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23 novembre 2011 3 23 /11 /novembre /2011 21:40

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/b/b4/Let_Them_Talk_Hugh_Laurie.jpg

 

Tracks : St. James Infirmary ; You Don't Know My Mind ; Six Cold Feet ; Buddy Bolden's Blues ; Battle Of Jericho ; After You've Gone ; Swanee River ; The Whale Has Swallowed Me ; John Henry ; Police Dog Blues ; Tipitina ; Whinin' Boy Blues ; They're Red Hot ; Baby, Please Make a Change ; Let Them Talk

 

A la maison, la pile des dvds correspond à la pile des dvds. Bien séparée des vinyles et des cds. Seules quelques exceptions viennent trahir d'éventuels et rares liens, comme les dvds musicaux. On va dire que c'est une catégorie hors norme. Mais ces deux mondes restent à peu près étanches. Si les musiciens se mettent à faire du cinéma, ou va-t-on? Ah on me fait signe que c'est déjà le cas depuis longtemps. On me fait même signe que c'est par le cinéma que j'ai découvert Tom Waits. Soit, admettons. Mais si les musiciens peuvent jouer au cinéma, les acteurs ne peuvent eux pas chanter! Soyons sérieux deux minutes. Vous en connaissez beaucoup vous des acteurs de cinéma ou de télévision qui sont passés à la musique? Rappelons que Philippe Risoli, David Hasselhof, Carlos ou John Wayne ne sont pas des exemples admissibles. Quoi? Hugh Laurie? Qui? Ah oui, Docteur House. Le cynique, fabuleux et sexy (ça s'entend mesdames vous savez?) Docteur House. Même moi qui ne suis pourtant pas un grand amateur de séries télé, je me suis pris d'affectation pour celle-ci (même si je ne la suis parfois que d'un œil) et pour ce personnage. Mais parbleu, cet Hugh Laurie ne peut décemment pas être doué pour tout. Or, il réussit très bien dans son métier d'acteur. Son livre Tout est sont contrôle est parait-il assez bon et a eu un certain succès. Et maintenant l'homme se lance dans la musique? Avec un disque de blues, de surcroit? Soyons sérieux, ce premier album sorti le 9 mai 2011 et intitulé Let Them Talk ne peut pas être bon. On ne peut décemment pas être bon dans tout, non?

 

« Laissez les parler » nous indique la pochette. Car plutôt que de se livrer à un pur exercice d'ego, Hugh nous livre avec ce Let Them Talk un disque composé entièrement de reprises. Drôle de choix, surtout lorsqu'on voit le répertoire auquel s'attaque le Doc. Du pur blues. Hugh Laurie s'efface derrière les plus grands noms du blues qu'il fait défiler ici tout au long de ces 15 morceaux. Louis Armstrong, Lead Belly, Bessie Smith, Ray Charles, J.B Lenoir, Memphis Slim ou Robert Johnson sons invoqués tour à tour ici... Des choix incontestables, entre valeurs sures et artistes plus confidentiels. C'est très étonnant de choisir de tels artistes pour faire un premier album en 2011. Laurie est en plus un homme goût dans ces choix...

L'interprétation est quant à elle particulièrement étonnante, de par son classicisme absolu. Tous ces morceaux ont été repris des dizaines de fois (White Stripes, Red Hot Chili Peppers, Elvis Presley, Nina Simone), dans des versions très éclectiques. Et parfois très éloignées (en bien comme en mal) des versions originales. Hugh Laurie fait ici un choix totalement différent, voire rétrograde : cap vers La Nouvelle Orléans. Son interprétation et celle du groupe qu'il réunit est très proche du blues de la Nouvelle-Orléans. Mélangeant donc allègrement le piano et la guitare du blues avec les cuivres du jazz. Clapton a d'ailleurs fait un choix similaire sur son dernier album : Eric Clapton - Clapton (2010) . Et cette interprétation de Laurie et de ses musiciens (et des collaborateurs comme Irma Thoams ou Dr John) rendent la démarche d'autant plus appréciable et louable. Ce n'est que du blues, joué à l'ancienne. Mais rien que par cette preuve de goût, Laurie conquiert le public. Sa voix -pas exceptionnelle mais tout à fait convaincante- associée à ce soin apportée aux instruments (mention spéciale au slide guitariste) fait qu'on ne s'ennuie pas à l'écoute de l'album.

 

Ce qui est bien là l'essentiel. Hugh Laurie signe avec Let Them Talk un album de reprises honnête, peu novateur, mais qui a le mérite de transmettre sincèrement sa passion pour le blues. C'est peut-être le meilleur moyen pour s'y replonger après tout. Et c'est encore un bon moyen pour lui de toucher à tout avec succès. Il est vraiment doué pour tout cet homme, c'est agaçant.

13/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.
 
 

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21 novembre 2011 1 21 /11 /novembre /2011 11:07

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/2/21/Face_to_Face_%28The_Kinks_album%29_coverart.jpg

 

Tracks : Party Line ; Rosie Won't You Please Come Home ; Dandy ; Too Much on My Mind ; Session Man ; Rainy Day In June ; A House in the Country ; Holiday in Waikiki ; Most Exclusive Residence for Sale ; Fancy ; Little Miss Queen of Darkness ; You're Lookin' Fine ; Sunny Afternoon ; I'll Remember

 

L'histoire du rock est parsemé d'étoiles filantes détruites par le poids du succès. Kurt Cobain, Jim Morrison... Ou en moins impressionnant Ray Davies. Après le succès des trois premiers albums des Kinks et de leurs singles (All The Day And All Of The Night ; Set Me Free ; Tired of Waiting For You ; Well Respected Man), le leader et chanteur du groupe sombre dans la dépression. A l'époque, le showbizness ne comprend pas le surmenage. La starification massive et la pression des tournées incessantes, concepts qui n'existaient pas dans l'esprit de l'industrie musicale des années 60, ont eu raison de Ray. Ce dernier passe une bonne partie de l'année 66 cloitré chez lui, loin de la fougue électrique et des bagarres qui émaillent la vie en tournée du groupe. Au calme, en Angleterre. La paix anglaise lui permet d'écrire des chansons. Mais loin des riffs de guitare garage saturés, le leader des Kinks se tourne vers la pop. Alors que les Beatles s'apprêtent à tout changer avec , le gang des frères Davies publie un single qui va émerveiller l'été anglais 1966 : Sunny Afternoon. Pour la première fois, les Kinks vont même battre les Beatles. Sunny Afternoon détrône Paperback Writer le 7 juin 1966. Quelques mois plus tard, les Kinks sortent Face To Face, leur quatrième album, avec justement Sunny Afternoon. De quoi augurer du meilleur. Mais ce face à face est-il à la hauteur de ce single pop parfait?

 

Tout comme son prédécesseur ( The Kinks - The Kink Kontroversy (1965) ), Face To Face est un album de transition. Mais là où The Kink Kontroversy est un album de rock anglais avec quelques incartades pop, son successeur est un album de pop avec quelques réminiscences rock. Assez étonnamment, c'est une de ces réminiscences rock qui ouvre l'album. Et c'est efficace. Car Party Line avec son rythme nerveux et ce son de guitare caractéristique semble reprendre les choses là où l'album précédent les avait laissées. Joli mensonge. La suite est d'un tout autre acabit. Et lorsque les Kinks reviennent au rock sur cette galette ( A House in The Country avec un piano boogie énergique et des « Oh Yeah » éraillés qui ponctuent le morceau ; Most Exclusive Residence for Sale avec ses chœurs qui me font penser un peu aux Beach Boys ; You're Lookin' Fine et I'll Remember ), ce n'est pas forcément une très bonne nouvelle. Car si Party Line et A House in The Country sont réussis, les trois autres morceaux sont ceux que j'aime le moins de l'album. Most Exclusive Residence For Sale me rappelle trop les Beach Boys pour me convaincre (je n'aime pas ce groupe). Quant à You're Lookin' Fine et I'll Remember elles manquent clairement d'efficacité et de conviction et sont totalement anodines. Et en plus elles entourent le chef d'œuvre absolu de l'album qu'est Sunny Afternoon... En ces temps où le psychédélisme est en plein essor, le retour au simple Rythm n' Blues est un mauvais choix pour les Kinks.

