une urgence qui se communique vite à l'ensemble de la salle. L'ambiance monte vite au gré de la succession de morceaux parfois très lo-fi, malgré un coté nettement plus pop que certains de leurs comparses de label (Thee Oh Sees en tête). C'est efficace, carré, certains titres trouvant parfois une touche un peu plus psychédélique et durant un peu plus longtemps en bouche, et clairement, ce groupe sait y faire. Entre garage, pop, surf-rock, ce groupe au son légèrement sale livre une prestation impeccable. Une première partie de choix pour la bande de John Dwyer. L'album Fake Surfers, très psychédélique et lo-fi, est tout à fait recommandable même s'il ne correspond qu'assez peu à la prestation que j'ai vu.

 

C'est finalement Thee Oh Sees qui prend le relai après la bière réglementaire dans une salle déjà bien chauffée par The Intelligence. Les quatre musiciens se placent très près du bord de la scène (avec la batterie placée au milieu du groupe, au premier rang, ce qui est assez rare comme configuration), et se lance d'entrée de jeu dans un set furieux avec The Dream, un des meilleurs morceaux de leur album référence, Carrion Crawler/The Dream. Si la salle avait déjà été bien amadouée par The Intelligence, ce premier morceau des Oh Sees va littéralement la chauffer à blanc. C'est bien simple, dès les premiers accords du morceau, tous les premiers rangs se sont lancés dans une danse frénétique, pogotant et slamant à qui mieux, comme si une immense transe frénétique commençait. C'était le cas quelque part.

 

Le charisme de John Dwyer, grand californien blond habillé comme un sac et tatoué de partout est évident. Son chant strident avec beaucoup d'onomatopées, bien aidé par le contrepoids du chant de la claviériste Brigid Dawson rend le concert d'emblée complètement taré. Ce chant dingue, entre glapissements, chœurs enfantins et cris instaure une ambiance de folie complètement communicative, qui rappelle d'ailleurs un peu les Cramps. Le jeu frénétique du batteur et les riffs épileptiques des guitares (dont une sonne très bas, remplaçant ainsi la basse), tranchants comme des rasoirs font le reste. On a affaire à un gang de grands malades. Et ce soir, personne ne devait ressortir sain d'esprit de ce concert. On remerciera d'ailleurs le Temps Machine d'avoir laissé le groupe jouer à un volume sonore très appréciable (c'est à dire fort pour ce genre de musique).

 

Passer le préliminaire épileptique et métallique du premier morceau (une putain de claque dans la gueule de 8 minutes environ), les Oh Sees ne vont pas lâcher le morceau. Chaque (long) morceau est plus déjanté, psychédélique et tranchant que le précédent. Le public ne s'y trompe d'ailleurs pas, et chaque moreau est accueilli par des cris, de gentils pogos et des danses plus frénétiques les unes que les autres. Il est strictement impossible biologiquement de ne pas sentir son corps réagir à cette musique. Le public va d'ailleurs improviser pendant un morceau une chenille (ça doit être la french touch) et même une pyramide humaine qui fera bien marrer le batteur... Beaucoup de morceaux de Floating Coffin, leur dernier très bon disque en date (sachant que ce groupe sort au strict minimum un disque par an, parfois deux), sont incorporés dans la setlist, notamment I Come From The Mountain, Minotaur, Toe Cutter et dans mon souvenir Strawberries 1+2 (je ne mettrai pas ma main à couper sur ce dernier ceci dit). Et tous ces titres sont brillants et se mélangent très bien avec quelques titres plus anciens (enfin qui ont deux ans) comme ceux issus du génial Carrion Crawler/The Dream, tels que Contraption/Soul Desert.

 

La frénésie du concert est encore renforcée lorsque le chanteur de The Intelligence, Lars Finberg vient installer une deuxième batterie pour accompagner le groupe pour environ la moitié du show. Deux batteries, deux guitares affutées comme des rasoirs, une percussionniste/claviériste/chanteuse et la fièvre n'en finissait plus de monter.

 

Non vraiment, même si je n'ai malheureusement pas trouvé de setlist sur le net, ce show avait vraiment tout d'un immense concert (peut-être le concert de l'année pour moi? Pour le moment, c'est sur). Aucun temps mort là dedans, une musique complètement folle et idiote et donc complètement jouissive, des musiciens qui sont visiblement contents d'être là (Dwyer semblait bien tripper à dire « merci beaucoup » en français), que demander de plus? Rien. En 2013 le garage rock se porte définitivement bien. Et que ce soit sur scène ou sur disque (l'achat de Floatting Coffin en vinyle à la fin du concert me le confirme), les groupes de San Francisco sont définitivement les plus excitants du moment avec Tame Impala, Jim Jones Revue, Jacco Gardner ou Pond. J'attends le nouveau Ty Segall avec d'autant plus d'impatience, sachant que le bonhomme sera avec White Fence et Thee Oh Sees à Paris en juillet. Ce sera peut-être définitivement le concert de l'année, mais pour le moment, je me contenterai de remercier le Temps machine d'avoir programmé Thee Oh Sees à coté de chez moi. Merci pour la claque, je reviendrai.

 

Moi-même.

