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23 avril 2011 6 23 /04 /avril /2011 01:02

http://upload.wikimedia.org/wikipedia/en/b/bb/Prince_Rainbow.jpg

 

Tracks : Rainbow Children ; Muse 2 The Paraoh ; Digital Garden ; The Work pt. 1 ; Everywhere ; The Sensual Everafter ; Mellow ; 1+1+1 Is 3 ; Deconstruction ; Wedding Feast ; She Loves Me 4 Me ; Family Name ; The Everlasting Now ; Last December

 

“Prince est le nouveau Duke Ellington”, disait Miles Davis dans les années 80. Une affirmation difficile à comprendre pour beaucoup de gens, surtout maintenant. Il faut dire que la trajectoire du Kid de Minneapolis est des plus étranges. Superstar des années 80, au même titre que Michael Jackson avec qui il est souvent mis en opposition, il signe deux des albums les plus importants de la décennie :  Prince & The Revolution - Purple Rain (1984) et Prince - Sign O' The Times (1987) . Mais cet artiste hors norme qui faisait rimer succès critique et commercial, adulé du public et de ses pairs, va disparaître durant les années 90. Étrange histoire que celle de cette superstar qui suite au conflit avec sa maison de disques perd jusqu'à l'usage même de son nom. Prince, seigneur des charts des années 80 disparaît sous la forme d'un symbole (le fameux Love Symbol), ou sous un acronyme utilisé par la presse, TAFKAP. The Artist Formally Known As Prince. Il fut Prince, mais les années 90 s'apparentent à une traversée du désert pour celui qui se disait esclave des maisons de disques. Et s'il parvient à sortir un album quasiment tous les ans, aucun n'a vraiment l'impact de Sign O'The Times, faute d'une réelle promotion et d'une réelle inspiration. Mais finalement, Prince Roger Nelson finit par retrouver l'usage de son nom, et bénéficie enfin de toute la liberté artistique qu'il désire. Il est libre, comme il le fait savoir avec le chargé Emancipation en 1996. Libre au point de pouvoir enfin concrétiser ce que Miles Davis avait vu en lui 20 ans plus tôt. Libre même d'aller explorer le jazz, comme il va le faire avec The Rainbow Children, son vingtième album studio (en comptant les diverses BO). Une incursion réussie vers ce genre musical?

 

De nouveaux horizons... Prince abandonne enfin son symbole incompréhensible. Il est aussi devenu témoin de Jéhovah. Et il s'ouvre au jazz, le mêlant au funk et au rock, ses terrains de prédilection habituels. Un véritable kaléidoscope, un arc en ciel de sonorités et de genres mélangés, différents. Mais finalement aussi cohérents que les différentes couleurs d'un arc en ciel.

 

Prince, comme à son habitude, joue de quasiment tous les instruments ici, à l'exception de la batterie tenue par John Blackwell (crédité John Blackwell, The Magnificent), qui joue sur tous les titres sauf Wedding Feast. Mais Prince fait aussi entrer des instruments plus surprenant dans l'univers de The Rainbow Children : des cuivres. En effet dès le sublime morceau d'ouverture, on retrouve un saxophone, tenu par Najee, qui tient aussi la flute dans ce morceau et dans le morceau Mellow. Et c'est un métissage surprenant qui se met en place sous nos yeux : le rythme est jazz (batterie et basse jouent un rythme assez conventionnel pour le genre), le saxo aussi. Mais c'est sans compter sur Prince, qui rappelle pourquoi on le compare si souvent à Hendrix. Vous vous êtes parfois demandé pourquoi? Rainbow Children devrait vous éclairer. Le jazz peu à peu devient psychédélique, électrique, planant et furieux. La basse elle-même se modifie, lorgne vers le funk, et laisse les fulgurances de la guitare nous guider au milieu de l'arc en ciel. La montée de ce morceau est longue (10min03), mais une fois rendu au sommet de l'arc en ciel, rien ne nous fera plus redescendre.

Car le maitre des lieux a plus d'une corde à son arc, plus d'une couleur a sa palette. Lorsque la ballade Muse 2 Paraoh poursuit le voyage, les fulgurances électriques sont déjà loin. C'est la soul, moderne comme celle de D'Angelo (dont l'album Voodoo est peut-être passé par les oreilles de Prince) qui est convoquée dans cette union avec le jazz. Ballade au piano, à l'âme jazz-soul, à laquelle vient se mêler avec succès et beauté un peu de rap...