Parlons en justement du psychédélisme. Le groupe des frères Davies a souvent la réputation de ne pas avoir sacrifié à cette mode, ce qui fait en partie sa légende. C'est vrai sur Village Green Preservation Society, album étonnamment rétrograde (voire réactionnaire) en 1968. Mais ce n'est pas vrai pour Face To Face. Rien que la pochette avec ses papillons sortant d'un esprit humain semble trahir une influence psychédélique... Tout comme les quelques bruitages qui parsèment l'album. La galette démarre par exemple sur une sonnerie de téléphone. On retrouve des coups de tonnerres sur Rainy Day In June, morceau assez solennel avec une sorte d'écho dû aux effets sur la guitare et le piano. La galette compte surtout deux morceaux très psychédéliques à mes yeux : Holiday in Waikiki et Fancy. Le premier est un morceau assez rock dans sa structure, mais plein de bruitages (évoquant une plage et une barque) et proposant une guitare hawaïenne très surprenante et agréable. La voix reléguée au second plan, associée avec ce son de guitare et ces bruitages donne un coté très estival et évocateur à ce morceau très bon et psychédélique. Fancy explore quant à elle la musique indienne... Un peu comme Norvegian Wood des Beatles un an plus tôt. Le groupe se fait presque l'égal des scarabées ici, même si Within You Without You surclassera tout un an plus tard. Trois concessions psychédéliques de toute beauté pour les frères Davies. Trois ilots lointains perdus au milieu d'un océan de pop anglaise...

 

Car là où le groupe devient carrément divin, c'est bien sur les morceaux les plus pop de Face To Face. Les pépites semblent couler de la plume de Ray Davies avec une facilité déconcertante qui rappelle Lennon ou McCartney. Comment ne pas fondre devant le clavecin de Rosie Won't You Please Come Home dédiée à la sœur des frères Davies qui habite en Australie? Comment ne pas être amusé par l'excellent single Dandy, chef d'œuvre purement anglais au superbe riff de guitare très clair et non saturé ? Comment ne pas céder aux douceurs acoustiques de Too Much On my Mind qui met à l'honneur un piano et une voix féminine ou de Little Miss Queen of Darkness au pont de batterie étonnant ? La seule réponse valable pour ne céder aux charmes d'aucun de ces magnifiques morceaux tient en deux mots : Sunny Afternoon.

 

Car si tous les morceaux pop précédemment cités sont en effet très bons, ils s'inclinent tous, malgré leur niveau, devant la mythique Sunny Afternoon. C'est bien simple, c'est une des meilleures chansons anglaises des années 60. Cette fameuse descente d'accords qui lance cette chanson nous emmène déjà dans un parc anglais, « in sumertime » comme le rappelle Ray tout au long du morceau. Un chef d'œuvre mélancolique et simple, tellement évident et évocateur qu'il en est génial. C'est là toute sa force, et toute la justification de son mythe. Lorsque la chanson passe dans le film Good Morning England (), la scène lui donne un contexte qui la résume bien. Les parcs anglais des sixties, l'insouciance, le simple plaisir du soleil et de la musique... Ma chanson préférée des Kinks, devant d'autres chefs d'œuvres comme Death of A Clown ou You Really Got Me.

 

Malheureusement, et c'est presque une évidence, Face To Face n'est pas au niveau de cette chanson. Néanmoins ce quatrième album des Kinks est excellent. Les frères Davies semblent y abandonner le Rythm N' Blues violent et saturé de leurs trois premiers disques pour se tourner vers une orfèvrerie pop qui fera leur gloire pour les années à venir. Une renommée essentiellement critique, car commercialement, ces albums furent des flops. Cependant ce face à face garde des traces du passé du groupe, en proposant 5 morceaux qui sont du pur rock et qui sont clairement les plus dispensables de l'album. Autant écouter les Stones ou les Who, ou les premiers albums du groupe. Ce qui fait que ce quatrième disque du groupe est encore un album de transition et n'atteint pas les sommets qu'atteignent les deux albums suivants. Néanmoins il possède ce charme propre aux albums de transition dans la carrière d'un groupe et constitue une pièce de choix dans leur discographie. Car les morceaux pop sont déjà de purs bijoux. Et rien que Sunny Afternoon justifie l'écoute...

 

15,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.
 

 

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15 novembre 2011 2 15 /11 /novembre /2011 15:36

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/1/19/BadasMe.png

 

Tracks : Chicago ; Raised Right Men ; Talking At The Same Time ; Get Lost ; Face To The Highway ; Pay Me ; Back In the Crowd ; Bad As Me ; Kiss Me ; Satisfied ; Last Leaf ; Hell Broke Luce ; New Year's Eve

 

Depuis 2004, Thomas Alan Waits avait disparu de la circulation. Aucune nouvelle depuis Real Gone. Aucun album studio en 7 ans. Bien sur, l'homme n'était pas totalement aux abonnés absents. Une compilation de raretés (Orphans : Brawlers, Brawlers and Bastards) et un live (Glitter And Doom Live) nous ont permis de garder le contact avec lui. On l'a vu aussi au cinéma, notamment dans l'excellent L'imaginarium du Docteur Parnassus, où le regretté Heath Ledger apparaissait pour la dernière fois. Les années 2000 furent pour Tom des années théâtrales. Une influence sur son travail au cinéma, bien sur, mais aussi sur ses idées musicales. Ses albums des années 2000 (Blood Money ; Alice ; Real Gone) sont très inspirés par un théâtre rappelant Brecht et qui semble de plus en plus l'intéresser au détriment de la musique. Jusqu'à ce silence de plusieurs années... Un silence finalement rompu le 23 aout 2011 avec l'annonce de la sortie d'un nouvel album studio du maitre. Ce jour là, un nouveau morceau est révélé : Bad As Me. Il donne son nom à la galette qui est finalement sortie le 21 octobre. De quoi prouver que Tom Waits, malgré son silence de 7 ans est toujours aussi génial et méchant?

 

“Maybe things will be better in Chicago”. Chicago sert de point de départ au voyage. Tout comme Singapore servait de point de départ à Tom Waits - Rain Dogs (1985). Ou tout comme le Japon (Big In Japan) servait de point de départ à Tom Waits - Mule Variations (1999). Clin d'œil? C'est possible, tant cette 17ème livraison du plus troubadour des bluesmen américains (et réciproquement) semble vouloir revenir sur les bases qui ont fait son succès. Soit Rain Dogs, Mule Variations, Swordfishtrombones et Bone Machine. Les deux premiers commencent, tout comme Bad As Me par l'évocation d'un lieu. Ici c'est le lieu de naissance du blues électrique qui donne à ce morceau une âme torturée immédiatement reconnaissable. Du pur Tom Waits.

Ce dernier cherche d'ailleurs d'autant plus à renvoyer aux ambiances de Rain Dogs, Bone Machine ou Mule Variations qu'il est entouré ici de musiciens ayant déjà joués à ses cotés sur ces albums. Tout d'abord Marc Ribot, guitariste qui a souvent joué avec Tom Waits (notamment sur Rain Dogs et Mule Variations) et qui vient illuminer de son jeu l'album. Une nouvelle fois... Tom invite aussi un autre guitariste avec qui il a déjà joué sur Rain Dogs et Bone Machine et qui vient lui apporter une science du riff inimitable. Réfugié d'une machine Rolling Stones en panne, c'est en effet Keith Richards en personne qui vient poser sa guitare sur quatre titres de Bad As Me (Chicago, Satisfied, Last Leaf et Hell Broke Luce). Quatre des plus beaux titres de l'album, d'ailleurs. Mais Tom s'entoure aussi de quelques fidèles comme Charlie Musselwhite à l'harmonica (comme sur Mule Variations), le multi-instrumentiste David Hildalgo, déjà dans l'équipe depuis Franks Wild Years ou encore Larry Taylor et Les Claypool à la basse, auxquels il adjoint un autre invité prestigieux : Flea, le célèbre bassiste des Red Hot Chili Peppers (qui joue sur Raised Right Men et Hell Broke Luce).

 

Bad As Me renvoie donc à la propre mythologie du sieur. De quoi frôler l'auto-caricature donc... Mais en fait il n'en est rien. L'album est bien le meilleur du conteur depuis Mule Variations. Il y a un souffle unique qui parcourt ces 13 morceaux simples (qui n'ont pas de liens entre eux j'entends) et qui les rend géniaux. Certes Tom nous renvoie simplement à ses propres sommets. Le sale petit cabotin est sur de nous plaire comme ça. Mais loin de la redite, on retrouve l'âme d'un blues déglingué qui nous séduit quasiment immédiatement. L'homme se permet à nouveau des blues torturés et gueulards (Chicago), réutilise à merveille des percussions étranges qui ont fait de sa musique de cirque cette chose si attrayante (Raised Right Men) et se permet même des commentaires sur la crise actuelle qui secoue le monde (Everybody's Talking In The Same Time) sur un fond de cuivres oscillant entre le tragique et le comique. Le chanteur semble même rendosser son costume de Mr. Nick (le diable dans L'imaginarium du Docteur Parnassus) avec l'amusante Bad As Me, single évident, même s'il n'est pas le meilleur titre de l'album.