 

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 14:29

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Tracks : Carry Home ; Like Calling Up Thunder ; Brother and Sister ; Run Trough The Jungle ; A Devil In The Woods ; Texas Serenade ; Watermelon Man ; Bad Indian ; John Hardy ; The Fire Of Love ; Sleeping In Blood City ; Mother Earth

 

Après une décennie marquée par l'explosion du hard-rock sur les cendres du blues (Black Sabbath ; Led Zeppelin), ce dernier revient au premier plan dans les années 80 entre les mains de quelques virtuoses texans, comme ZZ Top ou Stevie Ray Vaughan. Ces texans reprenaient les choses là où le british blues les avait laissées 10 ans plus tôt (Clapton ; John Mayall ; Les Rolling Stones). Pourtant la fin des années 70 a aussi été marquée par un autre phénomène, très différent, voire opposé à ce blues virtuose : le punk. Musique noire contre musique blanche. Musique rurale contre musique urbaine. Et pourtant, un groupe, surgi de nul part en 1981 a réussi à concilier le blues et le punk, dans une célébration païenne loin de la technicité du blues texan. The Gun Club - Fire Of Love (1981) n'est pas un disque de virtuoses. Les membres du Gun Club sont loin du feeling superbe d'un Stevie Ray Vaughan. Mais le mélange du « do it yourself » du punk, de leur amour du blues et le charisme vocal et physique de leur leader Jeffrey Lee Pierce suffisent à injecter du renouveau dans le blues en ce début d'années 80. Fire Of Love hantera longtemps l'inconscient de l'underground américain... C'est d'ailleurs fort du soutien de cet underground américain, notamment grâce aux membres de Blondie (dont Jeffrey Lee Pierce a été le président du fan club de Los Angeles), que le Gun Club retourne en studio en 1982 pour enregistrer le successeur de Fire Of Love. Avec comme producteur Chris Stein, guitariste de Blondie, et avec Debbie Harry dans les chœurs (sous le pseudonyme de D.H. Laurence Jr.), le groupe enregistre donc Miami, paru en 1982. De quoi poursuivre avec succès cette union contre nature entre blues et punk enfantée avec The Fire Of Love?

 

Le titre de cet album indique clairement la direction du voyage. Plein sud. Vers le bayou de Floride, dans cette moiteur étouffante dans laquelle le blues a vu le jour. C'est là que le groupe puise à nouveau son inspiration pour Miami. Mais là où Fire Of Love ressemblait plus à une messe noire hallucinée et hallucinogène perpétuellement sur le fil du rasoir (She's Like Heroin To Me ; Sexbeat ; Preaching The Blues...), Miami semble se diriger vers une musique plus profonde, plus lourde et probablement plus poisseuse. Comme la moiteur d'un marais... Aux cotés des spectres des bluesmen et des visions hallucinées procurées par les drogues et l'alcool, le Gun Club convoque désormais d'autres groupes, qui ont plus ou moins évoqué par le passé ce sud des États-Unis. On pense à Creedence Clearwater Revival dont le Gun Club reprend ici Run Trough The Jungle de manière extrêmement compacte et hallucinée (les hululements de Pierce). Une reprise valant bien l'originale. On pense aussi aux Doors plusieurs fois, avec un Jeffrey Lee Pierce qui assez étonnamment vu son registre vocal, s'impose comme le digne successeur de Jim Morrison sur le sublime final Mother Earth. La steel guitare, très léchée sur ce titre rappelle un peu Enio Morricone et mélangé avec la voix enfin apaisée de Pierce, elle donne un morceau qui est tout simplement époustouflant de poésie et est le meilleur du disque... Le groupe convoque aussi dans ce grand rituel païen Jody Reynolds, chanteur de rockabily qui avait écrit en 1958 The Fire Of Love, morceau qui a donné son titre au premier album du Gun Club (c'est d'ailleurs étonnant de mettre ce titre sur Miami). Le groupe conserve en partie le groove troglodytique de l'originale, tout en imposant le son de guitare si caractéristique de Ward Dotson et en enlevant le coté glamour dans le chant de Reynolds. Dans une transe punk sous mescaline, le groupe transfigure aussi totalement le morceau traditionnel John Hardy. Un titre qui convoque là encore le poids de la tradition, tout en la transformant totalement (il ressemble beaucoup à ce qu'on peut trouver sur l'album précédent).

 

Miami n'est cependant pas qu'un disque hommage à l'histoire de la musique américaine. Car parfois le Gun Club ne ressemble qu'à lui-même, et les chansons en gardent toute leur force. Difficile en effet de ne pas chavirer devant les sonorités de steel guitare absolument superbes de Texas Serenade permettant à Pierce de psalmodier et d'incanter de sa voix hallucinée... Difficile aussi de ne pas totalement être subjugué par la transe de Watermelon Man, un des meilleurs titres de l'album et qui est emmené par un violon et des congas qui donnent une atmosphère très angoissante et poisseuse à ce morceau. Un joyau noir directement issu du marais... Et comment ne pas citer le sublime titre d'ouverture Carry Home (et le morceau suivant Like Calling Up Thunder) qui est probablement un des meilleurs du groupe et qui nous marque au fer rouge dès la première écoute?

 

Parfois le groupe renoue avec ses racines punk et se contente de nous cracher un rock survitaminé et assez basique pendant 3 minutes (Bad Indian ; Sleeping In Blood City). Mais même là, le groupe garde un style inimitable qui fait que malgré la simplicité des morceaux (qui sont probablement les moins bons de l'album), on ne s'ennuie pas, notamment grâce au chant de Pierce. Idem pour A Devil In The Woods qui n'est pas exceptionnel mais parvient néanmoins à nous tenir en haleine grâce aux hululement du chanteur et à une ligne de basse très dense et efficace.

 

Pas de quoi ternir l'éclat de ce Miami donc. Après le coup de force d'un premier album dévastateur, le Gun Club s'offre en effet le luxe de faire un deuxième album différent, plus dense, mais quasiment aussi parfait que son prédécesseur. Car si je préfère de peu The Fire Of Love, Miami s'impose en effet comme un autre chef d'œuvre à mettre sur le compte de Jeffrey Lee Pierce et les siens. Entre tradition et modernité, le groupe inventait pour la deuxième fois un son unique qui allait faire des émules par la suite (White Stripes ; Nick Cave ; Black Keys). Avec une élégance et un charisme inimitable.

 

17/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.    