 

Alternances d'ambiances tout au long de ces déambulations célestes, parfois au sein même des morceaux. Digital Garden commence sur des percussions qui donnent un air de samba, pour ensuite se terminer sur un délire de guitare électrique nous faisant croiser à nouveau le fantôme d'Hendrix. Du bleu reposant au rouge ardent et endiablé de l'arc en ciel... Mais sa majesté pourpre n'en oublie pour autant pas son fer de lance : le funk. Et sur The Work pt.1 il convie même Larry Gaham, ex-bassiste de Sly & The Family Stone ( Sly & The Family Stone - Stand! (1969) ) pour nous le rappeler, ainsi que 5 trompettistes (The Hornheadz). Autant dire que le morceau pulse à tout va. Une pépite funk comme il y en a d'autres sur l'album (1+1+ Is 3 ; Family Name, chanson que n'aurait surement pas renié Sly Stone justement). Mais ce voyage céleste est aussi fait d'accalmies comme sur l'enchainement Everywhere/The Sensual Everafter/Mellow (avec une jolie flute). On retrouve même une ambiance que ne renierait pas Santana avec quelques percussions et un peu de guitare très planante (The Sensual Everafter). Les images des guitar heroes se suivent, mais ne se ressemblent pas. Parfois Prince revient vers ses propres bases, et un slow comme She Loves Me 4 Me rappelle aisément ses travaux antérieurs. Peu importe après tout, car il maitrise parfaitement l'exercice.

 

Et il faut bien dire que la fin de l'album est un véritable sans-faute entre un Family Name funk en diable, et qui est mon morceau préféré de l'album avec le titre d'ouverture Rainbow Children. Hendrix, Sly & The Family Stone, Prince lui-même... Les couleurs et les images défilent le long des cuivres, de la basse et de la guitare de The Everlasting Now, morceau de qualité, malgré quelques bruitages de foule stupides (l'ambiance est bien léchée pour un live je trouve, même si ça en est peut-être un) et un synthé un peu vilain. De quoi nous mener tranquillement vers la ballade finale Last December, qui si elle n'a pas toute la magie de Purple Rain, ne démérite pas pour autant surtout grâce à son joli solo de guitare.

 

Cependant pour qu'un arc en ciel apparaisse, il faut bien quelques nuages à l'horizon. Notamment cette voix off vocodée, qui intervient durant l'album pour un genre de narration, et qui est absolument incompréhensible et horrible. La spiritualité a toujours été au cœur de l'œuvre de Prince (la rumeur veut qu'il était déjà Témoin de Jéhovah à ce moment là), mais de manière moins pesante et loupée qu'ici. Certains bruitages stupides et nuisibles (comme la foule sur The Everlasting Now) viennent aussi parfois parasiter l'ensemble. Autre nuage : le cœur de l'album est un peu moins performant que le début et la fin. Deconstruction et Wedding Feast sont par exemple totalement inutiles et insignifiantes au milieu de l'album, et se diluent parmi le reste. A noter aussi qu'il y a plusieurs pistes cachées silencieuse à la fin de l'album, qui mènent à une très courte reprise du mot « one » issu de Last December. Un passage inutile, comme Prince les affectionne (cf les multiples pistes cachées silencieuses de 20Ten). Rien de grave après tout, les nuages aident à faire ressortir la lumière des autres titres.

Car assurément, The Rainbow Children est un album lumineux. Un disque comme je n'attendais pas (plus?) vraiment de la part de Prince, qui se défait ici avec délectation des années 80. Un disque où il prouve encore une fois qu'il est définitivement un génie. Alors certes il a fait mieux (Sign O'The Times), et il y a quelques défauts ici qui empêchent l'album d'être vraiment parfait. Mais cette balade avec les enfants de l'arc en ciel est superbe, et constitue surement un des sommets de l'œuvre de Prince.

 

16/20 (NB : La note exprime juste le plaisir que j’ai ressenti personnellement à l’écoute, non pas une note de la technique musicale, ou même de la valeur réelle de l’album en général. Elle permet juste d’indiquer mon échelle de plaisir ressenti ici.)
 
Moi-même.

 

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