Comme à son habitude, le chanteur n'oublie pas non plus ses premières amours. Comme d'habitude donc, il nous livre d'arrachantes ballades au piano où sa voix au bord du gouffre peut émouvoir à peu près n'importe qui. Essayez Face To The Highway et la très romantique Kiss Me où sa voix semble sortir d'un vieux phonographe (une de mes préférées de l'album) pour voir... “Kiss Me Like A Stranger”, chante t'il, alors que jamais il n'a paru si proche et humain. Je ne peux que conseiller l'amusante New Year's Eve et son accordéon mélancolique pour votre réveillon de la Saint Sylvestre.

 

Les bons morceaux se ramassent donc à la pelle sur Bad As Me. Mais il y en a 3 qui sortent vraiment du lot, à la fin de l'album. Il s'agit de Satisfied ; Last Leaf et Hell Broke Luce, sur lesquels joue Keith Richards. Entendre le guitariste des Stones poser son jeu très reconnaissable sur un titre qui s'appelle Satisfied, presque 50 ans après I Can't Get No (Satisfaction) alors même que son groupe est au point mort et que Tom en rajoute “Now Mr. Jagger and Mr. Richards/I Will scratch where I've been itching”, ça a quelque chose de réjouissant. Mais là où Keith et Tom font des merveilles c'est sur les deux titres suivants. Sur Last Leaf, ce duo n'a jamais paru aussi intemporel, immortel et émouvant. La dernière feuille de l'arbre, alors que toutes les autres sont tombées... Pour la seule fois de l'album, ses deux là mélangent leurs voix pour un résultat absolument magistral. Une chanson mélancolique, à la guitare acoustique qui prouve que définitivement, ces deux artistes seront toujours parmi les dernières feuilles de l'arbre de l'éternité. Par contraste, là ou Last Leaf n'est que fragile beauté mélancolique, Hell Broke Luce est un morceau électrique complétement déjanté, évoquant la guerre et la violence. Bruits de mitrailleuses, chant scandé et hurlé, riffs infernaux et incendiaires qui servent un texte rageur et violent contre la guerre : “That big fucking bomb made me deaf, deaf/A Humvee mechanic put his Kevlar on wrong/I guarantee you'll meet up with a suicide bomb “. Une pure déflagration, dans tous les sens du terme...

 

De quoi conclure en beauté ce retour de Tom Waits. On pouvait craindre ce retour. Après tout il est parfois difficile d'être à la hauteur de sa légende... Mais Tom Waits est toujours le même. Sa voix est intacte, toujours aussi rauque et belle et son inspiration rappelle les grandes heures de sa carrière. De quoi ajouter une nouvelle (superbe) pierre à l'édifice. Peu original, certes. Enfin pour du Tom Waits s'entend. La plupart des artistes n'osent même pas imaginer dans leurs rêves les plus fous d'avoir un univers pareil. Mais ce Bad As Me est assurément un des 5 meilleurs crus de Tom Waits à mon gout. De quoi prouver que Tom est toujours le plus féroce, le plus cabotin et un des plus géniaux songwriters américains, comme le prouve son intronisation au Rock N'Roll Hall Of Fame cette année.

 

16,5/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.
 

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13 novembre 2011 7 13 /11 /novembre /2011 19:57

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/6/66/SallyCD.jpg

 

Tracks : Ride Sally Ride ; Animal Language ; Baby Face ; N.Y. Stars ; Kill Your Sons ; Ennui ; Sally Can't Dance ; Billy

 

Meurtri. Haineux. Drogué. Autant de qualificatifs qu'on pourrait appliquer à Lou Reed après l'échec cuisant de Berlin. Après la gloire de Lou Reed - Transformer (1972) , l'ex leader du Velvet Underground avait mis toutes ses tripes et toute son inspiration dans ce film pour les oreilles qu'était Berlin. Sans effet. Le public l'a boudé. Lui préférant le glam-rock de Transformer ou l'extrémisme expérimental du Velvet. Il a fallu que le New-yorkais mette sur pied une des tournées les plus destroy et les plus impressionnantes de son époque (immortalisée par les albums Rock N'Roll Animal et Lou Reed Live) pour défendre sur scène Berlin et le faire grimper finalement dans les charte. Mais cette bataille n'a pas été sans conséquence sur Lou. Lui qui est si friand d'ironie vient d'en vivre une belle. Il vient de créer ce que la critique reconnaitra ultérieurement comme son chef d'œuvre, mais le disque a été un échec commercial. Pourquoi ne pas tenter l'inverse alors? Pourquoi ne pas tenter de faire un album basique, conçu comme une simple succession de chansons et voir comment le public va l'accueillir? Le corps plein d'amphétamines et d'héroïne, l'esprit occupé par cette (juste) colère, Lou entre donc en studio en avril 74 pour enregistrer son 4ème album solo. Le successeur de Berlin. Intitulé Sally Can't Dance, celui-ci sort en Aout 1974 sous une pochette... Disons discutable. Atroce en vérité. Ce qui vu l'état mental de Lou Reed à ce moment, est plutôt logique. Mais musicalement, que vaut ce Sally Can't Dance?

 

Pour la plupart des gens, Sally Can't Dance est le premier loupé de la carrière solo. Hormis  Lou Reed - Lou Reed (1972) (que j'affectionne tout de même), Lou Reed a en effet un parcours sans faute jusqu'en 1974. Pour beaucoup, ce Sally Can't Dance est son premier mauvais album solo. Lou lui-même reconnait s'être peu investi dans l'album, par cette phrase restée célèbre : “It seems like the less I'm involved with a record, the bigger a hit it becomes. If I weren't on the record at all next time around, it might go to Number One.”Moins Lou s'implique dans un album, plus haut il est dans les charts. Car c'est un fait établi, Sally Can't Dance fut son plus gros succès dans le Billboard américain, se glissant jusque dans le top 10. Mais à contrario, un fan de Lou Reed vous dira que comme le new-yorkais lui-même le reconnait, l'album ne valait même pas la peine qu'il s'y investisse. Ce qui est vrai en partie.

 

8 chansons, 33 minutes. On ne peut pas dire que le Lou se soit foulé sur la quantité. Minimum syndical pour ce Sally Can't Dance. Surtout qu'effectivement, la prise de risque est nulle : un album pleins de chœurs féminins (c'est souvent le cas chez Reed) et de cuivres. Ce qu'on entend parfaitement sur le titre d'ouverture Ride Sally Ride. Un titre qui donne déjà le ton de l'album à mes yeux. Pas mauvais (la voix de Lou Reed est inégalable à l'époque), mais pas franchement bon non plus. Assez vite oubliable en fait. Et les cuivres et les chœurs n'apportent rien ou peu de chose. Idem avec Sally Can't Dance, l'avant dernier morceau de l'album. La piste est correcte, mais l'ajout de cuivres et de voix féminins semblent masquer la banalité du morceau. Et lorsque déboule Animal Language avec un Lou essayant d'imiter des bruits d'animaux et nous offrant un des pires refrains de sa carrière, on se dit qu'effectivement, l'album s'annonce mal. Voire très mal, pour les plus pessimistes d'entre nous.

 

L'espoir renait avec le calme Baby Face, un titre qui n'est pas franchement à s'en relever la nuit, mais qui bénéficie d'une belle partie de guitare de Danny Weis, toute en finesse. On dirait presque un blues. Ennui est un peu dans le même genre, même si on peut lui reprocher de trainer en longueur. Mais c'est réellement N.Y. Stars dans laquelle Lou s'en prend à tous les groupes suiveurs du Velvet qui ont essayés de l'impressionner qui s'impose comme la première bonne chanson du disque. Lou Reed s'y fait moqueur et méchant sur un riff de guitare quasi hard-rock. Il y est donc à son meilleur. Et sa voix devient encore plus glaciale et méprisante sur Kill Your Sons, assurément le chef d'œuvre de l'album. Un chef d'œuvre électrique... Comme ces séances d'électrochocs que Lewis Alan Reed a dû subir dans sa jeunesse pour le “guérir” de son homosexualité. Glaciale et méprisante, pleine d'une violence latente (la guitare), la chanson évoque cette expérience fondatrice d'une partie de la psyché de Lou Reed. Le poète new-yorkais n'est jamais autant à son meilleur que quand il évoque des sujets aussi malsains...

 

Mais la chanson finale, Billy me fait mentir. Car si Lou est à son meilleur lorsqu'il est plein de rage comme sur Kill Your Sons, il sait aussi être émouvant lorsqu'il évoque des choses simples. Des choses simples comme l'amitié. Reed y évoque ici un ami d'enfance, Billy, avec qui il a grandi “We grew up together ever since we were nine/We went to school, he was my best friend”, qui est devenu docteur, mais a du partir à la guerre (du Vietnam je suppose). Et son retour de la guerre : “When he came back, he wasn't quite the same/His nerves were shot, but not me”. Un texte émouvant, triste, mais pas malsain comme peut l'être le répertoire de l'ex-Velvet. Et lorsqu'il se fait sobre ici en s'accompagnant d'une simple guitare acoustique et d'un saxophone (avec Doug Yule du Velvet à la basse), il atteint des sommets. Moins belle que Kill Your Sons, mais une bonne chanson quand même.