 

 

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15 décembre 2011 4 15 /12 /décembre /2011 17:45

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/5/50/Upthebracket.jpg

 

Tracks : Vertigo ; Death on the Stairs ; Horrorshow ; Time For Heroes ; Boys in the Band ; Radio America ; Up The Bracket ; Tell the King ; The Boy Looked at Johnny ; Begging ; The Good Old Days ; I Get Along ; What a Waster ; Mockingbird/Mayday

 

En février 2002, les Strokes se produisent à Londres. Nouvelle révélation rock venue des États-Unis, le groupe est souvent comparé au phénomène Nirvana, qui a eu lieu 10 ans plus tôt. Et comme Nirvana dans les années 90, les Strokes suscitent des vocations dans leur sillage, comme ce groupe qui fait leur première partie lors de ces shows de février 2002, qui répond au nom de The Libertines. Signé sur le label Rough Trade en décembre 2001, le combo est alors en pleine construction, cherchant à la fois son style musical et son image. Pourtant, se dégage déjà le charisme des deux leaders, Carl Barât et Pete Doherty qui se partagent les guitares et le chant. Ces deux là ne se sont pas appréciés de prime abord. Et leur relation sera une des plus tumultueuse du rock anglais depuis le couple Jagger/Richards. Mais le duo n'en est pas encore là. Il faut attendre une tournée en première partie des Vines au printemps 2002, pour que le groupe (complété avec Gary Powell à la batterie et John Hassall à la basse) commence à vraiment faire parler de lui. La sortie du single What A Waster, produit par Bernard Butler de Suede est une révélation pour l'Angleterre. Sans aucune promotion télévisée, le groupe pourtant indé se hisse jusque dans le top 40 britannique. De quoi faire rêver nos libertins... Et de quoi attirer l'attention d'un des papes du punk Anglais, Mick Jones, ex-guitariste des Clash. C'est avec lui qu'ils décident d'entrer en studio pour élaborer leur premier album, Up The Bracket. Un accouchement au forceps, car Barât et Doherty se disputent et manquent de tout foutre en l'air. Mais finalement, l'album sort le 14 octobre 2002. De quoi devenir pour les Libertines la réponse anglaise au renouveau du rock américain emmené par les Hives et les Strokes?

 

"Not since the Clash has a band evoked so precisely the grime and thrill of young London." écrira Blender Magazine. Il n'y a pas eu depuis les Clash un groupe évoquant aussi précisément la saleté et les frissons de la jeunesse Londonienne. La remarque est judicieuse. Très judicieuse, voire même un peu trop. Car forcément, les comparaisons sont faciles à faire. Rien que les pochettes semblent se répondre (celle-ci montre la police anti-émeute argentine alors que celle des Clash montraientle groupe soudé comme un gang). Et forcément la présence de Mick Jones sur Up The Bracket ne fait que renforcer ces liens entre  The Clash - The Clash (1977) et Up The Bracket.

Mais la comparaison ne tourne vraiment pas en la faveur des Libertines. Pas du tout même. Autant j'adore le premier Clash (peut-être même trop du coup), autant je ne comprends pas le punk-rock mou des Libertines (pardon auprès des fans). L'album ne contient pas la rage et la hargne des grands albums du punk anglais, tout en s'en approchant. Album à guitares, Up The Bracket l'est indéniablement. Ce qui en 2002, n'était pas forcément très courant j'en conviens. Mais le groupe, tout polémique qu'il soit, n'arrive pas à insuffler la formule fougueuse que les Artic Monkeys trouvèrent trois ans après sur leur premier album. Time For Heroes, morceau le plus connu de l'album est en effet vraiment inférieur à I Bet You Look Good on the Dancefloor par exemple. En plus, je ne suis pas un grand fan de la voix de Doherty, même si j'ai étrangement beaucoup aimé son album solo Peter Doherty - Grace/Wastelands (2009) .

 

Une grande incompréhension pour moi donc que cet Up The Bracket, trop mou pour vraiment me séduire comme album de punk-rock, et pas assez travaillé pour me séduire en tant qu'album de rock. Pourtant lorsque le groupe prend le temps de ralentir ou de passer à l'acoustique, comme sur Radio America, je le trouve nettement plus séduisant. Les deux titres Mockingbird/Mayday valent aussi le détour. Mais ce n'est pas assez pour me convaincre. En ce début de millénaire, les Strokes, Muse ou les Arctic Monkeys me plaisaient nettement plus. Et Pete Doherty en solo me plait aussi nettement plus que les Libertines. Comme quoi... je vais me contenter de réécouter le premier album des Clash, et je vais arrêter de m'acharner à essayer de comprendre Up The Bracket.

 

07/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.
 

 

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9 décembre 2011 5 09 /12 /décembre /2011 22:57

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Ici Londres, ou plus précisément, Camden Town.  Un quartier ma foi fort sympathique qui abrite la salle de concert Electric Ballroom. C’est dans cette salle, qui a vu passer The Clash,  Joy Division, U2 et The Red Hot Chilli Peppers, entre autres, que s’est produit Thurston Moore pour interpréter son album Psychic Hearts.  


La première partie du concert est assurée par Head of the Wantastiquet. Derrière ce nom se cache un guitariste solo. Ce monsieur nous offre un seul morceau, mais qui dure une vingtaine de minutes et qui se décompose en plusieurs parties. Le post-rock qui nous est servis est très intéressant et assez difficile à décrire ; faisant parfois penser à du Sigur Ros ou parfois à des styles plus lourds comme on peut rencontrer dans le Collision Tour de Hint vs EZ3kiel. Des connotations orientales viennent également donner à la musique de Head of the Wantastiquet une touche assez particulière. Cette première partie était donc une bonne surprise.