Une fois le bilan fait, difficile donc de classer Sally Can't Dance comme un grand cru de la carrière solo de Lou Reed. Seuls deux titres sont vraiment très bons : le glacial Kill Your Sons et le touchant Billy. Le reste oscille entre le bon (N.Y. Stars), le plutôt sympa (Baby Face ; Ennui) et le vraiment moyen (Ride Sally Ride ; Sally Can't Dance). Au final seul Animal Language est vraiment une mauvaise chanson. On est loin du naufrage donc. Mais on est aussi loin de la réussite, puisque deux “vrais” bons titres, c'est un peu juste. Surtout venant de Lou Reed. Un Lou(p) qui finalement mettra sa menace à exécution... Il ne chante, ni ne joue sur l'album studio qui suit Sally Can't Dance. Il fallait vraiment qu'il soit au fond du gouffre pour enchainer un album aussi dispensable que Sally Can't Dance avec Lou Reed - Metal Machine Music (1975)

 

12/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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11 novembre 2011 5 11 /11 /novembre /2011 19:32

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Tracks : Radio Waves ; Who Needs Information ; Me Or Him ; The Powers That Be ; Sunset Trip ; Home ; Four Minutes ; The Tide Is Turning (After Live Aid)

 

Le 11 Novembre 1986, David Gilmour et Nick Mason annoncent qu'ils continueront à se produire sous le nom de Pink Floyd. Ils déclarent ainsi au monde que le mythique groupe des années 70 n'est pas mort, malgré le départ de Roger Waters, un an plus tôt. Et si Pink Floyd continue d'exister sans son bassiste, c'est aussi contre l'avis de celui-ci. Car dans l'esprit de Waters, Pink Floyd c'est lui. Le groupe ne peut exister sans lui. La mégalomanie de The Wall a fini par toucher son auteur. Pour lui rendre justice, il est vrai que c'est lui qui a mené la danse sur les grands albums du Floyd, du Dark Side Of The Moon, à The Wall (où il signe seul 70% de l'album dont l'idée de base est la sienne) en passant par Animals où Gilmour ne cosigne qu'un seul titre (Dogs). Une domination qui culminera sur Pink Floyd - The Final Cut (1983) , “A requiem for the post-war dream by Roger Waters and performed by Pink Floyd”. Mais la justice en décidera autrement. David Gilmour, Nick Mason et plus tard Rick Wright pourront se produire sous le nom de Pink Floyd. En résultera en 1987, Pink Floyd - A Momentary Lapse Of Reason (1987) . Mais en cette année 1987, si Waters a “perdu” la bataille juridique, il ne compte pas perdre la bataille culturelle qu'il a engagé avec ses ex camarades. Lorsqu'il apprend qu'A Momentary Lapse Of Reason est prévu pour le courant de l'année 1987 (il sort le 7 septembre), il intensifie ses efforts pour sortir son deuxième effort solo, qui succède à The Pros And Cons Of Hitch Hiking sorti en 1984. Intitulé Radio K.A.O.S., l'album parait finalement le 15 juin 1987. De quoi concurrencer sérieusement A Momentary Lapse Of Reason et démontrer définitivement la supériorité de Waters sur le reste du Floyd?

 

Sur Radio K.A.O.S., Roger Waters prouve qu'il n'a rien perdu de sa créativité, ni de son regard inquisiteur sur l'Angleterre et le monde. Et il y a matière à écrire en cette fin de décennie. Après les thème de la folie (The Dark Side Of The Moon), de l'absence ( Pink Floyd - Wish you Were Here (1975) ), la relecture de La Ferme Des Animaux d'Orwell (Animals), l'opéra rock malade de The Wall et sa suite pacifiste The Final Cut et après les crise de la quarantaine que traverse un homme marié dans ses rêves (The Pros And Cons Of Hitch Hiking), Roger nous narre ici l'histoire d'un handicapé, Billy. Ce dernier est assimilé à un légume par son entourage -qui prend néanmoins soin de lui- mais possède un don : il peut manipuler les ondes radios (Radio Waves). Un don avec lequel il apprend à communiquer, notamment avec le DJ de la Radio K.A.O.S., une radio pirate de Los Angeles. Il lui narre l'injustice que subit son frère emprisonné pour un crime qu'il n'a pas commis (Me Or Him), son exil à L.A. (Sunset Strip) et les dégâts du Tatchérisme en Angleterre (The Powers That Be). Mais finalement, Billy, exaspéré par le monde, finit par employer les grands moyens : il pirate un satellite militaire et simule une immense attaque nucléaire sur les principales villes du monde (Home ; Four Minutes). De quoi ramener l'humanité au principal, à savoir l'amour (The Tide Is Turning (After Live Aid))...

 

Il faut reconnaitre à l'ex-bassiste du Floyd que même au plus bas de sa créativité artistique, il a toujours un savoir faire unique en matière de concepts-albums et d'écriture. Radio K.A.O.S. ne déroge pas à la règle et permet à Waters de faire valoir ses thème récurrents (critiques des médias de masse, du productivisme acharné, du Tatchérisme, des guerres, du nucléaire...). L'album est d'ailleurs dédié à toutes les victimes des effets violents du monétarisme. Tout un programme. Malheureusement, comme je le disais, Waters est capable de pondre des idées et des thèmes albums intéressants, même lorsqu'il est au plus bas de sa créativité artistique. Et Radio K.A.O.S. est indéniablement le plus mauvais album de sa carrière solo. Il est même très largement inférieur à A Momentary Lapse Of Reason, album pourtant très médiocre.

 

La question qu'on se pose d'ailleurs à l'écoute de Radio Waves, ce n'est plus «Qui va gagner entre le Floyd de Gilmour et Waters? », mais bel et bien « Comment un génie comme Waters a t'il pu accoucher d'un truc pareil? ». Le mot « truc » est encore plutôt sympathique. Car vraiment, le début de l'album est totalement calamiteux. Radio Waves frôle la caricature et cumule tous les défauts récurrent de l'œuvre solo de Waters et une bonne partie des défauts qu'on peut imputer aux années 80. On retrouve en effet ici, comme sur tout l'album -et l'œuvre de Waters- beaucoup de bruitages. Ça marchait plutôt bien sur The Wall, mais à force c'est agaçant. Ces voix vocodées qui font les transitions entre les chansons sont par exemple assez atroces. Et incompréhensibles de surcroit, ce qui est embêtant vu qu'il s'agit de la voix de Billy racontant son histoire. Comme toujours chez Waters, beaucoup de chœurs féminins sont aussi présents ici. Un peu ça va, mais à force, ça fait vraiment racoleur et peu attrayant au final... L'idée est je suppose de masquer la faiblesse de la voix du bassiste. Il faut dire qu'ici, plus que jamais, le chant de Waters est faible, voire mauvais. C'est bien simple, je ne m'étais jamais vraiment fait la réflexion avant l'écoute de Radio K.A.O.S.. Pour moi Waters n'était certes pas un grand chanteur, mais n'était pas mauvais pour autant. Et bien sur Radio K.A.O.S., je me suis aperçu à quel point sa voix pouvait être faible lorsqu'elle est mal enregistrée. C'est bien simple, on dirait un vieillard par moments, et c'est bien la seule fois que je me suis fait cette remarque, que ce soit avec le Floyd ou dans sa carrière solo.

 

La faute surement à une production absolument atroce. Car en plus de la voix affreuse de Waters, la production années 80 finit d'achever (oui, carrément) l'album. Beaucoup de synthés au programme (certains titres ressemblent vraiment au pire de la variété des années 80) et une batterie absolument atroce. Elle présente ce son anémique typique des années 80 où les batteries étaient mixées comme des boites à rythmes, sans ampleur, sans finesse, sans puissance. Combinée aux défauts récurrents de l'œuvre de Waters, cette production finit d'achever les compositions déjà très médiocres sur le plan musical.

Seules surnagent finalement la belle Four Minutes, joli morceau sobre et plein de tension et le final un peu grandiloquent The Tide Is Turning (After live Aid) avec ses chœurs masculins. Deux chansons sobres, plutôt douces et qui véhiculent des émotions (tension et peur pour la première, espoir pour la seconde). La seule éclaircie de Radio K.A.O.S... C'est dommage car même s'il n'a jamais atteint en solo les sommets de PInk Floyd, le bassiste a proposé de bons albums (notamment Amused To Death). Mais il est passé ici totalement à coté de son sujet. Comme un aveu, il ne jouera aucun morceau de cet album sur son In The Flesh: Live de 2000. On comprend pourquoi... En 1987, le Floyd de Gilmour a gagné la bataille. Une victoire sans panache tant tout le monde semble y perdre.