La seconde prestation nous est offerte par les deux chanteurs/guitaristes de Tall Firs ; les deux compères prenant tour à tour la place de chanteur. Bon, je ne vais pas y aller par 4 chemins, je me suis ennuyé durant cette seconde partie. Était-ce dû au style très froid de leur musique et de leurs voix? Au manque d’une vraie base rythmique, comblé un peu en fin de concert par le batteur accompagnant Thurston Moore qui les a rejoints ? Je n’ai pas de vraie réponse. Bref, sans être désagréable, ce n’était pas passionnant.


L’arrivée sur scène de Thuston Moore et de ses comparses est saluée par un tonnerre d’applaudissement. Après une courte explication sur ce qui va suivre (à savoir qu’ils ne joueront pas certains morceaux mais les remplaceront par d’obscures B-sides), le groupe se lance. Dès le début, le ton est donné : oui c’est bien Psychic Hearts mais retouché. En effet, l’absence d’effets sur la voix et quelques arrangements donne une toute autre ambiance aux chansons de l’album. Bien qu’ayant gardé tout son punch d’origine, il donne l’impression d’avoir été mélangé avec les sonorités de Thurston Moore - Demolished Thoughts (2011) . Ce qui donne un son absolument merveilleux, débordant d’énergie et de cette beauté qui caractérise le dernier album. Le jeu scénique n’est pas en reste avec un intenable Thurston Moore, qui renverse son pupitre dès la première chanson mais qui sait aussi se poser lors de chansons plus calmes. Ainsi, on redécouvre les morceaux de cet album comme Pretty bad, Ono Soul, Feathers sous un nouveau jour.


Ce concert a été une excellente expérience que j’aurai vraiment beaucoup de plaisir à retenter si Thurston Moore repasse à Londres. La beauté de ce concert ainsi que sa simplicité en font un moment de rock exceptionnel.


Jid.

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1 novembre 2011 2 01 /11 /novembre /2011 16:36

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Tracks : Teenage Riot ; Silver Rocket ; The Sprawl ; 'Cross The Breeze ; Eric's Trip ; Total Trash ; Hey Joni ; Providence ; Candle ; Rain King ; Kissability ; Trilogy a) The Wonder b) Hyperstation z) Eliminator Jr.

 

Pour certains l'Amérique des années 80 pourrait se résumer à une succession d'images et de clichés qui vus maintenant prêtent à sourire. Ou nous désespèrent, au choix. Ce sont les années Reagan, où Silvester Stallone triomphe au cinéma avec les épisodes les plus écœurants de Rocky ou de Rambo et où Michael Jackson vend des 38tonnes de disques, sans réels concurrents. L'époque où les groupes de pop synthétiques triomphent et où les grands groupes ou artistes de la décennie précédente semblent avoir totalement plongés, engloutis dans cette génération MTV où la musique devient, plus que jamais auparavant, un business. Mais durant les années 80, l'underground américain prépare sa revanche. Dans les bas fonds d'Hermosa Beach en Californie (Black Flag), à Boston (Pixies) ou dans ceux de Seattle (Mudhoney), des groupes massacrent férocement le punk pour en faire un nouveau genre de musique qui triomphera par la suite sous le nom de rock alternatif. Mais parmi tous ces groupes, un a connu un succès bien plus important que les autres : les New-yorkais de Sonic Youth. Lorsqu'ils publient en 1988 leur 5ème album officiel, ils ont déjà plusieurs années de scène derrière eux et ont changés de maisons de disque à plusieurs reprises. Ils ont traversés toutes les années 80 en voyant leur succès grandir peu à peu, tout en dépassant même le cadre de l'underground New-yorkais avec Evol et Sister. Pourtant, l'Amérique semble attendre... Une envie de changement semble flotter dans l'air. Est-ce le sens de ce titre, Daydream Nation? La tornade Nirvana aura lieu dans quelques années, lorsque Smells Like Teen Spirit ramènera le rock au premier plan. Ce cierge unique symbolise t'il la voie artistique que suivront les groupes de Seattle quelques années plus tard?

 

Quelques arpèges de guitares et un murmure de Kim nous accueillent : “You're It/No You're It/Hey, You're Really It/You're It/No I Mean It, You're It”. Murmures annonciateurs de la tornade qui ouvre Daydream Nation : Teenage Riot. Depuis Schizophrenia sur Sister, Sonic Youth a prouvé son don en matière de chansons d'introduction. Mais si Schizophrenia est un chef d'œuvre, Teenage Riot le surpasse encore. C'est bien simple, c'est un des morceaux les plus quintessentiels de Sonic Youth, même s'il n'est pas forcément représentatif de la démarche des New-yorkais. Ces arpèges de guitares et la rage électrique des refrains chantés par Thurston Moore résonnent longtemps, tels le cri d'une génération qui cherche à vivre un autre rêve...

 

Passée cette superbe et mythique introduction, la jeunesse sonique retourne vers ses fondamentaux : ce son saturé et torturé qui a fait le charme d'Evol et Sister. Le son devient plus rêche, plus agressif. Le climat s'assombrit après l'éclaircie de révolte que représentait Teenage Riot. L'ambiance devient plus violente et plus sombre sur Silver Rocket. Thurston Moore chante avec beaucoup plus de rage. Un climat agressif et violent qui se poursuit sur The Sprawl et son passage central bruitiste (3min35) et hypnotique. Comme une ambiance de violence latente qui imprègne ce début d'album surpuissant. Mais c'est une violence qui parfois se fait contemplative. L'assaut est fini (vers la 5ème minute de The Sprawl) et on admire le chant de bataille... On contemple les morceaux des roquettes d'argent explosées. La fin de la révolte adolescente commence déjà ici. Le final n'est que bruits...

 

Ce climat de violence -qui imprègne plus ou moins toute l'œuvre de Sonic Youth- est présent sur tout l'album. Que ce soit sur la longue et énervée 'Croos The Breeze où Kim Gordon tient le chant (hurlé) d'une intensité rare “Let's go walking on the water/ Now you think I'm Satan's daughter“, que ce soit sur la structure assez pop d'Hey Joni (hommage croisé au morceau Hey Joe et à Joni Mitchell) qui est recouverte par la distorsion, ou que ce soit sur la chaotique Rain King, un des morceaux les plus extrêmes du disque, cette violence imprègne complètement Daydream Nation. Sorte de couronnement final à la trilogie entamée avec Evol et Sister, tant la filiation dans le son et cette façon d'utiliser le bruit et le chaos pour créer de la musique est évidente. Sans Evol et Sister, pas de Daydream Nation.

 

Pourtant le groupe comme à son habitude, sait parfois ralentir un peu. C'est notamment le cas ici au cœur de l'album avec Providence et dans une moindre mesure Candle, qui donnera sa pochette au disque. Mais comme toujours lorsque le groupe calme le jeu, l'ambiance n'en devient que plus poisseuse et malsaine. Providence, seul morceau de l'album où un musicien extérieur à Sonic Youth joue et chante (il s'agit de Mike Watt, actuel bassiste des Stooges) est le morceau le plus inquiétant de l'album. Le son semble au bord de la rupture, comme s'il nous parvenait à travers un incendie. Et le piano lugubre et ce chant étrange semble m'évoquer quelqu'un jouant du piano alors même que l'immeuble brule... Autant dire que l'impression laissée par ce magnifique et glauque morceau est garantie. Candle est un peu moins glauque. On retrouve la distorsion ici, mais elle n'enflamme pas le morceau comme elle le fait ailleurs sur l'album. Candle est en réalité le moment le plus doux de Daydream Nation. Et peut-être un des plus beaux aussi, même si rien n'est à jeter ici.

 

Non rien n'est à jeter sur ce double disque. Mais chose encore plus surprenante, le groupe nous a gardé le meilleur pour la fin. Car si Teenage Riot, 'Cross The Breeze ou Candle sont assurément des merveilles, ils s'inclinent devant le monument final de l'album : Trilogy. Le morceau reprend les choses là où le Velvet Underground les avait laissé, 20 ans plus tôt sur The Velvet Underground - White Light / White Heat (1968) . C'est le Sister Ray de l'album. 14 Minutes séparées en 3 parties inégales : a) The Wonder (4min15), b) Hyperstation (7min13) et z) Eliminator Jr. (2min37). Si le final Eliminator Jr. se résume simplement à un final bruitiste et violent, les deux premières parties sont elles parmi les plus beaux moments musicaux gravés par un groupe américain durant les années 80. Une maestria qui surprend, même au milieu du chef d'œuvre qu'est Daydream Nation. Le groupe est ici à son apogée. Tout en tension, mêlant les contrastes sonores, la violence et la douceur, le morceau est la plus belle des conclusions qu'on pouvait imaginer. De quoi faire entrer définitivement dans la légende cette bougie solitaire sur la pochette.

Assurément Daydream Nation fait partie de la légende du rock. C'est le chef d'oeuvre de la carrière de Sonic Youth, courronement logique et mérité de leurs travaux des années 80. Ce disque est très souvent cité dans les listes des plus grands albums de cette décennie, raflant même parfois la première place. Et c'est mérité. Rarement un groupe n'a gravé de double vinyles d'une telle intensité, sans mauvais morceaux. Tout au plus, certains sont un peu anecdotiques (Kissability). Mais aucun n'est mauvais et beaucoup sont tout simplement des merveilles. Daydream Nation, tout comme Evol et Sister est un chef d'oeuvre, supérieur même à ses deux prédecesseurs. Cette trilogie d'albums (tout comme le encore plus sombre Bad Moon Rising) fait de Sonic Youth les descendants logiques du Velvet Underground. Cette influence est d'ailleurs perceptible dans Eric's Trip où on entend un monologue d'Eric Emerson tiré du film Chelsea Girls, d'Andy Warhol. La boucle est bouclée. C'est dire s'ils sont passionnants. Et Daydream Nation est leur meilleur album, même si bien sur, le coté très bruyant rend l'écoute parfois pénible, selon l'humeur de l'auditeur. C'est celui par lequel j'ai découvert le groupe. Et malgré le fait qu'il soit double (et donc assez long), c'est celui que je conseillerais pour aborder le groupe. Un cierge à bruler inlassablement...

 

18/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

 

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17 juillet 2011 7 17 /07 /juillet /2011 20:33

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Tracks : Benediction ; Illuminine ; Circulation ; Blood Never Lies ; Orchad Street ; In Silver Rain With a Paper Key ; Mina Loy ; Space ; January

 

En matière de distorsion et de bruit, difficile de lutter avec le CV d'un homme comme Thurston Moore. Depuis 30 ans, il a mené toutes les expérimentations possibles et imaginables avec son groupe Sonic Youth, mais aussi en solo (Psychic Hearts ; Trees Outside Of The Academy). Cependant, Trees Outside Of The Academy (2007) laissait entrevoir une autre facette de l'homme. Derrière la distorsion et les bruits stridents, derrière les barrières de décibels, Moore commençait à placer des guitares acoustiques, du violon et des accords rappelant nettement plus le folk anglais des années 70 (Fairport Convention, Nick Drake) que la scène indépendante américaine. Et lorsque 4 ans après son deuxième « véritable » album solo (qui ne soit pas une collaboration quelconque en fait), paraît le troisième opus de l'homme à l'éternelle allure d'ado malgré sa cinquantaine, on peut se demander ce qu'il nous réserve. Être le leader d'un groupe aussi expérimental que Sonic Youth permet de pratiquement tout faire, de tout se permettre. Même faire appel à Beck pour produire cet album. Une collaboration étonnante... Mais a-t-elle portée ses fruits sur ce Demolished Thoughts intriguant?