06/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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9 novembre 2011 3 09 /11 /novembre /2011 21:31

 

Tracks : Statement Of Intent ; Make Your Move ; Painting Pictures ; Once I Had A Friend ; Patience ; Decision Time ; Feeding Freddie ; Pieces Of The Puzzle ; Stick Up ; Hang Loose ; The Bottom Rung ; Roll It ; The Young Patter ; Snap Back ; Head South ; Genki Strut

 

En dix ans de carrière, on a le temps de voir défiler les modes. Si la soul et le funk semblent être revenus à la mode depuis quelques années, ce n'était pas forcément le cas au début des années 2000. L'époque se prêtait plus à la nu-soul (D'Angelo), au hip-hop et au R'n'B (Destiny's Child). Pourtant, il existe des groupes de soul, notamment anglais, bien antérieurs à la réapparition du genre derrière Amy Winehouse et Duffy. L'un de ses groupes vétérans de la scène soul/funk du début des années 2000 est The Baker Brothers, groupe à la longévité exceptionnelle et au talent reconnu. Il faut dire que le groupe a une carrière dense qu'il l'a amené sur plusieurs labels (Freestyle, Soultage, P-Vine, Emi et Loop Masters) et durant laquelle il a pu sortir 6 albums et jouer en première partie de Sly & The Family Stone. Composé de Chris Pedley à la basse et au chant, Geoff Lai à la guitare et au chant, Paul Young au saxophone et au chant, Ted Carrasco à la batterie et de Scott Baylis à la trompette, le quintet ne compte néanmoins pas s'arrêter en si bon chemin. Il est “temps de témoigner” proclament-ils avec leur septième album paru cet automne, Time To Testify. Mais cet album témoigne t'il réellement du talent des Baker Brothers?

 

Lorsque démarre Time To Testify, on serait tenté de dire que le témoignage ne sera pas très concluant. Car le disque met du temps à démarrer. Le court (1min14) instrumental qui ouvre l'album, State Of Intentement est même assez moche. Le son de batterie, reproche récurrent sur la galette (j'y reviendrai) est absolument atroce et le son de manière générale n'est pas très convaincant. Et malgré un évidente hausse de niveau, je n'arrive pas à être captivé par la trépidante Make Your Move, un titre intéressant (l'orgue hammond et le solo de saxo sont sympas) mais pas assez prenant au final. La faute là encore à un son un peu faible. La composition n'est pas non plus à proprement parler la meilleure de l'album. En fait il faut attendre Once I Had A Friend pour que ce Time To Testify commence à nous apporter des preuves concluantes quant à son envie d'en découdre. Son thème de cuivres en intro est d'ailleurs tout à fait adorable et contribue beaucoup au charme de la chanson. Pour la première fois de la galette, le groupe nous montre aussi un versant légèrement pop, dans la structure du refrain ainsi que dans la voix qui étonnamment, me rappelle Paul McCartney. Et la formule, pourtant atypique prend plutôt bien, même s'il y a mieux sur le disque et même juste après cette chanson.

Car Si Once I Had A Friend est un bon titre qui “lance” un peu l'album à mes yeux, c'est réellement Patience qui lui fait atteindre sa vitesse de croisière pour moi. Soyons clairs. Patience est une bombe, probablement un des meilleurs titres de l'album. Once I Had A Friend était (très) bien. Patience frôle la perfection. Le groupe conjugue ici un savoir faire quasi pop (une écoute peut suffire à vous ancrer le morceau en tête) et une expérimentation proche du jazz avec une flute (qui nous gratifie d'un très joli solo vers 2min20). Ajoutez à cela une rythmique funk pleine de groove et une guitare funk qui intervient de manière très juste au bon moment et vous obtenez le cocktail détonnant de ce Patience qui réellement lance l'album dans une très bonne dynamique, dont il ne redescendra pas.

 

Car le reste de l'album est quasiment un sans-faute. Seuls les deux courts instrumentaux Decision Time et Roll It sont réellement en dessous du lot, notamment à cause du son de batterie. Le psychédélique et instrumental final Genki Strut souffre lui aussi à mes yeux de ce problème du son de la batterie. Cette dernière comme sur tout l'album sonne vraiment de manière très sale je trouve. C'est d'ailleurs assez étonnant, car le reste des instruments est plutôt bien mixé et enregistré. Mais la batterie sonne de manière très sale, dans une approche qui rappelle un peu le garage rock. Et vu le niveau des compositions et de la recherche sonore, cette batterie peut très vite saccager un morceau. C'est le cas de ces trois instrumentaux. C'est aussi le cas sur la belle et délicate Head South, où le solo de guitare a pourtant de quoi nous faire chavirer. Peut-être est-ce moi qui cherche le détail (c'est possible), mais j'avoue avoir été gêné par ce “détail” durant tout Time To Testify.

 

Néanmoins, malgré ce reproche et si on exclut ces 2/3 instrumentaux (j'aime quand même bien Genki Strut), l'album de Patience jusqu'au final est un pur régal. Le groupe y mélange avec audace et maitrise le funk (Stick Up et sa ligne de basse descendante et absolument géniale, pleine de groove), le jazz (le solo de saxo sur Hang Loose), ou même le rock (The Bottom Rung, avec ses nappes de claviers très aériennes qui portent une mélodie délicate et assez pop). Tout est bon et le groupe atteint à plusieurs reprises des sommets, qui sont autant de singles confirmés ou en devenir. Pour vous faire une idée, je ne peux que vous inciter à jeter une oreille sur Feeding Freddie ou The Young Patter en plus de Patience et Once I Had A Friend.

 

De quoi faire une réussite de ce 7ème album des Baker Brothers. Car malgré quelques défauts (le son de batterie et un peu de lenteur au démarrage), cette galette est hautement recommandable. Le groupe le dit lui même, il aime tous les musiques qui sont “soulfull”, pleines d'âme. Il en fait la démonstration ici en se les appropriant et en les mélangeant pour créer un témoignage lui-même finalement plein d'âme : Time To Testify.

 

15/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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7 novembre 2011 1 07 /11 /novembre /2011 22:25

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Tracks : Don't Want You No More ; It's Not My Cross To Bear ; Black Hearted Woman ; Trouble No More ; Every Hungry Woman ; Dreams ; Whipping Post

 

En 1969, le monde de la musique vibre autour des hippies et du psychédélisme. A Woodstock, Jimi Hendrix incendie une nouvelle fois le blues pour en faire une musique cosmique et surpuissante. Néanmoins si le Voodoo Chile semble avoir totalement bouleversé l'approche du blues -et encore plus celle de la guitare électrique- certains groupes américains se sont cantonnés à un blues plus simple. Ils ne cherchent pas à concurrencer Hendrix qui a rendu en quelques mois Cream obsolète. Ils ne cherchent pas non plus à concurrencer les anglais qui désormais semblent détenir le savoir-faire du blues et qui l'alourdissent de plus en plus (The Jeff Beck Group, Led Zeppelin, Black Sabbath). Ces américains se contentent simplement de braquer leur regard sur le sud de leur pays, là où tout est né. Là où Muddy Waters et John Lee Hooker ont vu le jour. Là où est mort, 30 ans plus tôt, Robert Johnson. Certains de ces groupes américains n'ont pourtant jamais mis les pieds dans ce sud qu'ils idéalisent. C'est notamment le cas de Creedence Clearwater Revival, qui depuis 1967 creusent ce sillon blues sudiste avec succès (). Mais si les gens de Creedence sont californiens, il y a un autre groupe qui apparait en 1969 et qui lui vient directement du sud. Un groupe dans lequel jouent deux frères et qui porte leur nom : The Allman Brothers Band. Les deux frères (Duane et Gregg Allman) ont d'abord fait leurs armes dans le groupe Hour Glass, avec lequel ils ont sorti deux albums en 67 et 68 (Hour Glass et Power Of Love). Deux échecs. Mais à force de concerts et de bœufs dans la région de Jacksonville (Floride), ils finissent par faire des rencontres fructueuses. Et petit à petit ils forment un nouveau groupe, The Allman Brothers Band. Le groupe contient 6 membres : Duane Allman à la guitare lead et slide, Dickey Betts à la guitare; Greg Allman à l'orgue et au chant, Berry Oakley à la basse, Butch Trucks à la batterie et Jai Johanny “Jaimoe” Johanson à la seconde batterie et aux percussions. C'est sous cette configuration qu'après quelques concerts dans le sud, ils enregistrent leur premier album en septembre 69, qui parait le 4 novembre. Sobrement intitulé The Allman Brothers, ce premier disque est-il fidèle à la légende qui entoure le sud des États-Unis?