 

Dès Benediction, le ton est donné. Le maitre mot de ces pensées démolies est douceur... Une douceur champêtre et délicate, qui rappelle le folk des années 70, Nick Drake notamment. Les paroles sont mélancoliques et se déroulent le long d'accords acoustiques très folk. Comme un après midi ensoleillé sur une pelouse dans un parc... La beauté de cette guitare acoustique est surtout rehaussée par le sublime violon de Samara Lubelski et la harpe de Mary Lattimore. Lorsque l'on regarde les crédits de l'album, on s'aperçoit d'ailleurs qu'il n'y a pas de guitares électriques ici, ni de batterie. Une basse (Bram Inscore), des percussions extrêmement discrètes (Joey Waronker qui a joué avec Beck, R.E.M., les Smashing Pumpkins ou Atoms For Peace) et Beck lui-même qui fait quelques voix et quelques synthés très discrets accompagnent donc un trio guitare acoustique, harpe et violon tout le long de Demolished Thougths.

 

Des pensées démolies bien loin de la fureur électrique des travaux précédents de Moore donc. Ce qui n'était qu'entrevu dans Trees Outside Of The Academy est ici flagrant : Thurston moore, à l'égal de son modèle Neil Young est capable des déflagrations soniques les plus féroces mais aussi de la douceur enchanteresse la plus pure. Passer d'Everybody Knows This Is Nowhere à After The Goldrush est un art que bien peu maitrisent... Mais Moore lui semble bien décidé à relever le défi avec l'aide de Beck, producteur génial qui donne ce son si unique à la galette. Un son chaud et enivrant, qui nous recouvre et dans lequel chaque détail est magnifiquement niché. Interventions de la harpe, nappes de violons, sifflements (sur Mina Loy), nappes de synthés et écho (sur Space)... Le tout se découvre peu à peu comme des objets cachés dans une herbe un peu trop haute pour tout nous dévoiler au premier regard. Et cette herbe que nous goutons est fortement addictive. Comment résister à la descente de cordes et aux arpèges sublimes d'Illuminine un titre qui s'insinue peu à peu en vous et qui reste en tête pendant des jours? Comment résister au superbe violon qui entame Blood Never Lies et sur laquelle Thurston pose une voix feutrée de toute beauté? L'inquiétante introduction à la harpe d'In Silver Rain With Paper Key qui nous mène vers une incartade ensoleillée? Comment résister au charme vénéneux et exotique de l'inquiétante Mina Loy, poétesse anglaise qui donne ici son nom au meilleur morceau de l'album avec Illuminine?

 

Une beauté conventionnelle qui laisse néanmoins sa place a une fureur bien atypique à l'acoustique, mais qu'on connait bien en version électrique au sein de Sonic Youth. Car Thurston ne peut s'empêcher parfois de lancer ses morceaux dans un déluge de cordes fou qu'on imagine plus facilement amplifié et distordu. Le final de Circulation en est un bel exemple, tout comme le pont et le final de la vénéneuse Orchad Street (qui est une rue de Manhattan), sur laquelle les violons et la harpe deviennent absolument déchainés et déchirants (comme quoi tout est possible). On a dit parfois que le leader de Sonic Youth était incapable de jouer de manière conventionnelle de la guitare acoustique. C'est faux et cet album le prouve. Mais il faut bien reconnaître que comme beaucoup de grands guitaristes, il a un style propre qui se reconnaît très vite, qu'il soit seul à l'acoustique ou derrière un mur d'amplis.

 

« This is a sleeping on the grass » chante Moore sur January. C'est bien l'effet que procure ce Demolished Thoughts magnifique qui est un des meilleurs albums de 2011. Un album surprenant, mais qui redonne tout son sens au mot « beau ». Charmant et charmeur, délicat mais original, surprenant et réconfortant... Autant d'antagonismes que Moore concilie avec brio pour ce troisième album qui prouve une fois encore, si besoin était, qu'il est un grand songwriter, à l'égal de Neil Young. Des pensée démolies dignes des plus grands donc.

17,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.     

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16 février 2011 3 16 /02 /février /2011 17:37

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Tracks : Once ; Even Flow ; Alive ; Why Go ; Black ; Jeremy ; Oceans ; Porch ; Garden ; Deep ; Release

 

Musicalement, Seattle est surtout connu pour deux choses. Pour avoir été tout d'abord le lieu de naissance de quelques grandes rock star, notamment Jimi Hendrix (qui y repose d'ailleurs). Mais la capitale de l'État de Washington est surtout connue pour avoir été le berceau du grunge. C'est dans cette ville qu'à la fin des années 80, une poignée de kids allaient redonner un grand coup de pied dans la fourmilière endormie du rock. Un rock qui en cette fin d'années 80 plie sous le poids des synthétiseurs, de la pop de Prince ou de Michael Jackson, et qui semble avoir laissé les guitares entre les mains des métalleux. La plupart des grands groupes de punk sont morts. Mais ces kids avides de sons lourd qui leur correspondent vont chercher leur inspiration du coté de la scène alternative américaine, ou vers les poids lourds du passé. Mélangeant les Pixies et Black Sabbath, les Stooges et Sonic Youth, Neil Young et la rage des Pistols, plusieurs groupes font naitre un nouveau courant musical, le grunge, qui allait dominer la première moitié des années 90. Le genre est surtout connu grâce à 4 groupes : Soundgarden, Alice In Chains, Nirvana et Pearl Jam. Formé à l'époque d'Eddie Vedder au chant, Jeff Ament à la basse, Stone Gossard à la guitare, Dave Krusen à la batterie et Mike McCready à la guitare soliste, Pearl Jam est avec Nirvana le plus connu du lot. C'est celui qui connut le plus rapidement le succès, dès l'année même de sa formation, grâce à son premier album intitulé Ten. 1991, l'année de l'explosion du grunge. Alors que Nirvana s'apprête à sortir Nirvana - Nevermind (1991) , Pearl Jam fait découvrir le grunge au monde avec Ten. Et 20 après, alors que Nirvana a disparu depuis bien longtemps, qu'Alice In Chains a du changer de visage pour survivre et que Soundgarden se reforme après 10 ans de séparation, Ten reste un incontournable du grunge. Le seul rival éventuel de Nevermind. Un rival sérieux d'ailleurs?

 

Schématiquement, les quatre grands groupes de grunge se répartissent comme ça : Soundgarden est le plus heavy, Alice In Chains le plus métalleux (façon Black Sabbath sous prozac), Nirvana le plus punk (façon Pixies). Et Pearl Jam? C'est probablement le plus rock, puisant son inspiration dans tout ce que le rock, notamment américain, peut offrir. La référence absolue du groupe n'est autre que Neil Young, notamment lorsque ce dernier est accompagné du Crazy Horse (comme sur Ragged Glory sorti en 1990). Neil Young se servira d'ailleurs de Pearl Jam comme backing band pour son album Mirror Ball en 1995, une jolie façon de boucler la boucle. Le groupe cite aussi comme références les Who ou les Ramones, et quelque part un groupe comme Led Zeppelin a du laisser quelques traces sur eux, surtout sur ce premier album. Pearl Jam joue ici un rock puissant et musclé, un peu loin des délires asphyxiants d'Alice In Chains ou de la pop explosive de Nirvana. L'étiquette reste grunge, mais ne reste qu'une étiquette.

 

Car Ten ne ressemble pas vraiment aux autre productions grunge. La voix de Vedder est très puissante par exemple et assez grave. Elle n'est encore pas à son meilleur sur Ten (loin de là), mais déjà Vedder s'impose comme un grand chanteur, très puissant vocalement. De même les guitares sont puissantes, un peu lourdes, et ne sont pas avares de soli, contrairement à Nirvana par exemple. La paire de guitariste est très bonne en effet, et McCready livre parfois de jolis soli. L'ambiance est aussi plus « héroïque » et virile qu'elle ne peut l'être sur Dirt d'Alice In Chains ou sur Nevermind. Oui mais voilà, par rapport à Nevermind, l'album a de gros problèmes. Le premier d'entre eux, et pas des moindres, concerne la production. Je sais que certains détestent la production de Nevermind, mais si on compare les deux, il n'y a pas photo (ou même avec In Utero). Ten a mal vieilli, ce qui n'est pas le cas de Nevermind (de mon point de vue), ou même de Dirt. Les titres paraissent plus plats qu'ils ne le sont vraiment et lorsqu'on écoute d'autres albums de Pearl Jam comme Vitalogy, le contraste est flagrant : Ten est plat, parce que la production a mal tenu ces 20 dernières années. Les versions live des titres sont d'ailleurs assez révélatrices.

 

De même, Ten contient certes de grandes chansons, mais manque un peu de cohérence de bout en bout. Le début est très bon, avec le carré gagnant Once (une bonne intro, très accrocheuse notamment grâce au chant), Even Flow et son riff très musclé (et un joli solo), l'hymne Alive avec son solo prenant et superbe (assurément une des meilleures chansons de l'album) et la magnifique ballade, Black. C'est surement le titre le plus accrocheur de l'album avec Alive, tant il est beau et tant Eddie Vedder chante bien ici. Mais le reste des titres me paraît assez moyen, pour tout vous avouer. Pas mauvais, non. Mais pas transcendant non plus. Est-ce dû à la production? Possible mais certains titres comme Oceans (assurément le plus mauvais de l'album pour moi) ou Deep me font un peu chier. Le reste est correct, mais ne me fait pas rêver.

 

Un album correct que ce Ten donc, même si je ne peux m'empêcher de penser qu'il est un peu surestimé. Est-ce parce que je préfère Nirvana ou Alice In Chains à Pearl Jam? Probable. Cet album a pas mal de concurrents de bon niveau entre Nevermind, In Utero, Dirt ou l'éponyme d'Alice In Chains. Mais en toute honnêteté pour moi, il a aussi de sérieux concurrents dans la propre discographie de Pearl Jam. Je ne peux en effet m'empêcher de préférer un album comme Vitalogy à ce Ten sympathique, mais pas génial pour moi. Pour un premier album, c'est très honnête et ça se laisse écouter. Mais de mon point de vue (qui n'engage donc que moi) je ne crois pas qu'il faille découvrir Pearl Jam par là, malgré le mythe qui entoure cet album.

13,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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12 octobre 2010 2 12 /10 /octobre /2010 22:18

http://www.self-titledmag.com/wp-content/uploads/2009/02/Gun+Club+Fire+of+love.jpg

 

Tracks : Sex Beat ; Preaching The Blues ; Promise ; She’s Like Heroin To Me ; For The Love Of Ivy ; Fire Spirit ; Ghost on the Highway ; Jack On Fire ; Black Train ; Cool Drink of Water ; Good by Johnny

 

Concilier Robert Johnson et Television - Marquee Moon (1977), l’esprit du bayou du sud à l’esprit du CBGB. Convoquer l’esprit de Son House pour jouer aux cotés de fans de Blondie. Autant de contradictions qui donnent naissance au Gun Club en 1979. Autant de contradictions qui reposent sur Jeffrey Lee Pierce, un jeune fanatique de rock assez connu à Los Angeles pour avoir signé quelques chroniques rock dans SLASH magazine et pour être le président du fan-club officiel de Blondie. Lorsqu’il rencontre Kid « Congo » Powers, il l’incite à se mettre à la guitare et à former un groupe de rock. Appelé initialement The Creeping Ritual, le groupe deviendra The Gun Club sur les conseils d’un ami de Jeffrey Lee Pierce. En même temps que ce changement de nom, le groupe (complété de Rob Ritter à la basse et de Terry Graham à la batterie) tournera deux ans dans les clubs de Los Angeles pour peaufiner son répertoire et écrire et tester les chansons qui iront constituer son premier album. Celui-ci sort en 1981 sous le titre de Fire Of Love. La pochette semble mêler punk et vaudou, la révolte sociale des punks blancs et le feeling des plus grands bluesmen noirs. Une cérémonie bien étrange semble nous inviter. Une transe plaisante malgré ses contradictions évidentes ?