 

Chose plutôt étonnante, le groupe choisit comme première chanson de son premier album un morceau instrumental. Une reprise du Spencer Davis Group qui plus est. Choix étrange que ce Don't Want You No More... Mais qui se justifie au final, car le groupe parvient à faire de cet instrumental une plate forme idéale pour son blues. Car tout ici transpire le blues, avec quelques influences jazz. Tout évoque le sud, du riff de guitare excellent, aux passages de l'orgue hammond, plus calmes, mais néanmoins très jolis. La rythmique n'est pas en reste, et si Don't Want You No More n'est pas le meilleur titre de l'album -ni même de la face A- il lance avec honneur les hostilités.

 

It's Not My Cross To Bear poursuit sur un cri de Gregg Allman, qui fait son entrée en scène ici. Sa voix profonde est superbe et est un des éléments clés du groupe, avec un feeling blues absolument imparable. Mais sur ce morceau calme et langoureux, ce sont surtout les deux guitares qui ressortent. L'orgue et la rythmique servent surtout de bases pour que les guitaristes (Duane Allman et Dickey Betts) se livrent à un jeu de questions/réponses absolument fantastique dans la première moitié du titre, jusqu'à ce que ce dernier explose finalement sous les coups de butoir de batterie vers la fin et son final en fade-out limite un peu frustrant (surtout que le morceau revient après un étrange et court silence).

 

C'est d'ailleurs la (les?) batterie(s) qui lance(nt) à plein régime Black Hearted Woman, morceau nettement plus énervé que les deux premiers. Est-ce vraiment utile de signaler à quel point le riff de guitare est excellent? Pour la peine c'est fait. Mais les différents solos dérivant de ce riff ne sont pas en reste et les guitaristes enflamment littéralement cette piste, qui dispose d'une base rythmique particulièrement solide et entrainante. Vers 3min20, le groupe nous gratifie même d'un cours solo de percussions et de batterie qui nous emmène ensuite vers un délire vocal un peu psychédélique. Une courte incartade avant de revenir au blues et à un solo final de guitare qui s'achève là encore dans un fade-out un peu frustrant.

 

La face A se conclut avec une reprise, Trouble No More de Muddy Waters. Ce morceau sera d'ailleurs joué en live dans le fameux Live At fillmore East dans une version encore meilleure que celle-ci. Néanmoins cette reprise du géant du blues vaut déjà largement le détour sur ce disque studio. C'est classique, mais la puissance du rythme (une constante chez Muddy Waters et son compositeur attitré Willie Dixon) et le riff restent particulièrement efficaces. Pas la meilleure reprise de Muddy Waters que je connaisse, surtout en 1969 avec Led Zeppelin dans les parages (avec par exemple You Need Love qui deviendra Whole Lotta Love), mais une reprise honnête et plutôt savoureuse.

 

Every Hungry Woman redémarre les hostilités de la face B avec un riff de guitare mélangé à un orgue très puissant. Gregg chante de manière très rocailleuse et les congas mélangés au reste de de la section rythmique apportent une grosse puissance à ce titre, très compact et dense. Evidemment cette structure très dense est propice à des excentricités guitaristiques qui jouent là encore à un jeu du chat et de la souris (chaque guitare sur une enceinte), seulement arbitré par la voix de Gregg. Un des titres les plus solides de l'album, avec Black Hearted Woman

 

A contrario Dreams paraît beaucoup plus éthérée et aérienne. La densité qui caractérisait Every Hungry Woman semble envolée. C'est l'orgue qui démarre doucement cette chanson, portant une voix plus claire (mais tout de même éraillée) de Gregg Allman. Et même lorsque la batterie et les guitares entrent en action, le morceau garde une dimension assez spatiale qui tranche nettement avec les titres trempés de sueur qui précèdent. C'est d'ailleurs assez discutable de faire se succéder ainsi un des titres les plus denses de la galette avec le plus aérien et calme. Drôle de contraste... Dreams est de plus plutôt longue (7min19, de loin le morceau le plus long de l'album) et malgré la bravoure des guitares m'ennuie un peu. Rien de dramatique néanmoins.

 

L'album se conclut (déjà) avec Whipping Post, morceau qui sera magnifié, tout comme Trouble No More sur le Live At Fillmore East. Démarrant sur la basse, le morceau est à nouveau prenant, notamment grâce à son riff. Pur morceau de guitares, Whipping Post met néanmoins l'orgue à l'honneur. Le regretté Duane Allman était vraiment un immense guitariste (classé 2ème plus grand guitariste de tous les temps par le magasine Rolling Stone). Si le morceau reste carré et efficace en studio, on sent bien qu'il est propice à toutes les expérimentations et aux jams. Ce qui sera confirmé par sa version live, bien plus dantesque. Et bien plus longue aussi car le morceau passe de 5min20 ici à presque 23 minutes en live....

 

Cap plein sud... Vers le blues, vers la country et le jazz. C'est la formule -simple et efficace- que suivent les Allman Brothers sur ce premier album. Ils feront mieux par la suite, c'est indéniable. Leur blues-rock est plus taillé pour le live que pour le studio, ce qu'ils prouveront deux ans plus tard avec At Fillmore East. Néanmoins, ils n'ont pas à rougir de leur travail studio. Car dès ce premier album, ils démontrent leur incroyable cohésion (la section rythmique) et dévoilent leurs armes secrètes avec cette paire de guitaristes qui va en inspirer plus d'un, notamment Eric Clapton qui invitera Duane Allman sur Layla And Others Assorted Love Songs l'année suivante. Il y a finalement très peu d'impairs sur ce premier album. Tout au plus Dreams est un peu anecdotique et leur reprise de Trouble No More est un peu inférieure à ce qui se fait en matière de reprises de blues cette année là. Le disque est aussi vraiment court (33minutes), reproche récurrent dans leur discographie studio. Mais surtout, le groupe fera mieux par la suite en live et en studio (Idlewild South et surtout Brothers And Sisters), ce qui fait que ce premier album n'est pas totalement indispensable. Néanmoins, si vous aimez The Allman Brothers Band ou le blues-rock, c'est un (très) bon disque, qui lançât la carrière d'un groupe hors du commun...

 

15/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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6 novembre 2011 7 06 /11 /novembre /2011 00:27

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Tracks : Magical Mystery Tour ; The Fool On The Hill ; Flying ; Blue Jay Way ; Your Mother Should Know ; I Am The Walrus ; Hello Goodbye ; Strawberry Fields Forever ; Penny Lane ; Baby You're A Rich Man ; All You Need Is Love

 

L'age d'or du rock est pour beaucoup daté : 1967. Année de sortie des deux premiers albums des Doors, du premier Velvet Underground, des deux premiers disques de The Jimi Hendrix Experience, du premier Pink Floyd, de Surrealistic Pillow de Jefferson Airplane, de John Wesley Harding de Dylan... Pas un mois de cette année sans son chef d'œuvre Mais s'il y a un un groupe au dessus de la mêlée, qui montre la voie et fait les modes en 1967, c'est bien les Beatles. Cette année est pour les Fab Four l'apogée de leur carrière. Le sommet de leur cohésion et de leur créativité en tant que groupe, avant qu'en 1968 ils partent en Inde et se séparent en quatre identités distinctes. Sorti en début d'année,  The Beatles - Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band (1967) est le disque du “Summer Of Love”, séduisant les hippies comme les amateurs de pop. Chef d'œuvre de pop psychédélique, concept album, crise de mégalomanie, Sgt Pepper's invente en tout cas l'album, pensé tel qu'on le connaitra par la suite. Mais pour autant, les Beatles n'oublient pas leur savoir-faire en matière de singles. Et 1967 est une grande année pour eux de ce coté là aussi, notamment avec Strawberry Fields Forever et Penny Lane, les deux singles qui auraient dû se trouver sur Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band. Le cinéma continue aussi d'intéresser les 4 garçons dans le vent durant ce Summer Of Love. Ils participent à un projet de film, qui deviendra Magical Mystery Tour. Et comme chaque collaboration entre eux et le cinéma, ils réalisent une bande originale. Celle-ci parut en Angleterre sous le nom de Magical Mystery Tour, sous la forme d'un double EP. Cependant les Etats-Unis ayant à l'époque une politique différente quant à la parution des singles, le label américain Capitol décidât de publier cette BO agrémentée de tous les singles du groupe sortis en 1967. Ce qui donnât un LP du nom de Magical Mystery Tour, deux fois plus long que le double EP anglais du même nom. L'objet de cette chronique donc. Si les Beatles sont donc au sommet avec Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band, qu'en est-il sur ce disque artificiel qui sera finalement intégré dans la discographie du groupe?