 

Sex Beat introduit les bases du groupe, avec un son très reconnaissable. Les guitares sont très punk, sonnant de manière assez sèches et minimalistes. Le plus étrange est peut-être la voix de Lee Pierce, haut perché, semblable un peu à celle de Tom Verlaine dans ses intonations et ses cris (notamment sur le refrain). Une intro sexuelle, étrange et unique qui nous emmène directement dans le bayou…

 

Preaching The Blues revient aux racines blues du groupe en reprenant le maitre lui-même, Robert Johnson (Robert Johnson - The Complete Recordings (1936-1937)). Mais il faut bien admettre qu’on est bien loin du blues originel. Les guitares sont dissonantes, stridentes, sonnant de manière quasi métallique. Le rythme est endiablé comme une transe délirante, une messe vaudou survoltée et trop alcoolisée… Le shaman Lee Pierce éructe et crie, à la limite de la perte de contrôle. Parfois le calme semble revenir, comme si le titre vacillait, épuisé sous les incantations du shaman, mais finit par repartir de plus belle. Une reprise hallucinante de personnalité.

 

Promise Me calme un peu le jeu pour la première fois depuis le début de l’album. C’est le premier titre qu’on ne peut pas qualifier de « punk », mais tout simplement de rock. C’est même presque une ballade après les deux titres précédents, impression renforcée par le violon de Tito Larriva. Mais cette ballade est hallucinatoire, calme, pleine des fantômes du bayou, rappelant presque les Doors par moment (comparaison qui revient souvent avec le groupe).

 

Les choses repartent de plus belle avec She’s Like Heroin To Me. C’est probablement une des meilleures chansons de l’album, notamment grâce à son refrain accrocheur à souhait et la voix de Pierce est encore une fois hallucinante. Les guitares déchirent la trame sonore, et ces 2 min 35 font partie des plus palpitantes de l’album.

 

For The Love Of Ivy m’est peut-être un peu plus étrangère, malgré un certain charme dans l’alternance des moments calmes et des moments nerveux ou le chant se fait venimeux et exalté. Le titre est d’ailleurs un hommage à Poison Ivy Rorschach des Cramps, qui parait-il n’aimera pas la chanson. Je n’en suis pas un grand fan non plus, mais elle n’est pas si mal cette chanson.

 

On conclut la face A avec Fire Spirit. Le morceau est court, mais plein d’une puissance et d’une énergie folle. Les guitares jouent simplement, mais toute distorsion en avant. Le titre n’est pas le plus convaincant de l’album, mais conclut assez bien la face A avec un Pierce incandescent.

 

Ghost On The Highway nous remmène dans la transe sur un thème typiquement américain et proche des Doors : le meurtre sur l’autoroute. Comment ne pas penser à la mythique Riders On The Storm en regardant les paroles de ce Ghost On The Highway ? La chanson est en plus excellente, et nous emmène en transe tout le long de cette route sans fin et infernale, avec comme seuls guides les halètements de Pierce.

 

Jack On Fire me fait étrangement un peu penser à Sonic Youth (quelques années avant le groupe New-Yorkais d’ailleurs). Le thème est pourtant du pur Gun Club, mêlant exorcisme, pulsions meurtrières et sexe. Là encore, drôle de transe que ce trip sexuel et assassin, mais prenant si on se laisse aller à ce riff aigu et très noise.

 

Black Train semble évoquer un train lancé à pleine vitesse avec son rythme de batterie survolté. C’est d’ailleurs ce rythme qui mène tout le morceau de bout en bout, et qui lui donne son coté plaisant (même si finalement, heureusement qu’il est assez court peut-être).

 

Retour au blues avec Cool Drink Of Water, une reprise de Tommy Johnson. Ce bluesman parfois confondu avec Robert Johnson (c’est peut-être lui l’inventeur de la fameuse légende faustienne) est aussi un des piliers du delta blues et le titre nous transporte immédiatement dans le sud mythique, pas très loin du Mississipi. Contrairement au survolté Preaching The Blues de la face A, le groupe livre ici une version plus proche du blues original (le rythme), sauf bien sur avec la voix de Pierce, qui ne chante jamais de manière « conventionnelle » sur cet album (on l’entend dans d’autres registres sur l’album suivant The Gun Club - Miami (1982)). Un voyage qui se conclut par quelques grésillements de criquets, comme une simple promenade au bord du fleuve mythique et mystique…

 

J’aurai d’ailleurs préféré que Cool Drink Of Water serve de conclusion, plutôt que Good By Johnny. Non pas que le titre soit mauvais en soit, mais il est plus rythmé que le précédent, et la ligne de basse donnerait presque plus envie de s’enfiler d’autres morceaux que de conclure le disque. Ce n’est pas non plus à mon gout un des morceaux les plus transcendants de l’album. Histoire de chipoter quoi…

 

Car j’ai du mal à trouver des points négatifs à cet album. Il m’a peut-être fallu un peu de temps pour rentrer dedans, pour « comprendre » cette musique, et la transe vaudoue qu’elle peut représenter. Au delà du mélange assez contre nature du blues et du punk, il y a réellement un univers qui se dégage, même derrière cette pochette étrange (il en existe une autre, peut-être encore plus flippante d’ailleurs). Un univers invoquant Jim Morrison, Robert Johnson et Tom Verlaine pour en créer un autre, résolument unique. Onirique, mais s’il faut parfois rentrer un peu dedans (le second album Miami, est peut-être encore meilleur d’ailleurs, et en tout cas tout aussi recommandable).

 

17,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.   
 

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