 

C'est le morceau éponyme qui ouvre les hostilités et la face A consacrée à la bande originale du film. Pour l'anecdote, Magical Mystery Tour servira de générique pour l'émission télé Va Savoir, animée par Gérard Klein dans laquelle il emmène des enfants à la découverte du monde dans un bus jaune. Au-delà de l'anecdote, Magical Mystery Tour, tout comme Sgt Pepper's Lonely Heartss Club Band qui ouvre l'album du même nom est une introduction parfaite. La fanfare de cuivres apporte une ambiance de foire, typique du son des Beatles en 1967 et la rythmique implacable fait que le titre passe vite, probablement trop. A noter des overdubs vocaux qui donnent un coté un peu magique (certains diront défoncés) à ce début de voyage qui se conclut par quelques notes d'un piano solitaire...

Des notes de piano qui permettent de faire la transition avec ce qui est probablement le morceau le plus mélancolique de cette face A, The Fool On The Hill. Composé par Paul McCartney ce morceau est un bijou de douceur mélancolique, portée par le piano et une flute qui a même le droit à divers solos. Un titre datant des sessions de With A Little Help From My Friends et qui est largement au niveau de ceux de Sgt Pepper's tant cette mélancolie presque enfantine est belle.

 

Flying est forcément inférieure, après deux merveilles pareilles. Composée par le groupe en entier, c'est une des seules chansons instrumentales du groupe. Une courte démonstration psychédélique, qui sans être mauvaise est vraiment anodine et pas seulement à cause des chansons précédentes.

 

Blue Jay Way poursuit le voyage dans le psychédélisme avec beaucoup plus de réussite. Composée par Harrison, la chanson se perd dans une atmosphère mystique assez propre aux compositions du guitariste à l'époque. Le son de l'orgue Hammond, mélangé à celui du violoncelle donne aussi cet air irréel au morceau, où chose rare, Lennon et McCartney sont relégués aux backing vocals. Une belle promenade psychédélique offerte par le bus jaune le long de ce titre...

 

Malheureusement, ce voyage psychédélique est un peu stoppé par le morceau que j'aime le moins de la face A avec Flying : Your Mother Should Know. Composée par McCartney, la chanson se contente d'une pop gentille, plutôt agréable, mais (très) faible comparée à ce qui précède (Magical Mystery Tour ou The Fool On The Hill), ou ce qui suit...

 

Car ce qui suit est un pur chef d'œuvre de psychédélisme. Le joyau de cette face A, signé Lennon, plutôt discret jusque là. Il s'agit d'I Am The Walrus, une des plus étranges et des plus passionnantes chansons des Beatles. Les premiers vers annoncent d'entrée le trip : “I am he as you are he as you are me and we are all together  ; See how they run like pigs from a gun, see how they fly / I'm crying”. Plongée du bus jaune derrière le lapin blanc... Car l'univers de cette chanson doit beaucoup à Lewis Carroll. “Je suis le morse”, le méchant de l'affaire. Peu importe le coté totalement chaotique du texte, ou de la mélodie. Cette anarchie psychédélique et psychotique, mélange de guitares, basse, batterie, violons, violoncelles, cor et clarinette est un joyau et un des mes morceaux préférés des Beatles.

 

Si McCartney avait un peu loupé sa dernière chanson de la face A avec Your Mother Should Know, il se rattrape aisément avec le titre qui ouvre la face B : Hello Goodbye. Pure ritournelle pop dans le style du bassiste, cette chanson est relativement classique par rapport aux deux morceaux qui l'entourent (signés Lennon), tout en demeurant totalement imparable. Seules les 30 dernières secondes surprennent un peu. Le refrain est absolument génial et le chant fait le charme de ce morceau, définitivement intemporel.

 

Strawberry Fields reprend néanmoins les choses là où I Am The Walrus les avait laissées. Nouvelle prouesse d'un Lennon discret mais au sommet de son art. Ce morceau est à nouveau un chef d'œuvre, plein de mélancolie et de rêverie... Une image idéalisée d'une enfance probablement pas si heureuse que ça, portée par le psychédélisme du mellotron d'introduction (joué par McCartney) et les transitions au violoncelle ou au swarmandal... Une sucrerie douce amère sublime de poésie et d'évocation. Un autre chef d'œuvre psychédélique de plus pour Magical Mystery Tour.

 

Mais Paul McCartney n'est pas homme à désarmer si facilement. Et si Lennon a marqué un point en composant une immense chanson sur son enfance plus ou moins fantasmée, il en fait de même avec la sublime Penny Lane. Plus conventionnelle dans son instrumentation, Penny Lane vaut bien Strawberry Field dans sa beauté. Véritable scène de théâtre mise en scène par McCartney, cette visite du quartier de Liverpool que les quatre garçons connaissent bien (même si seul Lennon l'a vraiment habité) est un pur moment de pop, porté par la beauté des images de McCartney, la douceur de sa voix et les arrangement de cuivres, absolument fabuleux. Un nouveau chef d'œuvre

 

Baby You're A Rich Man parait bien faible au milieu de tous ces chefs d'oeuvres. Le morceau est en effet un peu bancal. Si les couplets calmes chantés par Lennon sont d'une douceur assez psychédélique, ils contrastent avec le refrain plus rock n' roll composé par McCartney. C'est surtout le son de clavioline qui donne ce petit motif musical au morceau qui lui donne son intérêt. Un (très) bon morceau ceci-dit. Juste mineur par rapport à ce qui l'entoure.

Car les cuivres de La Marseillaise entament ce qui est probablement une des chansons les plus connues des Beatles : All You Need Is Love. Ultime chef d'œuvre de Magical Mystery Tour, signé Lennon, le morceau est peut-être la profession de foi ultime du mouvement hippie. Certes c'est un peu béat maintenant, mais après tout... La beauté de l'arrangement orchestral rend cette chanson aussi immortelle que son message.

 

Cette face B est donc, indéniablement, la plus belle face de vinyle gravée par les Beatles, au sommet de leur gloire. Seul Baby, You'Re A Rich Man est en dessous du reste, mais si on la remplace par I Am The Walrus, on n'a que des chefs d'oeuvres. Et la face A, même si elle est inférieure, est-elle aussi très bonne. Au final, il n'y a que 3 titres qui sont bons ou anodins : Flying, Your Mother Should Know et Baby You're a Rich Man. Pour le reste Magical Mystery Tour est un sommet absolu des Beatles, certes inférieur aux albums pensés tels quels ( The Beatles - Revolver (1966) et Sgt Pepper's Lonely Hearts Club Band). Une conclusion parfaite à cette trilogie psychédélique de 1966-1967 qui reste ma période préférée du groupe. De quoi reprendre un billet pour ce tour magique plein de mystère...

17,5/20
(NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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5 novembre 2011 6 05 /11 /novembre /2011 15:46

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Tracks : Horsepower ; Civilization ; Ohio ; Canon (Primo) ; Canon ; On'n'On ; Brianvision ; Parade ; New Lands ; Helix ; Audio, Video, Disco

 

Le voilà donc, ce fameux deuxième album. Le “toujours difficile” deuxième effort d'un groupe, comme le veut la formule. Après un succès fulgurant comme Cross, inutile de dire que Justice était attendu au tournant. Le duo, qui avait fait danser toute la France au son de D.A.N.C.E en 2007 avant de créer la polémique avec le clip de Stress, avait été sacré comme les successeurs d'un autre duo mythique, Daft Punk. La French Touch 2.0. Est-ce ce qui a poussé Gaspard Augé et Xavier de Rosnay a prendre 3 ans pour enregistrer le successeur de leur premier album, vendu à 800000 exemplaires en France? On peut le supposer. Ces 3 années de discrétion ont aussi permis à ce que la hype autour du groupe redescende. En partie au moins. Pourtant la flamme s'est vite rallumée lorsqu'en mars 2011, le single Civilization a été révélé. Grâce à un excellent plan marketing (EPs, publicités pour Adidas), l'attente a augmenté ces derniers mois, jusqu'à la sortie de ce fameux deuxième album, Audio, Video, Disco (enfin) mis dans les bacs le 24 octobre. Malgré son titre ridicule, l'album confirme t'il le statut déjà culte de Justice acquis grâce à Cross?

 

La pochette de Cross était noire, ornée d'une croix lumineuse, dessinée par la lumière des néons. Sur Audio, Video, Disco, on retrouve cette fameuse croix, devenue le symbole de Justice. Mais le décor est tout autre. La croix est devenue monument de pierre, posé au milieu d'un désert. En plein jour. Les membres du groupe nous ont prévenus. Si Cross est un album nocturne et urbain, Audio, Video, Disco en est son opposé. Diurne et champêtre.

Un choix qui s'entend assez vite au delà de ces considérations visuelles. Si le rythme et la puissance des guitares d'un titre comme Canon (et sa courte introduction, Canon (Primo)) auraient été suffocants sur Cross, ils trouvent ici une dimension aérienne étonnante. L'introduction de Parade nous aurait vrillé les tympans sur l'opus précédent. Ici elle vire plutôt à un aérien hymne de stade, très étrange et assez peu agressif au final.

 

Car s'il y a quelque chose qui saute aux oreilles à l'écoute d'Audio, Video, Disco, c'est l'orientation rock que ses créateurs ont voulus lui donner. Les riffs de guitare abondent et surabondent. Ils sont très inspirés du hard rock FM des années 80, type Van Halen, choix affirmé et défendu par le groupe. Car dans cette orientation rock, l'entité bicéphale de Justice choisit des influences assez peu reconnues comme “hype”. Un comble pour un tel groupe. Car honnêtement, il est difficile à l'heure actuelle de s'affirmer contre fan de Van Halen, Genesis, Supertramp ou Yes sans subir des railleries du penseur rock. Et bien, c'est ce que fait le groupe. Et plus que ça encore, c'est ce que le groupe incorpore dans Audio, Video, Disco. C'est l'âme du disque même. Un hard-rock FM de stades 80's passé à la sauce électro. Brianvision renvoie même explicitement à Brian May, guitar-hero de Queen qui est salué ici dans sa version années 80.

 

Pas de chance pour moi. Car ces influences ont le mérite d'apporter un souffle neuf à la musique de Justice, c'est indéniable. Malheureusement, je n'aime pas ces groupes. Vraiment pas. Et je n'aime pas ce que le groupe fait avec ces influences. Ce son aérien, donné même aux morceaux aux riffs les plus hard-rock aseptise les mélodies à mon gout et annihile le rythme et le groove, qui faisaient toute la force de Croos. Malgré la lourdeur des beats, malgré les riffs, il y a toujours des synthés qui donnent de l'air à cet album. La rythmique n'est pas aussi appuyée qu'il le faudrait, et les riffs se perdent en démonstrations étranges. La structure même des titres, proche de la musique progressive, fait qu'on s'y perd. Et les basses funk qui faisaient le charme et l'agressivité d'un titre comme DVNO ont disparues. D'ailleurs, si Cross incitait à la danse, ce n'est plus le cas d'Audio, Video, Disco, disque à écouter chez soit et assis. Ce qui n'est pas fondamentalement dérangeant à mes yeux. Mais sur la plupart des titres, la recette ne prend pas pour moi. L'ajout des voix, beaucoup plus nombreuses que sur Cross n'apporte rien non plus à l'album. Les morceaux chantés sont pour la plupart bancals à mon goût. Souvent Insipides même (Ohio).

 

Malgré tout, il y a de bonnes choses sur Audio, Video, Disco. Le disque a notamment la bonne idée de s'ouvrir par deux de ses meilleurs titres (Horsepower et Civilization). Il a aussi la très bonne idée de se conclure avec ses deux autres meilleurs morceaux (Helix et Audio, Video, Disco). De quoi nous laisser sur une bonne impression. Un peu trompeuse aussi, tant les choses commencent bien avec Horsepower qui est vraiment un excellent titre d'introduction à cet album, valant bien Genesis. La surprise commence un peu avec l'étonnant Civilization, qui est chanté par Ali Love (qui chantait aussi sur le Do It Again des Chemical Brothers). La structure du morceau est étrange, mais la rythmique est absolument énorme et les riffs sont très bons. Même le chant s'accorde très bien à l'ensemble. A noter que le clip de ce morceau est très beau et énigmatique. Dommage qu'Ohio, puis Canon me fassent aussi vite déchanter sur la suite du disque... La conclusion de l'album est quant à elle aussi excellente. Helix est le morceau le plus proche de Daft Punk de l'album. Un titre dansant, entrainant, qui n'oublie pas le rythme et qui met la guitare à l'honneur. Pas extrêmement original (contrairement au reste de l'album), mais efficace. La très bonne surprise finale, c'est ce titre étrange qui donne son nom à l'album, Audio, Video, Disco. Commençant par un thème rappelant la musique classique (l'influence de Yes?), le morceau part ensuite dans une folle cavalcade rythmique pleines de guitare et de synthés ou les mots Audio, Video, Disco reviennent sans cesse. La chanson, bien que surprenante a un vrai potentiel accrocheur, avec cette mélodie finalement quasiment pop et ce son très travaillé. Un des singles de l'album avec Civilization et clairement, ce sont les deux meilleurs titres du disque.

 

Malheureusement, ça ne suffit pas pour sauver Audio, Video, Disco à mes yeux. La démarche est belle. Vouloir à ce point trouver un nouveau son en mélangeant le rock et l'électro impose mon respect. L'album fourmille d'idées c'est évident. Il y a aussi de bons titres. Malheureusement, je n'ai pas accroché à la plupart des morceaux qui ne me transportent pas. Cross me faisait nettement plus d'effet. Dommage donc... Je suppose que l'album trouvera son public (les inrocks en sont fans apparemment), tout en suscitant la polémique. Je salue la démarche artistique et savoure avec plaisir Civilization, Horsepower, Helix et Audio, Video, Disco. Quant à moi, je suis venu, j'ai vu (et écouté), mais je n'ai pas été (con)vaincu.

 

10/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

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4 novembre 2011 5 04 /11 /novembre /2011 18:29


Londres, son soir grisâtre, sa «peak hour » dans le tube et ses concerts. Après avoir connu une immense frustration devant un concert de The Cure vendu en 2 minutes et un autre de The Good, the Bad and the Queen, vendu en un quart d’heure, je me suis jeté sur une place pour aller voir the Jim Jones Revue au O2 Empire de Sheperd’s Bush. J’ai donc pris mon courage à deux mains et me suis jeté dans le train et traversé une bonne partie de Londres en pleine heure de pointe pour vous ramener quelques souvenirs de ce petit diamant brut qu’est The Jim Jones Revue.


La musique que le premier groupe, Y Niwl, nous propose est  tout d’abord difficile à cerner. Au début, on a l’impression d’avoir à faire de la cold weave puis, à mesure que le concert suit son cours, on passe à de la musique qui me fait beaucoup plus penser à Apache de The Shadows ou à une bande originale de western. Tout ce concert était uniquement instrumental, exercice risqué qui peut lasser le public. Cependant, les thèmes sont efficaces et même si certains morceaux se ressemblent, on ne s’ennuie pas. Une bonne mise en jambes.


Le second groupe, Sissy and the Blisters, nous offre une bonne dose de pop-rock musclé. L’énergie dégagée par le groupe l’est autant par leur musique que par le jeu de scène du chanteur qui ne tient pas en place. Cependant, il semble manquer un tout petit «quelque chose ». L’absence d’un bassiste explique peut-être  cette sensation même si l’un des guitaristes semble tenter de combler ce vide. Malgré ce bémol, La prestation de Sissy and the Blisters reste un concert de pop-rock très sympathique et le groupe a du potentiel, à suivre donc.


Une avalanche de décibels annonce le début de la prestation de The Jim Jones Revue. Le groupe nous régale de morceaux tirés de leurs deux albums, comme le très puissant Rock N Roll Psychosis ou Burning Your House Down. Le son est saturé à souhait, ce qui peut déplaire à certains, mais c’est aussi une partie de l’identité musicale de The Jim Jones Revue. Le groupe nous offre un rock N’roll à l’ancienne mêlé de punk rock. Les membres, en particulier le chanteur/guitariste, ont une véritable présence sur scène qui rend inutile tout artifice. C’est un concert brut, tout comme leur musique et c’est cette énergie que j’ai particulièrement apprécié aussi bien lors de ce concert que dans leurs albums. Le seul regret que je peux avoir de ce concert est le manque de réaction du public, alors que les membres du groupe appellent les gens à chanter et frapper dans leurs mains, ils sont trop occupés à pogotter (bon, pas tous, certes mais une bonne partie) pour daigner répondre à l’invitation.


En conclusion, alors que des groupes se contentent de casser la baraque, The Jim Jones revue y met en plus le feu et piétine ce qu’il reste de cendres après coup. Cela valait vraiment la peine d’affronter la « peak hour » et la foule Londonienne. Je n’hésiterai pas à recommencer la prochaine fois qu’ils se produiront dans une salle de Londres et je ne saurai assez vous conseiller de vous jeter sur des places si The Jim Jones Revue se produit près de chez vous (enfin si la salle n’est pas trop restrictive sur les décibels).


Jid.

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